Chapitre 12

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Louie

Me parler d'une telle façon alors que j'essaie juste de faire la conversation est une chose que je n'accepte pas. Je veux bien être gentille et compréhensive, mais je ne suis pas d'accord pour que l'on me manque de respect. 

Ça m'apprendra à vouloir être avenante avec les gens, alors que habituellement, je ne le suis pas. Je ne suis pas le genre de fille qui fait le premier pas. Je préfère analyser la personne dans mon coin, avant de décider si oui ou non nous allons pouvoir avoir une accroche.

Mais pour aujourd'hui, j'ai voulu laisser ma stupide caparace de côté et m'ouvrir un peu plus aux autres, enfin, avec lui. C'est mon capitaine et je ne souhaite pas qu'il y ait une mauvaise entente. Même si c'est électrique entre nous, je le ressens, et je ne sais pas pourquoi. 

J'essaie d'y faire abstraction.

J'ai compris dans son regard qu'il avait un mauvais rapport avec la mort et qu'il y a sûrement fait face que trop de fois. Mais je n'y suis pour rien et ce n'est pas contre moi qu'il doit s'énerver. En réalité, je suis simplement vexée qu'il pense de moi que je suis une balance. Quel serait mon intérêt d'aller dire à tout le monde qu'il a fait une sorte de crise d'angoisse ? Aucun, en voilà la réponse. 

J'ai une devise que je me force à appliquer tous les jours : "ne fais pas aux autres, ce que tu n'aimerais pas que l'on te fasse".

Ce n'est pas parce que c'est un homme qu'il n'a pas le droit d'avoir d'émotions. Même si, malheureusement la société d'aujourd'hui impose à l'homme d'être puissant et violent, et à la femme d'être douce et émotive. 

Ce ne sont que les gens bornés qui peuvent penser de la sorte.

Je rentre en courant dans le bâtiment pour échapper à la pluie qui tombe de plus en plus fort, quelques minutes de plus sous cette averse et mon fond de teint se mettrait à couler. Et même si personne n'est là, Orlando l'est, et je n'ai pas envie qu'il me voit ainsi. 

Comme un monstre..

Tout est si calme, personne n'est encore revenu. Je peux donc profiter un peu de cette solitude que, contrairement à beaucoup de personnes, j'apprécie grandement. La semaine a été riche en émotions, et je ressens le besoin de me reposer. Pas forcément physiquement, mais plutôt mentalement.

Mes chaussures posées au pied de mon lit, je m'y allonge et regarde le plafond.

Il a le même passé que moi. Mais je n'ai pas osé le lui dire. Il avait l'air déchiré intérieurement, cette solitude le pèse et je l'ai immédiatement ressentie. J'aurai peut-être dû lui dire que moi aussi, je n'ai personne. 

Comme lui, je n'ai aucune famille, mes deux parents sont morts lors des attentats du onze septembre deux-mille un lorsque j'avais seulement deux ans. 

Et le pire, c'est que ce jour-là, j'étais présente au World Trade Center avec eux. Et miraculeusement, j'ai survécu et je ne sais toujours pas comment je peux être en vie aujourd'hui, alors qu'eux, ils y ont laissé leurs vies. Je n'ai aucun souvenir de ce moment, et c'est mieux comme ça. 

Je connais juste la cause de leurs morts car on me l'a dit lorsque j'ai été transférée à l'orphelinat. Mais je l'ai plutôt bien vécu, j'étais très petite donc je n'ai pas vraiment de souvenir avec mes parents. Le pire pour moi restera pour toujours mes années dans cet orphelinat, mais ça, c'est une autre histoire. 

Peut-être que, de savoir qu'il n'est pas le seul dans ce cas-là, ça l'aurait rassuré? Ou bien, il m'aurait simplement envoyé balader en me disant que je n'ai pas à comparer nos deux passés ? Je ne sais pas, et je ne le saurai probablement jamais.

Une vie à t'attendreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant