Passé.

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Cold- Aqualung

Adèle.

Nous roulions rapidement dans la nuit sombre, près des vallées de Venise.

Il n'y avait aucune voiture sur les routes. Je tenais Harry fortement, encore un peu craintive à propos de ce moyen de transport.

Le vent frappait délicieusement sur ma peau. Nous étions sur les côtes, maintenant. Je voyais le paysage d'une manière spectaculaire.

C'était une drôle de sensation.

J'étais seule au monde, sur une moto, en Italie. Je roulais tranquillement dans un autre pays, pendant la nuit. Personne ne savait où j'étais. Personne ne me reprochait quoi que ce soit, personne ne me contactait.

Et c'était parfait comme ça.

Seule au monde.

Harry s'arrêta, quelques minutes plus tard, devant un point de vue. Il y avait quelques tables de bois, pour les touristes.

Je débarquai la première, m'avançant près de la clôture de bois. La vue était imprenable. Je sentis la présence d'Harry, à mes côtés.

Je déglutis en posant mon regard, sur la civilisation, en bas. Drôlement, même si être seule me plaisait, je me sentais triste.

Je me sentais peut-être trop seule, à vrai dire, même si c'était moi qui m'imposait cette solitude extrême.

-Elle vous manque, votre famille, Adèle? murmura Harry en me regardant.

Je tournai rapidement la tête vers lui, un peu surprise qu'il ait presque lu dans mes pensées.

J'apportai l'ongle de mon pouce à ma bouche, un peu stressée, avant d'hausser les épaules.

-Si on ne se parle plus, c'est de ma faute. Je me suis exilée, littéralement. Parce que j'avais honte de certains trucs, avouais-je lentement, dans un simple murmure étranglé.

Les bras croisés contre la clôture de bois, Harry hocha la tête.

-Vous savez... Je sais où ils sont. En fait, s'ils n'ont pas bougés depuis la dernière fois que je leur ai adressé la parole. Ça fait cinq ans. Mais si je les revois, je devrai tout expliquer. Et je ne serai pas capable d'affronter le regard qu'ils porteront sur moi.

Parce que j'étais une traînée.

Littéralement.

Durant ma dernière année de lycée, ma mère avait de plus en plus de problème d'argent. Mes parents étaient divorcés et mon père vivait à quelque part. Mais je ne lui en voulais pas, d'être parti. Si j'aurais pu, je serais partie avec lui.

Ma mère était dépressive et par le fait-même, amenait tout le monde vers un comportement morose et fade. Passer une journée avec elle était l'équivalent que de souffrir de dépression: comme si elle vous faisait subir son problème.

Comme elle ne travaillait pas, ne trouvant pas le moyen de sortir du lit chaque matin, la seule source de revenus que nous avions était l'aide gouvernementale. Mon grand frère rapportait un peu d'argent et je m'occupais de la maisonnée, comme une maman aurait fait.

Fatiguée et un peu déconnectée de la société, l'école était un fardeau, pour moi. Mes notes n'étaient pas jolies, les gens se tenaient loin... À la longue, je n'avais plus aucun espoir. J'attendais simplement que le lycée se termine, seule, dans mon coin.

Un soir, en sortant de l'école, quelques semaines avant le bal de promo, Scott Turner était apparu, à l'arrêt de bus.

Il m'avait tout de suite accosté, prétextant que mon manteau de jean était joli.

Exorable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant