Time Travelers - Tome 1

CHAPITRE 32

Je ne dors plus la nuit. Lorsque j'ai le malheur de fermer les yeux, je revois ces bottes noires. Elles s'approchent lentement de moi, menaçantes, dangereuses. Je me revois dans cette armoire, à attendre l'instant fatidique. Sauf qu'au lieu de voir les bottes s'échapper par la fenêtre, dans mes cauchemars, elles continuent de se diriger vers moi. Puis l'inconnu finit par ouvrir l'armoire. Et je ne vois plus qu'une longue silhouette noire. Pas de visage. Rien. Juste une silhouette noire qui s'apprête à me tuer.

Et je me réveille en sursaut, le dos trempé de sueur et les mains tremblantes. J'allume précipitamment ma lampe de chevet et je jette des coups d'œil terrifiés dans la chambre... Mais rien. Il n'y a pas de bottes noires, pas de silhouette noire. Pas d'inconnu. À la place, je découvre Mike, endormi sur le matelas qu'il a posé près de mon lit. Alors après m'être assurée qu'il était bien là, je tente de me rendormir, le cœur battant.

Le vent qui souffle entre les poutres du toit ne m'aide plus à m'endormir. Au contraire, il me paraît maintenant inquiétant, lugubre.

***

« - Au fait... On n'en a pas reparlé, de ce qui s'est passé. »

Je décide d'aborder le sujet un matin, où Mike me semble moins sombre que d'habitude. Le soleil filtre à travers les rideaux et baigne la cuisine de sa douce lumière. C'est une belle matinée. Espérons que ça suffise à pousser Mike à m'en dire plus.

Depuis cette soirée – que j'essaie à tout prix d'oublier – avec l'intrusion de cet inconnu... Les choses ont changé entre Mike et moi. On commençait à mieux se parler, à véritablement faire connaissance... mais depuis ce soir-là, il est devenu distant, froid. Il n'ose même plus me regarder dans les yeux.

Je ne comprends pas ce brusque changement d'attitude. C'est moi qui devrais lui en vouloir, non ? Après tout, c'est lui qui a laissé entrer un inconnu dans sa maison. Il aurait pu nous protéger. Il sait en plus très bien les risques que j'encours à cause de la prime qui a été posée sur ma tête. Les gens sont capables de tout pour un peu d'argent. Et Mike le sait aussi bien que moi.

Il m'a donné quelques explications sur l'inconnu, mais rien qui me dise qui il était et pourquoi il est venu ici. Un voleur ou un sans-abri qui est venu trouver un refuge dans une maison, en la croyant inhabitée. Ce sont ses mots. Qu'il ne me dise pas la vérité me frustre autant qu'il me prenne pour une imbécile. Je lui ai rétorqué que si cet inconnu était vraiment un sans-abri, il n'aurait pas des bottes aussi coûteuses aux pieds. Mike ne m'a pas répondu et a fixé son regard sur un point derrière moi, signe que la discussion était close.

Mais aujourd'hui, je compte bien lui tirer les vers du nez. Qu'il soit de bonne ou de mauvaise humeur.

« - Il faut vraiment qu'on parle de ce qui s'est passé. » je lui répète d'une voix plus ferme.

Adossé à sa chaise, il relève lentement les yeux vers moi, impassible. Après m'avoir fixée un long moment, il pousse un soupir las.

« - Qu'est-ce que ça changerait ? » soupire-t-il d'un air fatigué.

Un rire froid et sarcastique jaillit de ma bouche.

« - Qu'est-ce que ça changerait ? je répète, incrédule. Mike, quelqu'un s'est introduit chez toi il y a à peine quelques jours et... et tu t'en fous ? »

Je suis plus déboussolée qu'en colère, à vrai dire. Je ne comprends pas comment il peut rester aussi calme et serein après ce qu'il vient de se passer... À sa place, j'aurais déménagé dans un autre espace-temps depuis bien longtemps. Mais non. Il m'assure que la Commission n'a pas abandonné ses recherches et que tôt ou tard, elle finira par me retrouver si on ne se montre pas discrets. Donc on est encore coincés ici. Avec un possible tueur qui rôde près de chez nous. Super.