Chapitre 29.

2.2K 223 9
                                    

Les rayons du soleil avaient beau traversé avec force les faibles rideaux de couleur saumon de ma chambre, pour m'annoncer qu'il était jour, je ne bougeai d'un millimètre de mon lit. Couchée sur le dos, je fixais d'un regard vide le plafond d'un blanc immaculé.

Je n'avais pu fermer l'œil de toute la nuit, ne cessant de méditer les paroles de ma mère.

Sois heureuse...

Tu es libre...

Ton père n'a plus aucun pouvoir sur toi...

Rien ne t'attends ici...

Libère-toi de son emprise...

Commence à vivre...

Ces mots resonnaient en boucle dans mon esprit m'emplissant d'une légèreté intérieure. Entendre ma mère me les dire m'avait fait verser des larmes, des larmes de joie. Par ces mots, elle m'apportait son soutien, sa force pour lutter contre mon passé et mes démons.

Ce soutien que j'avais tant attendu de sa part quand me faisant battre par mon père, elle me regardait muette. Ce soutient dont j'avais tant besoin quand petite, seule dans le noir, je pleurai ma faim tandis qu'elle mangeait à table avec père et Jason.

Et même si ce n'est que maintenant, tard, qu'elle me le donne ce soutient, je l'accepte avec joie, parce que je l'aime et que je ne pourrai jamais lui en vouloir.

Ma tête posée contre les coussins de décorations du lit que je n'avais pris le temps de défaire la veille, je fixai l'heure sur mon réveil. Trop lent, le temps défilait trop lentement à mon goût.

Plus que quelques secondes.

Je fermai les yeux pour souffler un moment. Le réveil sonna et je quittai mes draps dans la même minute. Comme une automate, je me rendis dans la salle de bain. Devant le double vase, j'ouvris le robinet de la gauche et me rinçait abondament le visage avant de lever la tête et de me regarder dans la glace.

Des gros cernes obscurcissaient mon regard traduisant ma nuit blanche. Mes traits étaient tirés reflétant ma fatigue plus mentale que physique.

J'étais fatiguée. Fatiguée de me battre contre mon passé, de me convaincre que je n'avais pas droit au bonheur comme me le répétait mon père.

Commence à vivre... Sois heureuse...

Dans ma grande salle de bains, je me déshabillai lentement avant d'entrer dans la douche qui était tellement grande qu'elle pourrait contenir toute une famille. J'appuyai un bouton et l'eau se mit à couler d'au-dessus de ma tête, comme une pluie qui tombait du ciel. Elle était froide, très froide et c'était ce dont j'avais besoin pour réveiller mes sens.

Commence à vivre... Sois heureuse...

La voix de ma mère résonna à nouveau dans mon esprit.

Etre heureuse, je n'aspirai qu'à ça. Etre heureuse encore une fois, juste une dernière fois. Faire comme-ci rien ne m'attendait au pays et vivre, vivre de nouveau, ne serait-ce qu'une dernière fois.

Les larmes coulèrent de mes yeux, se confondant à l'eau qui ruisselait sur mon corps entier. C'était si beau, si beau de m'imaginer heureuse et vivante.

Ton père n'a plus aucun pouvoir sur toi...

Je n'en n'étais pas si sûre. Il en aura jusqu'à ma mort car il détenait ce que je désirais le plus au monde. Son amour, l'amour d'un père.

Cependant, mère n'avait pas totalement tort sur ce point, car ici à New York, en Amérique dans ce continent autre que l'Afrique, il n'avait aucun pouvoir sur moi et je pouvais donc tenir la promesse que j'avais faite à ma mère...

Celle d'être heureuse.

Appuyant de nouveau contre un bouton, j'arrêtai la magnifique pluie qui me tombait dessus. Je sortis nue de la douche avant d'attraper ma serviette posée non loin. Je m'essuyai rapidement puis enfilai mon peignoir tout en me dirigeant dans mon dressing le sourire aux lèvres.

Je pouvais être heureuse, juste une dernière fois, juste le temps de mon stage car une fois de retour en Afrique du Sud, j'affronterai mon passé qui deviendra mon futur.

Alors pour mon présent, j'éloignerai de moi mon passé et serai heureuse.

Oui, je serai heureuse. Je m'en faisais la promesse.

A moi et à personne d'autre. Pour moi et pour personne d'autre.

*

Il était à peine sept heures du matin que j'étais déjà à l'entreprise. Je m'ennuyais trop à la maison pour y rester ne serait-ce qu'une minute de plus. J'avais décidé d'être heureuse et pour cela, je m'attacherai à ce que j'aimais le plus dans cette ville. Mon travail et mes amies.

Traversant le hall d'accueil qui était quasi vide, je m'arrêtai devant l'ascenseur que je demandai. Je fouillai dans mon sac et en sortis mon téléphone. J'entrai dans ma boite de réception de message et écrivis un message à ma mère, un je t'aime en arabe.

Ma mère avec ses origines marocaines aimait bien s'exprimer en arabe souvent mais hélas, j'étais bien la seule de la famille qui portait un intérêt à cette langue.

Le son de l'ouverture de la porte de l'ascenseur se fit entendre et j'y pénétrai sans détacher mon regard de mon téléphone. Une autre personne me suivit dans l'ascenseur, c'était un homme le découvrais-je grâce aux souliers à la coupe aussi fine que masculine.

Les portes se renfermèrent sur nous deux et la main de l'homme passa dans mon champ de vision pour appuyai le numéro de son étage.

Le dernier... ? Le dernier étage ?

Avant même que je ne demande quoique ce soit, la main de l'homme appuya aussi le numéro de mon étage. Surprise qu'il connaissent mon étage, je levai la tête pour mettre un visage sur cet homme.

Parker.

- Bonjour Ebiéreyma. As-tu bien dormi ? Me demanda Parker avec un sourire éclatant.

Je tiquai une fois mon prénom entier prononcé. Je n'aimais pas ça, vraiment pas. Mais je décidai de ne pas m'attarder sur ce point. Laissez mon passé de côté et vivre mon présent, tel est ma résolution. De plus, cela lui ferrait trop plaisir que je pique une crise de nerf juste pour lui alors je ne lui donnerai pas ce plaisir.

- Après être passé du nom au prénom, on passe tu vouvoiement au tutoiement. Après ce serait quoi, les petits noms ? Demandai-je ironiquement.

Autant de familiarité de sa part, ne me réjouissait pas du tout !

- On passera beaucoup de temps ensemble sur ce projet et nous travaillerons en tant que collègue alors le mieux serait de commencer dès maintenant à tisser une certaine affinité entre nous deux. Alors, appelle-moi James et tutoiement, s'il te plait. Me dit-il en me faisant un clin d'œil. En ce qui concerne les petits noms, ne t'inquiétes pas ils ne sauront tardé.

Il n'est pas sérieux ? Il joue à quoi Parker, au séducteur ?

Il a même dit s'il te plait dans sa phrase et si je me rappelle bien, il m'a dit bonjour. James Parker m'a dit bonjour et m'a offert un sourire éclatant.

Je le regardai surprise. Ce n'est pas net cette histoire, il y a quelque chose qui cloche là !

- Collègue. Répétai-je à haute voix. Si je me rappelle bien vous...

- Tu. M'interrompu-t-il pour que je le tutoie.

Je lui lançai un regard mauvais lui faisant comprendre que je n'avais aimé qu'il me coupe la parole.

- Alors je disais, si je me rappelle bien vous avez ordonné ma démission pour que je travaille sous vos ordres. Alors collègue non, je dirai plutôt employé. Dis-je tout en passant davantage sur les-vous pour lui montrer que je ne voulais tisser sa soi-disant affinité.

Il me sourit puis se tourna vers moi complètement pour ancrer son regard sombre dans le mien.

- Si je t'ai fait démissionner pour que tu travailles sous mes ordres, c'est parce que je te veux à moi seule et à personne d'autre. Je te veux à mes côtés chaque jour que je viendrai travailler ici. Je désire ta présence et non te démontrer mon pouvoir.

Juste Une Dernière FoisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant