Bipolar Heart

Chapitre 46 : Jayden

Jayden

Je n'ai jamais cessé d'aimer Maddy. Pourtant aujourd'hui, je suis plus que jamais amoureux d'elle. La vitesse à laquelle bat mon cœur n'est qu'une infime preuve de mon amour. Le fait que mon cerveau ne cesse de penser à elle, ou simplement les cent cinquante dollars de cadeaux posés sur mon lit, en sont des preuves bien plus grande. Je soupire et me gratte l'arrière de la tête. Je ne sais pas quand je vais lui donner ça, ni si elle les acceptera. Mais il va bien falloir que je le fasse. Ces minuscules baskets de bébé n'ont aucunement leur place à mes pieds. D'ailleurs, Maddy va sans doute me haïr jusqu'à la fin de ses jours pour ce cadeau.

- On y va ?

Je me retourne vers mon meilleur ami, qui croise les bras sur sa poitrine, son sac de sport accroché à son épaule, et m'observe avec une lueur d'impatience dans les yeux. J'opine du chef, attrape mon téléphone, mon sac, et le suis.

- Ouais, c'est parti.

Nous traversons la cour du campus pour rejoindre le terrain de football. Le ciel commence à s'assombrir, l'air devient lourd, et je sens l'humidité de la pluie imminente. Une brise soulève un instant l'odeur de l'herbe fraichement coupée. On entre dans les vestiaires et j'enfile ma tenue en gardant mon casque à la main.

- Armstrong, ce ne serait pas mieux de s'entrainer dans le gymnase ? Il va se mettre à pleuvoir, lance un de mes coéquipiers.

Mais la réponse du coach, qui vient d'arriver, me devance.

- Meyers, tu crois que tu pourras te réfugier pendant les nationaux s'il se met à neiger ? Va retrouver maman si tu as peur de la pluie.

- Non, c'est bon coach.

- Tant qu'on y est, le président de l'université a validé la liste des joueurs.

Je ferme les yeux, le souffle court, une pointe de panique montant dans ma poitrine. Quand je les rouvre, le coach se tourne vers Kyle, qui lève les yeux vers lui. Son visage se décompose, la mâchoire tendue, les sourcils froncés.

Il a déjà compris.

- Mackeller, je suis sincèrement navré, mais le président a refusé que tu y participes. Tes notes ne sont pas assez élevées. Il préfèrerait que tu te concentre sur tes études plutôt que de louper les cours pour du football.

Son regard se voile, comme si les mots du coach l'avaient touché en plein cœur. Il baisse la tête un instant, mais lorsque son visage se relève, il est marqué par une colère glaciale. On ne parle pas d'un putain de match lambda ! C'est tout pour lui. Tout.

Le coach se tourne alors vers le reste de l'équipe.

- Quant à vous autres, vous êtes tous été acceptés. Je compte donc sur vous pour ne pas me décevoir, pauvres andouilles !

Les exclamations de joie fusent autour de nous, des rires, des accolades. Mais je suis figé. Mon cœur se serre quand je tourne la tête vers Kyle, pour croiser son regard furieux. Une gifle ne m'aurait pas fait aussi mal. Je me mords l'intérieur de la joue, cherchant un mot, n'importe quoi à lui dire, et fais un pas vers lui. Il recule aussitôt, comme si ma présence était devenue insupportable.

- Tu le savais ?

La question claque, sans appel. Sa voix est rauque, pleine d'amertume.

- Ouais... Depuis un moment. Je suis désolé je ne savais pas comment te-

- Ferme là, c'est bon ! Ferme bien ta gueule ! Lâche-moi, va te foutre, capitaine !

Il me tourne le dos et la porte des vestiaires claque derrière lui, résonant comme un coup de tonnerre dans mon esprit. Je sursaute, en réalisant avec une douleur sourde que je viens sans doute de perdre mon meilleur ami. La culpabilité me ronge. Je le savais, et pourtant, je l'ai laissé espérer. Je l'ai trahi.