13 - Le Thurb

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– Vous pouvez nous laisser, s'il vous plaît ? Juste une minute.

Emma, réveillée dans sa chambre d'hôpital avait demandé cela à voix haute en posant sa main sur celle d'Allan. Monsieur Thorinsson, les deux médecins et l'infirmière se turent. Avec l'accord de son paternel, ils sortirent tous.

L'adolescente attendit que la porte fût bien fermée et que personne ne pouvait regarder dans la pièce pour s'exclamer :

– Mais il s'est passé quoi ??

– Commence, toi.

Elle expliqua qu'elle cherchait des informations sur le griffon et qu'après, c'était le trou noir. Rien avant son réveil ici.

– J'ai appelé du secours, on t'a amené directement ici. Si tu savais le mauvais quart d'heure que j'ai passé avec ton père quand il est arrivé... Nos paternels n'ont pas l'air très ravis qu'on se fréquente, il faut croire.

–Je lui dirais un mot tout à l'heure. Approche-toi.

Le garçon s'exécuta et elle murmura à son oreille :

– Il y a une chose que les médecins n'ont pas vue, comme j'ai encore tous mes habits. Tu peux regarder ? Ne t'en fais pas, c'est dans le bas du dos.

Elle se mit sur le côté, face à la porte et remonta son haut, découvrant ses reins.

– Tu as raison, il y a quelque chose. Tu as quatre runes inscrites en rond. Avec un cercle autour. Th... U... R et B.

– Thurb ?

– C'est ça, sinon, je ne peux pas le prononcer.

– D'accord.Demande à Kagan. Elle doit savoir.

– J'y vais tout de suite. On se voit demain en cours ?

– Oui. Ce n'est qu'une bosse après tout... Et envoie-moi mon père, dis-lui que je veux le voir. Allan ?

– Oui ?

– Fais attention à toi.

– Promis.

Il quitta l'hôpital d'un pas pressé sous le regard hostile de l'inspecteur.


Quand il termina son dessin, une fois rendu à destination, il vit que son maître de rune avait fortement pâli.

– Tu es sûr ?

– À cent pour cent. Je ne pourrais pas inventer ce genre de choses, non ?

– Non, je ne pense pas. C'est un sortilège. On l'imprime sur un des réseaux d'énergie qui parcourent le corps humain. J'en ai vu plutôt sur des nuques ou des poitrines. Mais c'est sûrement par souci de discrétion....

– Mais il fait quoi, ce sortilège ?

– Je vais t'expliquer. L'auteur utilise un bâton d'if, toxique mais hautement magique avec de la sève d'hellébore, elle aussi très toxique. Ce sortilège, c'est le Thurb, du nom de ses quatre runes.On l'appelait aussi l'aspire-vie.

– L'aspire-vie ?

– La victime, doublement empoisonnée, s'épuise. Mais son énergie ne disparaît pas, elle est drainée par quelqu'un d'autre, le lanceur.

– Je sens qu'il y a quelque chose que tu ne me dis pas.

– L'aspire-vie est un sortilège fait pour tuer.

– Tuer ?

– Oui, je suis désolée de te dire ça aussi brusquement mais l'heure n'est plus au tact. On n'a plus le temps pour ça.

– Combien ?

– Je ne sais pas trop. Ça dépend des gens.

– COMBIEN ?

– Cinq jours. Une semaine grand maximum.

– Comment on fait ?

– Fait quoi ?

– Pour inverser le sortilège !

– Je n'ai jamais connu quelqu'un qui s'en soit sort  du temps de la guerre, c'était un instrument de torture psychologique. Malheureusement beaucoup trop utilisé par la confrérie des fils de Loki. Intouchable en somme.

– Et ?

– Pour contrer le sort, il faut retrouver celui qui l'a lancé et le neutraliser.

– Le neutraliser ? Tu veux dire... le tuer ?

– C'est le moyen le plus sûr, en effet.

Tuer quelqu'un ? Il en était incapable !

Enfin, avant de songer à ôter la vie à quelqu'un, il fallait déjà retrouver l'agresseur de son amie.

Au lever du soleil, il n'avait pas cédé un instant aux assauts de Morphée. Avec une seule certitude : il se battrait pour ne pas la perdre, elle aussi.

Il arriva tôt et guetta la venue de son amie. Elle paraissait fatiguée,soucieuse, mais déterminée. Le courage qu'elle affichait fondit quand elle le vit.

– C'est aussi grave que ça ?

Il la prit dans ses bras

– Comment tu vas ?

– Ça va. N'esquive pas la question. S'il te plaît. C'est MON droit, en tant que malade.

Il l'entraîna plus loin à l'abri des oreilles indiscrètes.

Quand il eut finit, elle aussi posa la question du temps.

– Combien ?

Il déglutit difficilement, la gorge serrée.

–Une semaine, maximum.

Il n'avait pas sourcillé et la regardait sans sourciller. Quand les yeux de son amie s'embuèrent, il la serra contre lui. Il la laissa pleurer un long moment et quand elle put parler, il reçut cinq coups de poignards au cœur, un par mot haché par les sanglots.

–Je ne veux pas mourir.

Il la regarda à nouveau dans les yeux et avec toute la conviction dont il fut capable, il répondit :

–Je ne te laisserai jamais mourir !

Les Fils de LokiWhere stories live. Discover now