La haine. Sentiment qui pousse à détester quelqu'un. Voilà la définition du dictionnaire mais pas la mienne. Je trouve que la haine c'est toujours compliqué. Rien n'est simple dans la vie. Rien n'est tout noir ou tout blanc. Il y a toujours un juste milieu, une balance invisible qui tente vainement d'équilibrer les choses dans ce monde un peu bancal. Pour moi la haine c'est quelque chose qui pousse à faire du mal à quelqu'un qui nous en a fait. Je pense qu'on peut détester des objets aussi. Notamment ce fichu coin de table que je me prends sans arrêt. Tant que l'on n'a pas de pulsions meurtrières tout va à peu près bien, on ne commet aucun meurtre. Heureusement sinon je pense que l'on serait probablement tous derrière les barreaux, à se lamenter sur notre sort et à maudire la personne qu'on a tué.
La haine se confond bien souvent avec l'amour. Malheureusement. Je ne sais pas lequel des deux est le plus fort. Probablement l'amour car parfois on peut oublier que l'on déteste quelqu'un. Mais jamais on ne peut oublier qu'on aime une personne. Dans tous les cas ces deux sentiments peuvent nous détruire. Ou plus rarement, nous apporter le salut. Moi j'éprouvais les deux envers Victoire. Un mélange de ressentiment et d'amitié. Parfois elle m'énervait à tel point que je me demandais comment cette garce pouvait-être mon amie. Mais à d'autre moment elle était si compréhensive et elle me faisait tellement rire que j'en oubliais à qu'elle point elle pouvait être pénible.
C'est assez énervant comme sentiment. Je dois me battre avec moi-même pour savoir quelle attitude adopter, comment lui parler... Et dire qu'en ce moment même je suis en train d'assister à son enterrement... Lorsque je la ramènerais à la vie, elle n'en croira pas ces yeux ! Je regardais ma montre. 15h58. Puis je jetais un coup d'œil sur ma droite. Ma sœur était en bout de rang et elle me fixait, le regard impatient et brulant de questions. De l'autre côté se trouvait Damon et son mystérieux frère dont je ne connaissais pas le prénom. Cloé se leva précipitamment et marcha en direction de la grande porte, et je la suivis en prétextant une impression d'étouffement.
Je rejoignais ma sœur à l'extérieur et respirais un bon coup. L'air était frais, un petit vent poussait les nuages à cacher le soleil. Ma sœur et moi nous assîmes sur les marches et patientèrent. Je resserrais mon manteau contre moi et observais aux alentours. Je ne vis personne. Je regardais ma montre : l'aiguille des secondes se dirigeait lentement vers le 12, bientôt il serait 16h. Je la regardais poursuivre lentement sa course, telle une goutte d'eau que rien ne peut arrêter. Ma sœur soupirais et regardais, rêveuse, les nuages. Elle fit quelques photos avec son portable. Soudain l'aiguille des secondes de ma montre se figea et resta bloquée sur le 12. Je tapotais celle-ci et fronçais les sourcils. Zut, il n'y avait sûrement plus de piles !
Une voix nous interpella et nous fit sursauter, ma sœur et moi, et je me redressais vivement en cherchant autour de moi. Je reconnaissais ce timbre doux, ces paroles chantantes. Dieu. Elle était accoudée à la porte de l'église et nous regardait avec un petit sourire triste. Je ne sais pourquoi, ses yeux rouges semblaient prêts à pleurer. Ma sœur semblait ne pas y croire, elle se frotta plusieurs fois les yeux et se pinça. Elle gardait la bouche entrouverte. Je souriais intérieurement en pensant que je devais être dans le même état lorsque je l'avais rencontré. Sauf que là, je l'avais déjà décrite à ma sœur. Elle lança un bonjour qui s'étrangla dans sa gorge.
Dieu vint nous rejoindre sur les marches et s'assit. Puis elle soupira bruyamment et ne parla pas. Elle se contenta d'observer le ciel. Ma sœur et moi l'observions d'un air curieux. En effet, si elle nous avait donné rendez-vous, elle devait nous expliquer certaines choses ! Je me raclais la gorge, prête à la questionner mais elle me devança.
- Je m'appelle Déonys. Et je sais ce que vous allez me demander. Je peux voir le futur... c'est très pratique. Alors sachez que j'ai arrêté le temps et que je me suis déplacée pour vous demoiselles. Alors tachez de prendre soin de ce pendentif. Il m'est...cher.
Alors que nous la fixions bouche-bée en hochant la tête, elle continua sur sa lancée. Elle nous parla du pendentif bien entendu, pourquoi devenait-il noir après que l'on ait prononcé un vœu ? Elle nous répondit que nous pouvions faire un vœu par jour, et qu'ensuite le collier se rechargeait en devenant sombre. Elle nous expliqua aussi qu'elle pouvait s'immiscer dans les rêves et que si nous avions besoin de la contacter, elle le sentirait et viendrait via ceux-ci. Elle nous annonça aussi que nous ne pouvions pas influer sur la vie et la mort. Ce qui voulait dire... pas de Victoire qui ressusciterait. Pas de Victoire qui discuterait à nouveau avec moi. Pas de Victoire avec qui rire et pleurer. Des larmes m'échappèrent, mais je me ressaisis et Déonys continua son monologue.
Ma sœur lui demanda aussi pourquoi parfois mes yeux devenaient rouges et Déonys répondit que c'était l'effet négatif du collier, lorsque de trop grande émotions prenaient possession de moi. Mais lorsque nous lui demandions pourquoi Cloé pouvait-elle aussi faire un vœu par jour, elle sembla interdite. Elle resta songeuse puis finit par nous regarder tour à tour dans les yeux, ma sœur et moi, et à nous parler longuement des âmes sœurs, des âmes jumelles et des âmes croisées :
- Je suis intimement convaincue que l'on a tous une ou plusieurs âmes sœurs. Et une âme jumelle. Leur différence ? Vous aimez de tout votre cœur votre âme sœur, et vous ne pouvez empêcher votre cœur de se décomposer en même temps que le sien. Et les âmes jumelles... c'est bien plus compliqué. C'est la personne avec laquelle vous aurez probablement le plus de complicités. Bien souvent les gens font l'erreur de ne voir que leur âme jumelle et non leur âme sœur... Mais il existe aussi des cas plus rares, les âmes croisées. Un mélange des deux autres âmes, la complicité absolue. Vous l'aimez, certes, mais vous ne pouvez-vous empêchez de la détruire. C'est vital, comme l'oxygène que l'on respire. Et bien souvent, cela vous conduira à votre perte.
Elle soupira et ne dit mot pendant quelques instants. Elle resta pensive, songeant probablement à quelque chose ou quelqu'un. Je tentais d'assimiler ce qu'elle venait de nous dire. En réalité je l'avais toujours su. Je ne savais juste pas comment nommer ces relations que j'avais avec certaines personnes... Je pense que Cloé et Lana sont mes âmes jumelles. Je ne peux imaginer ma vie sans l'une d'entre elles. Je donnerais ma vie pour elles, pour être sure que jamais il ne leur arrivera rien. Pour mon âme croisée, j'opterais sur Victoire. Je l'ai toujours intimement détesté et pourtant... Je l'aime. Je l'aime comme une sœur, comme si c'était une part de moi. C'est une de mes amies, et elle va horriblement me manquer.
Par contre pour l'âme sœur j'avoue que je ne sais pas trop... Aucun garçon n'a jamais réellement attiré mon attention. Je n'ai jamais éprouvé de coup de foudre comme dans les films. Le seul garçon dont j'ai été vraiment amoureuse un jour m'a mis un râteau... Il aimait une autre fille apparemment. Mais je ne lui en avais pas voulu. Je sais que l'amour ça tombe sur n'importe qui, n'importe où et n'importe quand. Je souhaiterais qu'un jour moi aussi on me regarde de la manière dont il la regardait. Comme si il était prêt à tout pour elle, comme si il était... amoureux. J'aimerais qu'un jour on me regarde avec la même lueur de désir et d'intérêt au fond des yeux. Qu'on me dise des mots doux, des compliments par dizaines. J'aimerais que quelqu'un m'aime comme moi je l'aimais et comme il en aimait une autre. L'amour c'est trop compliqué. Même les adultes le disent. Et les adultes ne mentent pas n'est-ce pas ?
Et puis il y a toujours quelqu'un pour venir remuer le couteau dans la plaie. Pour venir se moquer. Estimez-vous heureux que je n'aie pas d'arme pour vous trancher la gorge sombres imbéciles. Je vous assure que je préférerais l'oublier. Je préfèrerais ne jamais avoir vécu ce moment. Ne jamais avoir éprouvé quoi que ce soit. Mais le cœur n'écoute pas la raison. Alors je me fais souffrir, jusqu'à ce qu'enfin quelqu'un d'autre le détrône dans ma tête. Il y a une différence entre vouloir et pouvoir, on vous ne l'a pas dit ? Et j'espère plus que tout me faire frapper par la foudre de l'amour.

VOUS LISEZ
Un voeu, un sourire.
ParanormalUne bande d'amis qui s'amusent. Des adolescents un peu éméchés, mais quelle importance ? Les secondes qui défilent. Le temps qui se suspend. Et une, deux, trois victimes. Et un collier qui réalise tous les voeux les plus fous. En échange ? Juste un...