Je ne m'imaginais pas Dieu comme ça. Si gentille, si compréhensive... Et malgré son apparence un peu effrayante, ses yeux rouges, ses cheveux blancs et son air d'éternelle jeunesse ne l'aidant pas vraiment, je l'aimais bien. Mais je ne parvenais pas à me défaire de l'impression qu'elle nous cachait quelque chose, à Marie et moi. J'avais le don pour sentir les secrets. D'ailleurs, je savais que Lucas me mentait. J'avais simplement voulu ne rien voir. Mais bon, je dois tirer un trait sur lui. Et puis, cette entrevue avec Déonys m'avait au moins permis de faire des photos superbes !
J'adore la photographie. Depuis toute petite, je fais des photos, plus ou moins bien réussies. Mes parents ne comprennent pas trop cette passion, mais ma sœur est là pour m'encourager. Depuis des années, je voudrais avoir un vrai appareil de professionnel pour pouvoir faire de meilleures photos. « Cela coûte cher et nous n'avons pas les moyens pour cette passion » a été la seule réponse de mes parents à mes attentes. J'économise donc depuis quelques années pour pouvoir réaliser mon rêve. J'aimerais aussi faire partie du journal du lycée, mais pour cela il faudrait déjà que j'ai un appareil photo ! Et il y a beaucoup d'autre chose que j'aimerais... Peut-être que le collier pourrait m'aider ? Dieu a paru étonnée que le collier réagisse aussi pour moi, mais elle nous a dit que c'était sûrement parce que j'étais la jumelle de Marie et donc son âme jumelle.
Je peux vous dire quelque chose ? L'amour ça détruit tout. Même la raison et le temps. Ça te détruit de l'intérieur, ça te brise comme une vitre. L'amour c'est bête et immoral. Tu ne peux rien faire pour résister, tu ne choisis pas. Lorsque tu as un peu de chance, l'autre t'aime aussi. Si tu n'as pas cette chance, ça t'évite au moins de souffrir un minimum. La plupart du temps les gens tombent amoureux de connards. Sûrement un charme inconnu vient-il nous embrouiller le cerveau et nous empoisonner le cœur. Mais bon, c'est la vie n'est-ce pas ? Et la vie n'est pas réputée pour être douce et paisible. Elle a des hauts et des bas. Même si j'aimerais que la mienne soit surtout remplie de haut et pas de garçons dans le genre de Lucas.
Après que Dieu soit repartie et que le temps se soit remis en marche, nous rentrons dans l'église ma sœur et moi. La suite est une succession de chants sinistres et d'ode à Dieu et son fils... S'ils savaient ! D'ailleurs je ne sais même pas si le fils de Déonys s'appelle réellement Jésus. Il faudrait que je lui demande. Peut-être qu'en vérité c'est une fille ? Je me retins de rire à cette pensée, voyons Cloé tu es dans une église !
Je remarquais Mr le Tombeur assis dans un coin, avec sa famille, le visage en deuil. Je me souvins que c'était le frère de Victoire et je ne pus m'empêcher d'avoir pitié pour lui. Il semblait nous fixer ma sœur et moi, les sourcils froncés. Je devins rouge comme une pivoine et détournais la tête. Ce n'était pas le moment pour ça voyons Cloé !
Je remarquais aussi, les yeux rouges de larmes ne voulant pas s'échapper, Damon, l'ex petit ami de Victoire. Je fronçais les sourcils en voyant un jeune homme ressemblant à Damon le serrer dans ses bras en lui murmurant surement des paroles réconfortantes. Je ne l'avais même pas remarqué, alors qu'il était pourtant assis à moins d'un mètre de moi ! Je ne pus m'empêcher de jeter un coup d'œil à Marie et souriais. Elle ne semblait même pas l'avoir vu, comme moi ! Ce devait surement être le frère de Damon ou son cousin. Mais en plus beau, plus grand, plus athlétique et plus mystérieux ! Plutôt séduisant à vrai dire... Je me mordais la lèvre inférieure et me retenais d'éclater de rire,encore une fois. Je venais d'avoir une idée... de génie !
Vint enfin le moment où le cercueil fut enfoui sous terre. Non pas que je déteste Victoire, mais un tel attroupement de lèche botte dans un même espace, cela m'exaspère. Parce que franchement, comment appeler autrement des personnes qui font semblant d'être désolé de la mort de quelqu'un ? Je me mis dans un coin en attendant que Messieurs les lèche cul fassent leurs petits numéros de « je mets une rose car je l'aimais beaucoup ! » Tu parles ! Qui la connaissait vraiment parmi ceux-là ? Ma sœur s'avança et attrapa une rose blanche entre ces doigts. Je ne pus m'empêcher d'avoir envie de la prendre en photo. Je dégainais mon portable et la prenais, en train de lâcher la fleur, telle une magicienne dévoilant une colombe. Elle rejoignit nos parents et papa la serra contre lui. Je fis signe à ma mère que j'allais faire un tour et m'éloignais.
J'entendis quelqu'un s'approcher doucement de moi tandis que je prenais quelques photos et me tapoter l'épaule. Encore un journaliste pénible ! Si c'était encore sur Marie, j'allais surement devenir furax. Les journalistes tentaient depuis dimanche de m'interroger. En ce moment, l'histoire de Marie faisait la une de quasiment tous les journaux. Elle était aussi passée sur plusieurs journaux télévisés. Je me retournai donc pour lui dire avec tendresse tout ce que je pensais sur ses foutus reportages sur ma sœur, parce qu'ils osent appeler ça des reportages !
-Si c'est encore pour une interview vous pouvez vous la mettre dans...
Je m'arrêtais en plein mouvement, bouche-bée. Ce n'était pas un journaliste qui me faisait face mais Mr le Tombeur. Il haussa les sourcils et sourit d'un air malicieux. Moi qui pensais que cette journée avait bien commencée ! Il allait bien rigoler avec ses copains sur moi après ça, c'est sûr ! Je tentais de cacher ma honte en grommelant un :
-Désolé. Je pensais que c'était un journaliste. Tu veux quoi ?
Il étouffa un rire. Sérieusement, à quoi bon m'exiler pour qu'on vienne encore me chercher des noises ? C'était déjà assez désagréable de me taper tous ces lèches cul et voilà que le grand frère triste vient rire de moi ! Bon, il venait de perdre sa sœur, mais quand bien même, je n'étais pas sa psychologue moi ! Ni son souffre-douleur d'ailleurs. Je m'apprêtais à tourner les talons lorsqu'il se racla la gorge et parut gêné. Il regarda tour à tour ses pieds puis moi. Je soupirais bruyamment et m'impatientais.
-Moi c'est Adam. Tu pourrais m'expliquer comment vous avez arrêté le temps ta sœur et toi ?
Je restais interdite, paralysée. Je le fixais soudainement apeurée. Ce devait être une blague... Oui surement une mauvaise blague. Comment aurait-il put savoir ? Il fallait que je me calme. Il était en train de me faire marcher, je ne voyais pas d'autre explication. Je répliquais donc avec aplomb :
-Et bien moi c'est Cloé. Tu sais la fille insignifiante que tu as bousculée et qui est toujours seule ? Et pour le temps arrêté, bien sûr ! Après tous des tarés comme toi j'en ai croisé beaucoup, autant continuer à les fréquenter !
J'eus l'impression que ses yeux vairons s'assombrissaient... Et qu'ils revenaient tout de suite à la normale. Bizarre. Mes lentilles fonctionnaient bien d'habitude... Adam, puisque apparemment c'est le prénom de Mr le Tombeur, rit à ma remarque désobligeante. Encore un cinglé je vous dis ! Mais bon, un fou plutôt canon. Et puis, c'était la première fois qu'un garçon dans son genre venait me parler... D'habitude je n'étais pas vraiment le genre de fille que les plus populaires abordent.
-Oui je me souviens de toi. Et de ton amie aussi. Mais mieux vaut être peu que mal accompagné tu sais ! Et je ne plaisante pas. Le temps est sacré. Tu dois être forte pour pouvoir faire ça. Très peu de gens y arrive, tu pourrais m'apprendre ?
Il prit un air sérieux et chuchota presque. J'eus une brusque envie de m'enfuir loin de ce type qui me parlait d'arrêter le temps et que j'étais forte. Puis je me rappelais qu'effectivement Déonys avait arrêté le temps. La question était donc : comment pouvait-il être au courant ? Et puis, pourquoi croyait-il que c'était moi qui avais fait cela ? Je lui répondis donc sur le ton de la plaisanterie que la seule chose que je pourrais lui apprendre serait les mathématiques et comment être poli. S'il croyait que j'allais lâcher le morceau comme ça, il se trompait lourdement ! Je ne suis pas né de la dernière pluie quand même ! Il fronça les sourcils à ma réponse. Je sentis que je l'énervais. Ou le fascinais, difficile à savoir. Finalement, il me refit son désagréable sourire en coin et me répondis mielleusement.
- Ne fait pas l'imbécile avec moi s'il te plaît. Tu es comme moi, sinon tu serais comme toutes les autres filles. A mes pieds. Et si tu ne veux pas me croire, je peux te le prouver. Moi aussi je peux faire plein de choses.
Heureusement pour moi, qui commençais à avoir peur de ce type, sa mère vint le chercher. Elle me jeta un coup d'œil désolé et traina son fils par la manche en le houspillant. Le pauvre, sa mère à l'air d'une vraie démone lorsqu'elle est en colère ! Il se retourna une dernière fois et me lança un regard qui sous-entendait : tu ne m'échapperas pas. Un frisson m'agita. Même si j'aurais aimé en savoir plus, il valait mieux pour moi que je garde mes distances... Surtout après ses paroles : « Tu es comme moi, sinon tu serais comme toutes les autres filles... » Qu'est-ce que ça voulait dire ?
Je crois que je ne rêverais pas aujourd'hui...J'avais quelqu'un à contacter.

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Un voeu, un sourire.
ParanormalUne bande d'amis qui s'amusent. Des adolescents un peu éméchés, mais quelle importance ? Les secondes qui défilent. Le temps qui se suspend. Et une, deux, trois victimes. Et un collier qui réalise tous les voeux les plus fous. En échange ? Juste un...