C'est le premier jour de pluie continue depuis que Romy a posé ses valises chez Jim et Sully. Pourtant, la baisse des températures et ce paysage d'aquarelle, avec pour sommet ces nuages grisâtres, la rassurent. Elle a toutes les excuses du monde pour rester dans son cocon douillet. La soirée de la veille lui a laissé un goût amer. Romy a dépensé trop de son énergie, et malgré la gentillesse du petit groupe qui l'a intégrée aux jeux de fléchettes, ce sont les relents toxiques qui ont pris le dessus. Au bout du compte, elle se demande bien quels étaient les desseins de Léa en lui proposant de venir à sa soirée d'anniversaire.Et puis, elle sent que Morgan a un effet sur elle, mais les a-côté sont trop peu rassurants. Elle ne rêve pas d'une histoire compliquée.
À l'abri de sa tanière livresque, elle savoure un roman d'Agatha Christie trouvé dans la bibliothèque du salon, avec Sully pour compagnon et des bougies pour éclairer sa lecture. Une matinée de repos et de calme qu'elle apprécie.
‒ C'est bien mystérieux, tout ça... énonce-t-elle. A ton avis, Sully, crise cardiaque ou poison ?
Sully, allongé en crapaud sur le tapis, répond à ce stimuli, par un « miaou » doux et lent, presque interrogatif.
‒ Môôô, qu'est-ce que t'es mignon !
Elle repose son livre et s'accroupit afin de lui gratter la tête. Sully ferme les yeux et redresse le cou pour mieux sentir les papouilles. Ses ronronnements agitent ses vibrisses.
‒ C'est qui le plus beau ? Oh, oui, t'aimes bien les grattouilles, toi, dit-elle d'une voix de bébé.
À la cuisine, la théière siffle l'heure du thé. Romy saisit une tasse qu'elle s'empresse d'aller remplir. De la fenêtre, elle constate que la pluie se fait moins dense. Elle hésite à appeler Morgan. Leur dernier échange est resté sur des non-dits. Mais que lui dirait-elle ?
Sully est à ses pieds, poursuivant sa parade féline.
‒ Môô, p'tit cœur. Je te manque, tu veux encore des caresses, toi !
La fin de matinée est silencieuse, Romy poursuit sa lecture et Sully, revenu dans sa bannette, dort comme un loir.
Au fur et à mesure des minutes, sa lecture lui semble moins passionnante : elle n'arrive plus à se concentrer.
Romy n'a jamais connu de panne de lecture. C'est dire si ça la préoccupe ! N'y tenant plus, elle prend son smartphone et consulte le site de l'office de tourisme. Après tout, elle peut sortir toute seule. Quand il fait un temps à rester en intérieur, Romy apprécie les musées ou les châteaux. Avec de la musique dans les oreilles, elle se sentira moins seule et pourra apprécier, autrement que lorsqu'elle fait ses excursions en compagnie. Après un déjeuner au lance-pierre, elle passe sa sacoche en bandoulière et prépare l'itinéraire GPS sur son smartphone.
‒ A plus tard, bébé Sully ! clame-t-elle au pas de la porte.
Le beau ragdoll, indifférent, n'est qu'un coussin de poils étendu sur le canapé.
***
La jeune femme a jeté son dévolu sur une abbaye impressionnante. En surplomb de l'océan, perchée sur un monticule recouvert de bruyères, le bâtiment s'élève vers les nuages, exhibant ses pierres ruisselantes.
Après un passage à travers les ruines du corps extrême de l'abbaye d'origine, Romy pénètre dans la partie centrale, encore debout après des restaurations successives. La billetterie moderne et épurée ne dénature pas trop l'écrin. Le billet d'entrée donne accès aux offices, à la salle des expositions et à la bibliothèque et au salon de thé. Si Romy compte bien préserver la quiétude de ceux venus assister aux offices, elle tient à voir l'exposition sur les dessins de Mary Blair, découvrir la bibliothèque des moines et se prendre une pâtisserie au Salon.
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Ragdoll Lovers
ChickLitJuste avant sa dernière rentrée scolaire, Romy est embauchée en tant que pet sitter. Le propriétaire du chat à garder, Jim, qu'elle n'a jamais vu, lui a donné toutes les indications nécessaires avant de partir pour une conférence à l'étranger. Ell...