Sixième chapitre. Patte noire (1)

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Après un brossage doux et plus calme que le précédent – la faute à la promenade qui a fatigué Sully – Romy entreprend de passer l'aspirateur dans le salon où poils et grains de sable se sont mélangés. Tout porte à croire qu'il n'est pas un adepte de cet objet ménager. Le pauvre chat s'est réfugié au plus haut de son arbre, sur la plateforme arrondie, et ses yeux noirs scrutent les mouvements du balai aspirateur, craintifs, comme s'il s'apprêtait à l'aspirer tout entier.

‒ Viens, bébé chat ! lui susurre-t-elle après l'avoir rangé dans le placard. 

Mais Sully laisse ses pattes fermement agrippées au coussin, les sens en alerte au cas où elle aurait l'idée de ressortir cet aspirateur du diable. 

Tout en préparant à manger, Romy s'adonne à quelques minutes de lecture. D'une main elle mélange l'eau des spaghettis pour éviter que les fils ne s'amalgament, de l'autre elle maintient la page ouverte. 

Sully a fait son entrée. Il mange, tête plongée dans sa gamelle.

‒ Mais quel cruchot, celui-là ! marmonne-t-elle à son personnage fictif. 

Il relève le museau, observant la jeune femme. 

‒ Pas toi, bébé chat ! Mais lui !

Elle désigne son livre avec la spatule, comme si Sully pouvait comprendre. Sauf que le chat s'en retourne à mastiquer ses croquettes. En ouvrant le frigo, elle constate :

‒ Il va falloir retourner faire des courses... Hum... Je vais y aller en voiture, cette fois. On fera le plein pour être tranquille jusqu'à la fin de la semaine. Comme ça, nous pourrons faire une promenade en fin d'après-midi. Qu'en dis-tu Sully ?

Elle interprète son miaulement comme un assentiment, et retourne avec bonne humeur dans sa lecture, évitant une éclaboussure d'eau frémissante.

***

Sur le canapé, Romy et Sully se sont endormis. Elle est réveillée par les vibrations de son smartphone. Hébétée, elle se frotte les yeux puis ramasse son livre resté au sol. Puis, elle prend connaissance du message de Jim et s'empresse de lui répondre:

Romy : Oui, ça se passe toujours très bien. Pendant que je lisais, Sully s'est couché à côté de moi. Il est adorable. On a fait une première balade, jusqu'à la plage. Et là, il dort encore.

Elle prend une photo du Ragdoll, paisiblement endormi, sa patte posée sur ses yeux pour cacher la lumière. 

Jim : J'aime toujours autant quand il fait ça. Il me manque terriblement, surtout le soir, quand je rentre dormir à l'hôtel. C'est bien le seul inconvénient, quand je suis en déplacement. Ceci-dit, c'est la première fois que je pars aussi longtemps.

Tu lis quoi ?

Romy :

Jim : Ah, Bram Stocker

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Jim : Ah, Bram Stocker... Un classique ! J'avais suivi une conférence sur les thèmes de la circulation, de la fluidité, du sang dans ce roman. Si tu aimes ces univers, dans le genre créatures célèbres et glauques, le monstre du Dr Frankeinstein de Shelley pourrait te plaire.

Romy : Je l'ai déjà lu. J'avais aimé ! Pour mes prochaines lectures, je veux revenir en Romantasy.

Jim : Et pas de Dark Romance ? On entend parler de ça partout, ces derniers temps.

Romy : Ce n'est pas à mon goût. Ou alors, il faudrait que ce soit sacrément malin dans le story telling, l'écriture... 

Jim : Du genre, Le silence des Agneaux rencontre Fifty Shades of Grey ?

Romy : Y'a de l'idée, pourquoi pas. IJBOL !

Jim : IJBOL ? LOL ? MDR ? Smiley tête de mort ou qui pleure. Je suis perdu !

Romy : C'est ma petite cousine qui m'a appris IJBOL. Pour être franche, je ne l'utilise qu'avec elle...

Jim : le choc éternel des générations.

Bref, sinon, j'ai lu le dernier prix Goncourt. Ça se passe sur plusieurs décennies en Italie. On suit un amour contrarié des années 20 aux années 80, et c'est aussi sur la création artistique, jamais loin du sentiment amoureux.

Romy : Il est dans ma wishlist. Je pense le lire à la rentrée.

Jim : Nous pourrions en reparler. Ça m'a touché.

Romy : Okay.

Je vais partir au supermarché. Sully pourra dormir tranquille pendant ce temps.

Jim : Alors, bonnes courses. Je vais sûrement aller me balader avant de faire un resto avec mes pères.

Mes pairs* (le boulet). IJBOL.

Romy :;)

Bonne soirée.

Romy n'est plus du tout dans le gaz. Ça lui plaît de tomber sur un amateur de littérature. Elle n'a pas trop l'occasion de parler de ses lectures. Et ce Jim, toujours au visage fantôme, n'en devient que plus en plus séduisant. Le pouvoir du mystère...

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