HEART

Shoot on Sight

Police Department Eleventh Precinct
23:55

Trois jours... Trois jours que je n'ai pas vu Heart depuis qu'il s'est invité dans mon lit. Oui, in-vité, parce que clairement, je ne l'y ai pas autorisé. Et pourtant, au fond, ce n'était pas si mal. Il n'a pas fait ce que j'attendais de lui. Pas de menaces sous-jacentes, pas de pressions psychologiques... juste son souffle, sa présence. Intimidante, oui, mais étrangement apaisante. Ce silence qu'il laisse derrière lui depuis, c'est presque... perturbant.

Mais c'est bien. Ça me permet de réfléchir. Il fallait que je prenne de la distance, que je reprenne le contrôle de cette situation où je me sens comme un pantin. D'ailleurs, il y a quelque chose que je commence à comprendre : Kavish est Heart. Toutes les pièces du puzzle s'assemblent dans ma tête, encore floues, mais suffisamment pour que j'entrevoie un tableau inquiétant. Le problème, c'est que je n'ai pas encore les preuves. Si je veux avancer, je vais devoir fouiller chez lui. Oui, c'est totalement illégal, je sais. Mais honnêtement ? Ce mec est louche, bien trop complémentaire avec Heart. Et puis cette blessure... Kavish s'est fait tabasser récemment, et Heart n'a pas nié, mais il n'a pas confirmé non plus. Ce silence est aussi suspect que ses gestes.

Perdue dans mes pensées, je n'entends même pas les bruits autour de moi jusqu'à ce qu'une main se pose fermement sur mon épaule. Je sursaute violemment.

— Donovan !

C'est la voix du capitaine. Génial. Voilà l'autre abruti qui débarque. Je me lève automatiquement, comme un soldat bien dressé, et tente de masquer mon agacement. Il me fixe, les sourcils froncés.

— J'aimerais faire le point avec vous et aussi...

Je décroche presque aussitôt. Mon attention glisse sur une silhouette que je connais trop bien. Kavish. Mon suspect numéro un. Il traverse le bureau avec cet air nonchalant, comme s'il n'avait rien à cacher, comme s'il jouait un rôle qu'il maîtrise à la perfection. Ce type me manipule, j'en suis certaine.

— Eh ! Vous m'écoutez ?

La voix du capitaine me ramène brutalement à la réalité. Je tressaille, coupable, et détourne les yeux de Kavish.

— Oui, pardon, capitaine.

Il soupire longuement, visiblement agacé par mon manque d'attention. Ses yeux me scrutent avec une insistance inhabituelle. Ces derniers jours, il semble avoir développé une étrange obsession pour moi ou pour cette enquête. Il m'interroge à tout bout de champ, me convoque sans cesse. Peut-être qu'il commence à douter de ma compétence. Ou peut-être qu'il essaie de me surveiller.

— Vous avez besoin d'une pause, Donovan, lâche-t-il enfin.

Je fronce les sourcils, surprise par le ton de sa voix. Puis il ajoute, presque avec douceur :

— Venez avec moi.

Je le fixe, décontenancée. Quoi ? Le capitaine veut m'emmener quelque part ? Je sens un frisson d'appréhension parcourir mon échine. Ce n'est pas dans ses habitudes de se comporter comme ça.

— Bon, alors, vous venez ?

Il insiste, et cette fois, son ton est un peu plus pressant. Je le regarde avec méfiance, pesant mes options. Je pourrais refuser, bien sûr. Mais quelque chose dans sa voix... non, quelque chose dans son regard me pousse à obtempérer. À regret.

Je le suis jusqu'au parking souterrain du poste. La lumière artificielle des néons se reflète sur le métal d'une moto. Pas n'importe laquelle. Une bête futuriste, agressive et brillante, qui semble tout droit sortie d'un film d'action.