La mala hora

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(La mauvaise heure)

La Mala Hora est le nom donné à un esprit maléfique qui errerait sur les routes de campagne après minuit, terrorisant les voyageurs solitaires. Elle se dissimulerait dans l'obscurité des carrefours, attendant qu'un imprudent se risque sur le chemin et là, elle fondrait sur lui.
La Mala Hora apparaitrait souvent comme une grande silhouette noire, certains la comparent à un linceul noir fantomatique, continuellement en mouvement et changeant sans cesse de forme. Elle tenterait d'hypnotiser et de paralyser tous les voyageurs qu'elle rencontre sans distinction, puis elle se précipiterait sur sa victime, l'envelopperait, l'étoufferait et abandonnerait son corps au bord de la route. Les rares à en avoir réchapper auraient sombré dans la folie en croisant son regard.
Parfois, la créature se transformerait en une femme aux longs cheveux hirsutes et flottant au-dessus du sol dans ses vêtements noirs elle apparaitrait aux carrefours. La Mala Hora prendrait rarement sa forme humaine mais lorsqu'elle le ferait, elle annoncerait toujours la mort.
Une histoire raconte qu'un soir, Jane, dont le mari était en voyage d'affaires à Chicago, avait décidé d'aller passer quelques jours chez l'une de ses amies, Isabela, qui déprimait à l'annonce de son divorce. Il était déjà tard et sachant qu'elle allait mettre au moins quatre heures pour arriver à Santa Fe, où vivait Isabela, elle lui avait dit de ne pas l'attendre avant minuit.
Comme elle roulait sur l'autoroute, Jane ne pouvait s'enlever de l'idée que quelqu'un la regardait. Elle vérifia rapidement dans son rétroviseur, jeta un coup d'œil sur la banquette arrière, mais bien évidemment, il n'y avait personne. » Ne sois pas ridicule, » se dit-elle, regrettant brusquement de ne pas être restée chez elle, bien au chaud dans son lit. Elle venait de quitter l'autoroute quand s'approchant d'un petit carrefour, une forme sombre surgit devant sa voiture. Jane se mit alors à crier et appuyant sur sa pédale de frein elle ferma les yeux aussi fort qu'elle le pouvait.
Quand elle les ouvrit à nouveau, la silhouette obscure avait disparu et pensant qu'elle l'avait imaginée, Jane poussa un soupir de soulagement. Elle s'apprêtait à repartir quand soudain, elle aperçut une vieille dame collée à sa vitre, qui la fixait intensément. Son visage était tordu, ses yeux rougeoyants et son sourire grimaçant laissait entrevoir ses courtes dents pointues. L'abominable apparition commença alors à taper sur la fenêtre et Jane, terrifiée, se mit à crier. Elle appuya sur l'accélérateur et la voiture s'élança sur la route, mais pendant quelques terribles instants la créature s'accrocha à la portière, frappant le verre de sa main griffue.
Puis, comme le véhicule prenait de la vitesse, la sinistre vieillarde abandonna enfin. Regardant dans son rétroviseur, Jane la vit qui grandissait encore et encore, puis une brume rougeâtre se mit à tournoyer autour d'elle, et pointant son doigt vers la voiture, ses lèvres semblèrent former des mots qui se perdirent dans le lointain.
Lorsqu'elle arriva enfin à la maison de son amie, Jane regarda frénétiquement autour d'elle pour voir si la créature ne l'avait pas suivie, puis elle courut vers la porte qu'elle se mit à tambouriner frénétiquement. Une fois à l'intérieur, elle s'effondra sur le canapé, et visiblement bouleversée, elle se mit à pleurer. Isabela écouta son histoire sans l'interrompre, puis elle déclara d'un air grave: » Ça devait être La Mala Hora. C'est mauvais Jane. Très mauvais. La Mala Hora apparait seulement à un carrefour quand quelqu'un est sur le point de mourir... »
Normalement, Jane aurait ri d'une telle superstition, mais la vision cauchemardesque l'avait ébranlée et une sourde angoisse enserrait son cœur. Isabela lui offrit une tasse de chocolat chaud et comme son amie semblait épuisée par sa mésaventure, elle lui proposa d'aller se reposer. Cette nuit-là, Jane dormit très mal et au petit matin, rongée par l'inquiétude, elle décida de rentrer chez elle.
Elle venait tout juste d'arriver quand une voiture de police se gara dans son allée. Jane devina immédiatement ce que les policiers allaient lui annoncer. Ils lui parlèrent avec ménagement, mais rien n'aurait pu atténuer l'horreur de la nouvelle. Son mari avait été agressé alors qu'il retournait à son hôtel la nuit précédente. Il avait reçu une balle dans la tête, et il était mort sur le coup. Peu après minuit.

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