31 jours à Brumevent || Ben Beckman

Jour 3

Le troisième jour

Le vent continuait de souffler doucement à travers les rues de Brumevent, emportant avec lui le murmure des habitants et l'écho lointain du ressac. Tao, encore troublée par ce regard intense, s'était réfugiée dans la petite taverne du village, espérant calmer l'agitation qui régnait en elle. La chaleur du feu crépitant dans l'âtre contrastait avec la fraîcheur de l'air extérieur, mais malgré le confort du lieu, son esprit restait captif des images de ce bateau et de son mystérieux équipage. Elle savoura son thé chaud, les saveurs de la citrouille, du gingembre et de l'orange s'accordaient pour créer cette boisson réconfortante. Elle savait que les pirates ne tarderaient plus à venir ici à la recherche de chaleur et d'une boisson forte. Ils allaient enfin pouvoir écouler une partie de leur alcool de citrouille. Elle n'avait donc que quelques minutes devant elle avant de fuir les lieux.

Les villageois parlaient à voix basse, les yeux souvent tournés vers le port, où l'équipage pirate, à présent à terre, s'affairait calmement. À la table la plus proche de Tao, deux hommes débattaient sur l'identité des visiteurs. Elle se surprit à tendre l'oreille.

— Ce pavillon... tu as vu ? Ils sont avec Shanks !

— Le Roux ? On a beaucoup entendu parlé de lui sur cette mer dernièrement.

— C'est bien étrange de voguer en East Blue après avoir été sur Grand Line !

Tao fronça les sourcils. Elle avait entendu parler de Shanks, bien sûr. Qui, dans East Blue, n'avait jamais entendu ce nom ? Mais elle ne savait pas que son équipage s'aventurait jusque sur des îles aussi discrètes que Brumevent.

Au fond de son esprit, une autre pensée persistait. Ce pirate, cet homme à la cigarette, était-il aussi redoutable qu'il en avait l'air ? Tao sentit ses joues chauffer à ce souvenir, et elle secoua la tête, cherchant à chasser cette étrange impression. Pourtant, elle ne pouvait pas nier l'envie de découvrir qui ils étaient vraiment.

Elle termina rapidement sa boisson, l'esprit agité par une vague d'émotions qu'elle ne parvenait pas à nommer. Le brouhaha de la taverne devenait trop présent, oppressant même, alors que son cœur battait plus vite à l'idée de croiser à nouveau ce regard intense. Tao souhaitait être sortie avant leur arrivée, avant qu'elle ne perde pied devant cet équipage qui avait déjà chamboulé son calme intérieur. Elle récupéra précipitamment son sac, fila payer sa consommation, et salua d'un geste distrait les habitués du lieu, sans vraiment prêter attention à leurs réponses.

À peine avait-elle ouvert la porte que l'air frais automnal la cueillit avec force, enveloppant son visage et faisant voleter son écharpe dans son sillage. Mais elle n'eut pas le temps d'en profiter. Elle sortit si précipitamment, si absorbée par l'idée de fuir que, sans prévenir, elle percuta violemment une surface dure.

Le choc la projeta en arrière, lui arrachant un petit cri de surprise. Tao se retrouva assise sur le sol pavé, son front douloureusement contre sa main, tandis que quelques rires étouffés résonnaient autour d'elle. Son visage s'empourpra, à la fois à cause du froid mordant et de la gêne qui la submergeait.

Elle releva lentement la tête, et son souffle se bloqua. Là, devant elle, se tenaient ces mêmes yeux gris, froids et captivants, ceux du pirate qui l'avait tant intriguée plus tôt. Ils étaient encore plus intenses de près, perçants, comme s'ils pouvaient lire en elle d'un seul coup d'œil. Tao sentit une vague de chaleur lui monter aux joues. Elle retint de justesse un gémissement de dépit en réalisant à quel point elle venait de s'humilier. Pourquoi diable avait-elle choisi cet instant pour sortir en trombe sans regarder où elle allait ?

— Est-ce que tu t'es fait mal ? demanda-t-il, sa voix grave et douce à la fois, un pli soucieux se formant sur son front.

Derrière lui, l'équipage qui le suivait sagement s'arrêta, les regards amusés braqués sur eux. Des murmures moqueurs s'élevèrent, certains membres taquinant leur compagnon avec des plaisanteries sur ses talents de séducteur. Même le capitaine roux riait de bon cœur, un large sourire éclairant son visage. Tao, rouge de honte, serra un peu plus son écharpe contre elle, tentant de se dissimuler dans le tissu épais.

Le brun, cependant, resta impassible, bien que Tao perçut un léger sourire se dessiner au coin de ses lèvres. Il finit par tendre la main dans sa direction, l'air nonchalant, mais avec une lueur presque attendrie dans le regard. Tao, encore sous le choc de la chute et de la scène qui se déroulait, fixa sa main une seconde, hésitante.

Lorsqu'elle se décida enfin à la prendre, elle sentit immédiatement la chaleur de sa paume contre la sienne. Sa main était rugueuse, marquée par des années de combats et de vie en mer, mais incroyablement réconfortante. Ce simple contact fit accélérer son cœur. Il l'aida à se relever sans effort, son bras se tendant légèrement, ses muscles se contractant sous la pression.

— Je vais bien, merci, finit-elle par articuler, sa voix légèrement tremblante, bien qu'elle espérait paraître plus affirmée qu'elle ne se sentait.

Leurs regards se croisèrent à nouveau, plus intenses cette fois. Les yeux gris du pirate brillaient d'une lueur indéchiffrable, tandis que Tao, encore déstabilisée, cherchait à comprendre ce qui se passait en elle. Le vent souffla doucement autour d'eux, emportant quelques feuilles mortes, comme si la nature elle-même assistait à cette rencontre inattendue. Tao aurait voulu dire quelque chose de plus, mais les mots lui manquaient, et elle resta là, silencieuse, face à cet homme qui l'intriguait toujours un peu plus.

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Le cliché est là ! Ouuuh je tape dans son torse et tombe au sol, demoiselle en détresse tout ça. J'étais obligée !