"Que me vaut cette honneur Fauche ? Tu as décidé de t'excuser pour la dernière fois ?"
Cette dernière grommelle quelque chose comme "va te faire foutre Stafan" mais je ne m'en formalise pas. Elle a toujours été impolie, cela fait une éternité que je m'y suis habitué.
"Alors ? Déonys t'as peut-être fait une offre ? Ou alors... Oh je sais ! Ton petit coeur a eu pitié de cette pauvre fille."
Elle grimace puis se tourne vers moi. Ses yeux bleus, presque noirs, lancent des éclairs. J'aime provoquer les gens, on en apprend bien plus que ce qu'ils veulent bien nous dire ainsi. Un sourire malin se dessine sur mes lèvres. Jusqu'à ce que je sente son souffle mortel devant moi et sa main autour de mon cou. Elle a la capacité de se déplacer extrêmement vite. Et parfois je l'avoue, cela me surprend.
Je l'éjecte au loin à l'aide d'une boule de feu et masse mon cou endolori. Pendant qu'elle se relève péniblement, je gronde :
"Ne refait jamais cela. Ce n'est pas parce que tu es immortelle que je ne peux pas te faire souffrir telle une mortelle, Fauche."
Elle a un petit sourire malicieux avant de disparaître sans demander son reste. Je peste de nouveau : je ne sais toujours pas pourquoi cette garce a refusé de m'aider !
Soudain on toque à la porte de mon bureau. Un de mes sbires passent sa tête par la porte puis murmure :
"Madame est là votre Majesté..."
Je me redresse, subitement réveillé à nouveau. Je ne veux pas la voir. Cela fait trop longtemps. Je ne peux pas la voir. Cela fait si peu de temps.
J'époussette mon costard puis respire un grand coup, paniqué.
"Je..."
Mon sbire parait étonné de ma réaction. Il va sûrement aller le raconter aux autres et ils riront de moi. Non, cela je ne peux l'admettre ! Je me reprends, la voix de nouveau pleine d'assurance.
"Faites la patienter dans la salle du trône. Je veux me faire désirer."
Il hoche la tête puis s'éclipse discrètement. Lorsqu'il referme enfin la porte, je retombe lourdement sur mon siège et me prend la tête entre les mains. Que me veut-elle ? Cela fait une éternité que nous ne nous sommes pas vus et voilà qu'elle débarque à l'improviste. J'ai besoin de me calmer, de contrôler ce pouvoir qu'elle a sur moi.
Je la hais d'avoir cet effet sur moi. Je la hais de me faire subir cette permanente torture. Je la hais d'être toujours aussi parfaite. Je la hais de m'avoir trahi, trompé, manipulé, menti. Je la hais de m'aimer. Je me hais de l'aimer.
Oui, je l'aime et la déteste comme un fou. J'ai envie d'embrasser chaque parcelle de son corps et de les lui arracher. J'ai envie qu'elle hurle mon nom, qu'elle s'en brise les cordes vocales. J'ai envie de la découvrir et de la détruire.
Lorsque je me décide enfin à me lever de mon siège, je suis fin prêt. J'ai revêtu mon masque d'impassibilté. Elle ne peut pas m'atteindre. Découvrir mes sombres pensées, tous mes plans de complot et mes magouilles. J'ouvre la porte de mon bureau d'un geste brusque, ce qui fait sursauter la succube qui attendait juste devant. Elle n'ose croiser mon regard.
"Parle."
Elle tord ses mains et fixe ses pieds, avant de lancer d'une voix fluette :
"Madame n'a pas voulu rester à attendre votre majesté. Elle estimait avoir trop patienté et... Elle a décidé de faire le tour du château. On a pas vraiment pu l'en empêcher..."
Je fulmine. Bien sur qu'ils n'ont pas pu l'en empêcher ! C'est l'être le plus puissant qui existe en ce monde. Même moi je ne suis pas sur d'être aussi puissant qu'elle lorsqu'elle a son collier. Je marche à travers les longs couloirs. J'ai activé ce qu'elle appelle le "lien". Cela me permet de savoir où elle est mais ainsi elle risque de savoir une partie de mes pensées. J'essaye donc d'être le plus sobre possible, en pensant juste au fait de la retrouver au plus vite.
Lorsque j'arrive dans la salle où elle se trouve, je défonce presque la porte pour entrer. J'essaye de me concentrer sur ma colère pour ne pas succomber à ses traits délicats.
Et lorsque je vois avec qui elle se tient, je me glace d'effroi. Oui, moi, Satan, à peur. Pour l'une des premières fois de ma vie.
"Déonys, quelle agréable surprise. Je vois que tu as fait la connaissance de Victoire."
Ma femme hausse un sourcil puis sourit à la fille de ma maîtresse. J'ai horreur des situations non prévues. Et celle-ci ne me réjouis pas vraiment. Ma femme me répond par un large sourire.
"Ma fois, elle est vraiment charmante. Je m'étonne qu'elle soit ici mon cher. J'étais venue te voir pour éclaircir certaines choses, mais désormais je suis fixée."
Pendant qu'elle parle tout en me fixant de ses yeux rouges, je me liquéfie. Ça y est, nous y voilà. Elle a tout découvert. Je me sens comme un enfant pris sur le fait.
"Les apparences sont trompeuses, tu le sais bien. De quoi voulais-tu me parler ?"
Autant essayer le bluff. Je suis fort pour ça. Prétendre quelque chose, l'affirmer, le démontrer et au final avouer que oui, on a roulé l'autre dans la farine. Ne jamais reconnaitre ses torts tant que l'adversaire ne nous les reproche pas clairement.
"Oh, rien de bien important. Juste un conflit qui se prépare à ce que j'ai entendu dire. Comme quoi l'un des chefs est devenu fou et ne veut pas reconnaître ses torts et accepter des excuses. Une histoire bête. Il essaye de se venger, enfin je crois. Peut-être qu'il veut s'en persuader, je ne sais pas."
Victoire nous observe d'un air perplexe pendant que nous continuons de nous regarder sombrement. Ma femme a même une lueur de tristesse dans ses beaux yeux sanguinolents. Tout à coup elle claque des doigts et Victoire disparaît. J'espère quelle ne l'a pas envoyé au paradis, je commençais a l'apprécier cette garce... Déonys tend sa main gracile vers moi et continue.
"Cette fille ressemble beaucoup trop à sa mère pour que je puisse passer outre... Pourquoi diable me fais-tu souffrir autant mon ange ?"
Bon et bien mon bluff a échoué... Et pourtant, ce n'est pas qu'elle m'ait découvert qui me met le plus en colère...
"Ne m'appelle plus mon ange. Je ne suis plus ton apprenti. Je ne suis plus ce que tu espérais que je sois."
Elle soupire puis prend place dans un de mes grands canapés. Elle me fait signe de la rejoindre mais je reste neutre et debout, la menaçant de mon 1 mètre 90.
"C'est là tout ce que tu trouves à rétorquer ? Je t'ai connu en meilleure forme. Je veux juste savoir pourquoi tu me fais cela. Je me suis excusée à maintes reprises, tu le sais. Mais je ne peux revenir sur ma décision..."
Je la coupe, agressif :
"Ton pendentif le peut."
Ses grands yeux s'ouvrent d'étonnement et ses yeux se teintent à nouveau de tristesse. On dirait même qu'elle va pleurer, là, devant moi. À cause de moi. Quel homme peut faire pleurer la femme qu'il aime par dessus tout ?
"Alors c'est ça que tu veux. Mon pendentif. Voilà pourquoi tu es allé sur Terre et que tes espions enquêtent sur le détenteur du collier. Juste pour la retrouver elle. Pour l'avoir à nouveau."
Elle renifle puis se lève dignement. Malgré le fait qu'elle fasse à peine 1 mètre 70, je me sens ridicule face à elle. Je pourrais la broyer en un instant, en finir avec ce conflit avant même qu'il ne débute. Mais je ne me fais pas d'illusion : je ne peux pas la tuer, cela me déchirerait de l'intérieur. Mais je peux la détruire et cela, je ne vais pas m'en priver.
"Au passage, tes fils sont magnifiques. Tout comme leur père. Et je suis navrée de ne pas les connaitre."
Et sans plus de cérémonie, elle tourne les talons et me laisse planter là, des questions et des regrets tournoyant dans ma tête.
VOUS LISEZ
Un voeu, un sourire.
ParanormalUne bande d'amis qui s'amusent. Des adolescents un peu éméchés, mais quelle importance ? Les secondes qui défilent. Le temps qui se suspend. Et une, deux, trois victimes. Et un collier qui réalise tous les voeux les plus fous. En échange ? Juste un...