Suite conversation téléphonique:
-Oui, bonjour. J'ai vu votre annonce pour le babysitting. Une voix de femme, sèche.
-Vers minuit ?
-Oui. On fait comme on peut. Elle eut un petit rire.
-C'est vrai.
-Bref. J'ai un petit garçon de six ans, et une situation plutôt compliquée.
-Je vous écoute.
-J'ai un grand garçon de dix-huit ans, et ils ne peuvent pas se supporter, de vrais gamins. Mais moi et mon mari partons en voyage pendant plus d'un an,pour le travail, enfin passons. Je sais que si je laisse mon grandavec le petit, il ne s'occupera pas de lui convenablement, alors seserait possible que le matin vous veniez, et le soir ?
J'ai réfléchis pendant un moment, laissant ma respiration cogner contre le micro du téléphone.
-Sinon, j'ai une proposition plus adaptée. Dit-elle finalement.
-Je vous écoute.
-Venez vivre à la maison. Vous serez logé et nourrit.
-Je vais réfléchir à votre proposition. C'est possible de rappeler demain ?
-Bien sur! J'attends votre appel. Bonne soirée.
-Bonne soirée.
Fin conversation téléphonique.
Un an ? Aller vivre chez un inconnu, quelqu'un que j'avais eu une fois au téléphone pendant à peine quelques minutes. Mais il n'y aurait plus mon père,juste ce garçon et son petit frère. Plus à faire le ménage, ni à se faire gueuler dessus, plus de vaisselle et de bouteilles de bières renversées sur le tapis du salon. Plus tout ça.
J'ai bien l'intention de rappeler cette dame dès demain soir.
J'ai rangé mes devoirs et mes affaires, essayant de ranger dans la pénombre de ma chambre avant que Calum arrive: c'était bordélique, comme dans ma tête et s'est comme si en rangeant ma chambre j'arriverais à ranger mes sentiments et je ne voulais pas qu'il voit ça, ce bordel dans ma tête. La sonnette a retentit dans toute la maison, et je suis allé ouvrir à Calum éclairé par la lumière du portail. Il est rentré dans ma maison et nous sommes montés dans un silence de marbre.
Calum venait souvent dormir à la maison quand mon père n'était pas là. On jouait à des jeux vidéos de guerres en gueulant et en mangeant des pizzas aux anchois jusqu'à ne plus pouvoir, jusqu'à que notre bouche soit complètement desséchée. On faisait des choses banales, mais avec Calum rien n'était banale. Des fois, il arrivait très tard -comme aujourd'hui- et on allait simplement se coucher,parce que ça nous faisait du bien d'avoir une présence avec nous, une présence qui remplissait le vide du lit, la froideur du deuxième oreiller. On dormait dans le même lit, mais rien ne s'était passé parce que Calum était Calum, rien de plus. On se prenait juste dans un câlin, un câlin d'amitié, parfois on dormait, parfois un des deux pleurait. C'est quand on va mal qu'on fait des choses comme ça,qu'on monte dans ma chambre sans parler et qu'on s'enlace.
Calum à poser son sac par terre, et on s'est mit en boxer, on s'est allongé dans mon lit, et je l'ai pris contre moi, son corps secoué de sanglots contre le mien. Je l'ai simplement prit contre moi, et j'ai éteins la lumière. Calum avait l'air tellement grand des fois à côté de moi, ce genre de garçon qui ne fait attention à rien, qui vit pour vivre et que rien n'atteint. Ce garçon un peu imprévisible des fois, ce garçon impulsive qu'on arrive pas à contrôler et qui fiche la trouille. Mais des fois, il paraissait tellement faible, tellement petit dans mes maigres bras.Il paraissait aussi petit qu'une petite fille.
Nous n'avons pas parlés, parce qu'on se comprenait, on savait que si notre amitié était là tout irait bien. Parce que le brouillard se lève un jour,que le tunnel à toujours une fin, on s'en sort toujours.Je n'avais pas besoin de savoir pourquoi Calum pleurait, il n'avait pas besoin d'avoir une bonne raison.
**
Bip, bip, bip.
Mon réveil a sonné et nous nous sommes levés sans rien dire. J'ai essuyé ses joues encore humides et il m'a sourit, en guise de remerciement muet. Je suis vite descendu dans le noir des escaliers,les pieds nues sur le carrelage glacial du matin. Et il était là,allongé sur le canapé, sa fameuse bouteille de bière encore renversée sur le tapis, le seul souvenir de maman, une cigarette au coin des lèvres complètement finie. Je me suis approché, l'odeur d'alcool et de tabac montant jusque dans mon cerveau, l'envahissant et me provoquant un mal de tête insoutenable.
« Papa? Papa, réveilles-toi. » Chuchotais-je.
« Quoi? Qu'est-ce que tu veux encore ? » Il n'avait pas ouvert les yeux, juste bougé ses lèvres gercées.
« Tu veux un doliprane? Pour ta tête. »
« Oui,apporte moi ça. Et tu feras le ménage en rentrant ce soir, c'est dégueulasse ici ! » Me cracha-t-il en pleine figure.
Je soupirai et allai chercher un doliprane dans l'armoire de la salle de bain, puis remplir un verre d'eau et l'apporter à mon père.
« Tiens papa.Je dois y aller. Je ferais le ménage en rentrant ne t'inquiète pas. »
Je fermai la porte et l'entendis grogner. Je soupirai encore une fois. A chaque fois que mon père rentre à la maison c'est la même chose, les même paroles blessantes qui sortaient de sa bouche pâteuse et qui dégageait une odeur nauséabonde.
Nous avons marcher vers le bus avec Calum, qui avait assisté comme à chaque fois à la même scène. Il n'osait plus rien dire maintenant, plus me défendre comme il l'avait fait une fois. Il regardait seulement le sol avec un air gêné peint sur le visage. Calum parlait de sa soirée de hier avec Ashton,comme il disait « magique ».
**
Midi tapante. Le prof n'arrivait pas à finir ses explications, ni à donner les devoirs à faire pour la prochaine fois. Nous, élèves, nous nous sommes précipités vers la cantine pour manger et j'ai rejoint Calum en chemin.
« D'ailleurs Cal'. J'ai eu une proposition, tu sais, pour mon babysitting. »
« Ah oui ? Et alors, tu vas devoir faire ça quand ? »
« C'est des gens qui partent en voyage, pendant un an. Ils me proposent d'aller vivre chez eux pendant ce temps. » Je haussai les épaules.« Je pense que je vais y aller. Je n'ai plus envie de vivre dans cette maison. »
« T'as raison, mec. Ta vie ne doit plus être dictée par ton père. »
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Happy ending. [Muke]
Fanfiction"L'amour a des dents dont les morsures ne guérissent pas" - Stephen King