R. « Autre Monde »

Chapitre 6

L'histoire de notre pays est...compliquée. Mais après tout,toutes les histoires, de tout les pays le sont. Je n'ai pas besoin d'un rappel pour me souvenir du peu que je sais.

Tout a commencé avec ces attaques terroristes. C'est à ce moment là que notre monde est parti en couilles. Au début les gens ont eu peur, oui. Mais on continuait à vivre normalement, à sortir, à s'amuser, à danser. Comment la situation mondiale a-t-elle dégénéré en si peu de temps ? Je ne sais pas. Les gens ont fini par se renfermer sur eux-mêmes. Les attentats sont devenus de plus en plus violents et personne ne savait comment détruire ce genre de menace. Oh, ça durait depuis un moment, il y en avait déjà eu et on n'en avait pas fait un foin pour autant. Mais là c'était différent. Les politiques se sont emmêlés. On voulait la sécurité ? Pas de problème, ils allaient nous la donner. Le hic ? On devait renoncer à quelques petites choses.

Notre liberté tout d'abord. Ils voulaient nous mettre des puces électroniques, avoir un accès total à notre vie privé, à notre téléphone, à nos comptes bancaires, bref à tout. Ils voulaient tout savoir. Ils disaient qu'en ayant accès à ce genre de choses, on gagnerait contre les terroristes, que plus personne ne pourrait être mauvais.

Vous pensez bien que ça n'a pas été aussi facile que ça. En Asie, le système a vite été accepté. Les gens ont dit « amen » à leur gouvernement et le pays s'est vite habitué à ces méthodes. En Amérique et en Europe, ça été un peu plus compliqué.

Les américains étaient réticents, ils avaient l'habitude d'être libres et de vivre en paix, sans la pression du gouvernement. Les Européens, eux, étaient carrément révoltés. Et que font les Européens quand ils ne sont pas contents ? Ils font grève. Des grèves ont eu lieu partout en Europe, l'économie tournait au ralenti. L'Asie ne communiquait plus avec nous et refusait tout contact tant que nous n'adoptions pas un régime plus autoritaire.

Comment cette histoire a tourné en guerre ? Les grands se sont réunis autour d'une table. L'Amérique a dit qu'il lui fallait plus de temps pour faire admettre à ses citoyens que c'était le mieux pour eux. L'Asie a écouté, leur a dit qu'elle leur laissait un an. Mais qu'au bout de cette année, si le projet était rejeté, chaque habitant Américain voulant se rendre en Asie serait exécuté. Radical, vous trouvez ? Quand l'Europe a annoncé qu'elle refusait d'adopter ce régime, l'Asie a annoncé qu'elle ne pouvait accepter ça, et que si les dirigeants n'étaient pas capables de garder le contrôle, ils le feraient, eux. L'Afrique ? Elle s'est ralliée à l'Asie, sans même réfléchir. L'Europe et l'Amérique se sont retrouvées liées, pour le meilleur, et pour le pire. Depuis ce jour, la guerre fait rage.

Je n'ai pas vraiment d'idée sur ma position géographique, mais je pense être proche de la Pologne. Lors de notre dernière expédition, nous étions en Allemagne.  Pourquoi on se bat ? Pour notre façon de penser, pour notre liberté. Toujours ce même combat depuis la nuit des temps.

Je sais pourquoi Eloïse m'a rappelé ça. L'Afrique s'était toujours bien entendue avec l'Europe, du moins depuis un moment, et tout le monde pensait qu'ils allaient nous rejoindre. Ca été une véritable trahison, pour nous, et surtout pour les dirigeants qui pensaient être amis. Eloïse m'a paru sympathique dés le début. Maintenant, je ne suis plus sûre. Pendant un instant, j'ai oublié les conseils de mon père. « Ne fais confiance à personne ». Je tâcherais de les garder en tête la prochaine fois. Et le tatouage gravé dans ma peau m'aidera à m'en souvenir.

En attendant, je suis fatiguée de me battre avec Eloïse pour rien. Elle n'a pas envie d'être mon amie ? Parfait. Mais ça ne changera rien au fait qu'elle va me faire sortir d'ici. Je ferme les yeux et essaye de respirer, de me détendre. Quand je prends la parole, ma voix est calme et ne tremble pas.

-Quand est prévue l'évasion?

Elle me regarde avec méfiance, se demandant si je suis vraiment calmée ou si je vais exploser à nouveau. Elle me répond pourtant :

-Quand on bougera.

Elle le fait exprès ? C'est quoi cette réponse ? Elle veut vraiment me mettre en rogne ! Mais avant que je me sois énervée, elle enchaine :

-On est censé être déplacés, la prison va accueillir de nouveaux prisonniers. On va être accueillis dans un magnifique camp de concentration trois étoiles.

Je reste figée. Un camp de concentration ? Comme en 40 ? Ce n'est pas possible, ils n'ont quand même pas recréé ces horreurs ? Dans quel but ? Les hommes sont décidément pires que les monstres les plus horribles. On a tous vu comment ces camps étaient, la mort y règne en maître, dans tout les coins. Pourquoi ? Et pourquoi maintenant ?

Non, je n'aime pas cette prison. Mais l'idée de finir dans un camp de concentration... Et les chambres à gaz ? Ils les ont recréées aussi ? J'avoue qu'on ne leur sert à rien, mais nous tuer...

-Un camp de concentration ? Ils vont nous éliminer ?

Elle me regarde un peu avec compassion, un peu avec dédain. Je ne sais pas quel sentiment est le plus présent sur son visage.

-C'est pour ça qu'on essaye de sortir de là, bêta.

Bon, j'en ai marre d'être tenue à l'écart, si elle ne veut pas que je l'étrangle, elle a intérêt à tout me dire.

-Elo tu fais chier ! J'en ai ma claque ! Est-ce que tu vas me dire, une bonne fois pour toutes, la vérité ?

Je vois qu'elle hésite, qu'elle n'a pas envie. Mais il faudra bien que quelqu'un me mette au courant si je dois faire partie de l'équipe.

-Ok, on a des contacts à l'extérieur de la prison. Ils nous ont mis au courant d'un déplacement vers un camp de concentration en Russie.
Je l'interromps pour lui poser une question qui me turlupine.

-On est où en fait ?

-En Ukraine.

Purée, qu'est-ce que c'est loin ! Moi qui n'ai jamais été plus loin que les Ardennes... Elle poursuit, sans remarquer mon trouble.

-L'idée c'est que durant le déplacement, il devrait y avoir une énorme explosion. Ça nous servirait de diversion. Après, c'est à nous de nous débrouiller.

-Nous débrouiller ? Et comment vous comptez réussir ce coup de génie ? Parce que, excuse-moi, mais tu m'as l'air de ne pas vraiment savoir ! Il n'y a pas de plan ? De tactique ?

Elle me regarde m'énerver sans vraiment réagir. Qu'est-ce qu'il lui faut pour paniquer ? Leur plan tient sur des suppositions et s'il échoue, on risque tous de mourir !

-Jude, détends-toi. On a l'habitude de ce genre de truc, on est entrainé pour ça.

Entrainé pour ça ? De quoi est-ce qu'elle parle ? Entrainé pour les évasions ? C'est bien le seule truc qu'il ne m'ait pas appris à la base !  

-Entrainé ? On t'a entrainé à t'évader ?

Elle est tendue, je sens qu'elle va encore me cacher des choses.

-Écoute, cet endroit n'est pas sûr. Je préfère ne pas te parler de ça ici. Mais tu dois me faire confiance, on va réussir. La seule chose que tu as à faire, c'est ne pas nous mettre des bâtons dans les roues, pigé ?

Elle n'a pas dit ça méchamment, mais je sens qu'elle ne veut plus qu'on en parle. Je ne sais pas tout ce que je voudrais savoir et je n'ai aucune certitude qu'on sortira d'ici, mais ai-je une autre option ? Elle est ma seule chance, et même si elle n'est pas sûre, je compte bien la saisir !
Il n'y a plus qu'à attendre.        

Voilà la chapitre 6 est enfin publié ! J'espère qu'il vous plaira. Ne vous inquiétez pas si beaucoup de choses restent sans réponses, la suite de l'histoire répondra à vos questions ;)