Le Jeu

Chapitre 26 : Chez le psychologue

J'ai encore du mal à y croire.

Cela fait trois semaines.

Trois semaines se sont écoulées depuis le carnage réalisé par JST et Hayden.

Trois semaines ça peut être long comme ça peut être court.

Dans mon cas, ça m'a paru interminable. Entre les allés et venus de mes parents dans ma chambre et les nombreuses sonneries de téléphone venant de toutes sortes de magasines pour récolter mon témoignage, j'ai l'impression que ma tête va exploser. 

Comment se remettre d'une tragédie ? On s'en remet pas. Jamais. Le cerveau est fait de tel sorte qu'il n'oublie pas les événements marquants. Dommage. J'aurai aimé qu'il efface tout. J'aurai aimé avoir une perte de mémoire. Nous étions vingt-sept à entrer dans cette stupide salle, dix à en être sortis, sept à être arrivés chez Mr Verum pour au final ne rester que quatre d'entre nous. Les quatre loups garou du jeu. Ironique non ? Les loups garou ont gagné la partie. Youpie ! 

Je ne suis toujours pas retournée en cours et je ne sais pas si les autres ont sauté le pas, franchement j'en doute. Au vu de la tête de Karim, Lund et Romane, j'ai bien compris que ça leur prendra du temps aussi pour se remettre de cette histoire si, évidemment, nous avons la chance un jour de pouvoir nous en remettre. Ça semble tellement impossible. Au moindre son, au moindre mouvement je sursaute et mon coeur se met à danser la rumba. J'ai toujours cette boule dans la gorge qui n'a pas disparu depuis ce fameux soir.

Comment se remettre d'une tragédie ? On s'en remet tout simplement pas. Ça nous hante nuit et jour. Et si on avait trouvé la solution dès la première pause ? Il n'y aurait eu qu'une victime. Si dès la première pause on aurait raisonné convenablement. Pourquoi a-t-on été aussi stupide ? Pourquoi sommes-nous des imbéciles ? Dès la première pause on aurait du chercher au lieu de paniquer.

Mes parents ont insisté pour que je consulte un psychologue ou que je participe aux séances en groupe que suivent déjà les trois autres mais j'ai refusé. Je ne suis pas prête à parler de ce qui s'est passé mais d'ailleurs en ai-je vraiment le droit ? J'ai mentis à la police, j'ai mentis au famille des victimes, j'ai mentis à tout le monde. Pourquoi irai-je dire la vérité à un psychologue ? Je n'en vois pas l'intérêt. Même si je comprends la démarche de ce mensonge, je ne l'accepte toujours pas.

C'est dingue, quand même que les témoignages n'ont pas le même impact en fonction de la personne. Ça me révolte lorsque j'entends "c'est ta parole contre la mienne" ! Qu'est-ce que cela veut dire ? Pourquoi un politicien aurait un témoignage plus valable qu'un citoyen ? En plus, la vie nous a bien prouvé que les politiciens sont les rois du mensonge ! C'est pareil pour la police ! On préfère toujours croire la police plutôt que quelqu'un d'autre sans savoir qu'avant d'être policier, ils sont humains et l'erreur est humaine. Même si j'admets ne pas avoir essayé de leur expliqué je me suis résignée à me dire "à quoi bon ?"

C'est rassurant de voir que les policiers sont à l'écoute des victimes et qu'ils font absolument tout pour découvrir la vérité ! Je regrette presque le fait que des séries policières existent car elles ne nous véhiculent pas totalement la vérité sur la police. Certes, notre histoire peut sembler fou mais de là à ce qu'on ait peur de dévoiler la vérité c'est bien qu'il y a une erreur dans le système. Je ne dis pas qu'il faut croire tout le monde mais nous sommes quatre a avoir vécu l'improbable ne devrions-nous pas essayer de les convaincre ?

Notre histoire, ce soir-là, n'a reflété que la triste réalité du monde. Classer un dossier pour en être débarrassé sans savoir que derrière un dossier se cache des vies humaines gâchées et qui auraient aimé qu'on se batte pour elles. J'aurais aimé qu'un policier nous dise que l'histoire qu'on a raconté semble un peu tiré par les cheveux et qu'il veuille aller au bout des choses. Qu'il veuille tirer les choses au clair parce que rien n'est clair dans cette histoire. Malgré l'explication de Hayden, je trouve que rien n'est plausible.