XXXVII) Papou, qui es-tu ?

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— Ne sois pas désolée Sabrina. Viens près de moi que je te présente Paola et son chéri.

La jolie apparition blonde ne se fait pas prier pour rejoindre mon père. Elle se positionne à sa droite et nous salue d'un léger signe de tête et d'un grand sourire.

— Voilà... je sais que le moment est mal choisi, mais je dois te parler ma fille.

Le ton de Papou est grave et cela ne me plaît pas. Que va-t-il m'annoncer ? Qu'il est amoureux de cette femme ? Si c'était juste cela, sa ride du lion ne serait pas aussi creusée. Que vas-tu donc m'annoncer ?

— Je vais vous laisser discuter tous les deux, c'est préférable, dit-elle en lui effleurant la joue tendrement avec sa main.

— Oui, moi aussi. Je vais fumer une clope sur la terrasse, rajoute Théo pour fuir la révélation douteuse.

Sabrina regagne la chambre d'où elle est venue et mon père m'intime d'un geste de la main, de prendre place autour de la table de la cuisine. Il fait couler un café tout en gardant le silence. Seuls les bruits de tasses et cuillères meublent l'ambiance pesante. Je commence sérieusement à me poser de multiples questions. Une fois mon jus servit, mon père se jette enfin à l'eau.

— Tu viens de passer une journée éprouvante et moi, je viens t'embêter avec mes histoires de papa égoïste. Je m'en excuse par avance ma puce.

Sa mine est si froissée que je ressens un pincement au cœur.

— Mon Papou, tu es toujours là pour moi, alors pour une fois, j'aimerais te rendre la monnaie de ta pièce. C'est le sujet dont tu voulais me parler le jour où tu m'as appelé et que j'allais très mal ?

— Oui, c'est bien ça.

— Alors, je t'écoute et saches que rien que tu pourras me dire, ne changera quoi que ce soit sur l'amour que je te porte.

— Merci, mais attends de savoir...

Il frictionne vivement son visage avec ses mains comme pour s'insuffler du courage.

— Voyons... par où commencer ? Eh bien... Je sais que tu es au courant pour ta mère, enfin pour la raison du mal-être qui habitait en elle.

J'avale difficilement ma salive et acquiesce de la tête. Je suis on ne peut plus concentré sur ce qu'il s'apprête à me révéler.

— Je veux que tu saches que lorsque je l'ai rencontré, j'étais fou amoureux d'elle. Mon amour pour elle grandissait chaque minute passée à ces côtés. Seulement, après que ce salaud lui ai arraché sa joie de vivre, les secondes passées à l'aimer devenaient pour moi des aiguilles enfoncées dans ma chaire un peu plus profondément à chaque fois. Je l'ai souvent supplié de porter plainte contre lui afin de tenter d'apaiser la colère qui la rongeait chaque jour un peu plus, mais rien à faire, elle ne voulait pas en entendre parler. Alors, je supportais ses humeurs, ses cris, ses pleurs et... sa méchanceté envers toi. Oh mon Dieu, que j'ai honte, si tu savais, de ne pas avoir su trouver en moi la force de la stopper dans sa folie destructrice.

Il enfouit son visage dans ses mains pour me cacher les larmes que son souffle saccadé me révèle. Je quitte aussitôt ma chaise et passe mes bras autour de son buste pour le plaquer contre moi.

— Tu n'as pas a avoir honte, tu m'entends Papou ? Ton amour est un onguent qui depuis toujours cicatrise mes plaies. Je t'aime et je suis la fille la plus chanceuse de la planète. J'ai un papa, que dis-je, le meilleur de tous les papas. Je t'aime, alors arrête de te torturer pour des choses que tu n'as pas commises.

Après un baiser déposé sur son front, je regagne ma place. Lui, balaie ses larmes d'un revers de la manche et poursuit ses confidences.

— Un jour, sa partie sombre a envahi tout son être. Elle était exécrable, méprisante et... violente, confie-t-il dans un souffle.

— Violente ?

— Oui. Une fois, je m'apprêtais à partir pour un après-midi au bord de l'eau, tu sais pour taquiner le goujon et pour décompresser par la même occasion, quand elle m'insulta de fainéant. Je préférais ne pas répondre, afin de ne pas attiser un peu plus sa colère. Seulement, c'est l'inverse qui se produisit. Elle attrapa mes bras,les secoua avec rage tout en hurlant que je n'irais nulle part. Face à son comportement déraisonné, je lui demandais gentiment de desserrer son emprise et de me laisser m'aérer. C'est à ce moment-là qu'une pluie de coups s'abattit sur mon visage. Ils tombaient avec tant de haine, tant de force que mon corps choqué refusait de se protéger. Je les encaissais, puis après un temps qui me parut interminable, elle m'enlaça et s'effondra dans mes bras en sanglotant. Je la berçais, la consolais même tu sais, je l'aimais si fort tu comprends, si fort.

J'étouffe mes sanglots de ma paume.

— Mon Papou. Mais que t'a-t-elle fait ? Tu...

— Non, laisse-moi finir temps que j'en ai le courage. Cette fois-ci, je ne suis pas allé pêcher. Oh, pas seulement pour lui faire plaisir, mais surtout parce que je ne voulais pas que l'on me voie ainsi.J'étais honteux de ma situation. Qui aurait cru que Tino Bianco était un homme battu par sa femme ? Qui, dit moi... Puis, ce soir-là, je me suis couché près d'elle vers minuit. Je souhaitais qu'elle soit endormie afin de ne pas croiser son regard, seulement elle m'attendait. La pleine lune éclairait même le sourire qui illuminait son visage. Je me glissais sous les draps sans lui adresser la parole, mais elle en avait décidé autrement. C'est alors qu'une tirade cinglante me percuta comme une balle de fusil au point de me provoquer une terrible douleur dans la poitrine.

— Ton malaise cardiaque ?

— Oui ma chérie.

— Mais que t'avait-elle dit ?

Il soupire, hésite puis me livre la suite comme pour se libérer d'un fardeau.

— Je te le prononce tel qu'elle me l'a dit : « Non mais regarde-toi ! Comment j'ai pu être assez conne pour coucher avec ton frère ? Tout ça pour te donner un enfant que tu n'étais même pas fichu de me faire ! Tu me dégoûtes ».

J'ai la nausée. J'ai mal, si mal pour lui. Je ne trouve pas les mots, je ne trouve pas DE mots. Je réussis juste à me dire que ma génitrice égale mon géniteur.

— Je t'en prie ma Paola, ne pleure pas. Écoute la suite comme elle est belle !

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Coucou

Vous devez penser que beaucoup de révélations sombres sont mises à jour au fil des chapitres, mais si vous y réfléchissez quelques secondes, lorsque l'on déterre un secret, souvent d'autres surgissent dans la foulée.

Le vie de Paola aux apparences idylliques n'est en faite basée que sur des mensonges, d'où son déséquilibre émotionnel.

Bisous mes loulous et à bientôt !


Entrée dans la nuit (Terminé ) (Protégé par copyright)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant