Chapitre 12 - Simon

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Trois jours après l'épisode du McDo, j'en avais encore mal à la tête et au dos des coups que Samuel m'avait donnés, même s'il est possible que je les eusse cherchés. J'avais maintenant deux grandes prunes sur le front, bien bleu. J'étais retourné chez moi, entre temps, pour reprendre mes anciennes lunettes ; la vision n'était pas aussi forte que ce dont j'avais besoin, mais c'était mieux que rien. Des lunettes à la monture bleue, de l'époque où Elwin complexait pour ses cheveux. J'avais l'impression, d'un côté, de me rapprocher de lui, et d'un autre, qu'il n'avait jamais été aussi loin.

Les trois jours suivants, je les avais passés chez Mélissa, même le lundi où je n'étais pas allé à l'école. Je m'étais attendu à un bac, au moins, d'article. Je ne m'étais pas vraiment attendu à ce qu'il y en ait cinq. Un bac par jour, c'était le mieux que je pouvais demander à Mélissa. Nous étions donc sur le balcon de sa chambre (parce qu'elle avait une porte menant directement de sa chambre à dehors !) avec le troisième bac du lot. J'avais une cigarette, Mélissa avait un verre de vin, et nous cherchions tout ce qui pourrait avoir, de près ou de loin, un rapport avec Elwin. Ça faisait des heures que nous étions dessus. Jusqu'à maintenant, je n'avais rien trouvé.

- Regarde ça, Simon, dit Mélissa au bout d'un moment. Un enfant qui a enflammé tout un immeuble, au Japon.

- J'en ai rien à faire.

- Il s'appelait... Suzaku, dit-elle en riant. En dirait une marque de voiture.

- Ça n'a aucun rapport, de près ou de loin, à Elwin, soupirais-je.

- Tu sais pas, peut-être qu'il en as.

Je soupirai, puis changeai d'article, mettant celle que j'avais dans la pile « déjà vu ». Mélissa fit de même, avec un soupire encore plus grand que le mien.

- J'en ai marre, je veux faire autre chose, dit Mélissa en s'adossant contre moi et m'arrachant l'article que j'avais dans la main avant même que je pusse lire le titre. Et si on allait...

- Dans deux heures, quand j'aurais fini le bac.

Je repris l'article des mains de Mélissa, qui me l'arracha encore une fois des mains. Elle commençait à sérieusement à m'énerver. Comme à toutes les dix minutes.

- Ça te dit, une pizza ?

- On vient juste de diner, me dit pas que t'as encore faim !

- Je demande pour toi.

- Eh bien non, j'ai pas faim.

J'essayai encore une fois de reprendre l'article, mais Mélissa le mit sous sa cuisse et me prit la main, entortillant ses doigts autour des miens. Je mis ma cigarette dans ma bouche pour avoir mon autre main de libre et me penchait au-dessus d'elle pour l'attraper. Mélissa poussa un long soupir de capitulation, se releva et partit vers sa chambre, emportant son verre de vin avec elle. Je restais seul sur le balcon, lisant enfin l'article.

C'était un peu triste à dire, mais malgré que Mélissa me considérait comme son petit ami, moi je la considérais plutôt comme une solution, et tout particulièrement un pot de colle très, très collant. En gros, elle disait petit ami, je disais fuck friend.

Un peu perdu dans mes pensées, il me fallut un moment pour me rendre compte que j'avais relu le titre trois fois sans en comprendre le sens. À la quatrième, je compris qu'il était question d'une mère qui avait perdu sa fille, apparemment enlevée par les autorités. Sans trop savoir ce que ça voulait dire, je lus le reste. Et là, je compris que j'avais enfin trouvé quelque chose qui avait peut-être un rapport avec Elwin.

- Mélissa ! m'écriais-je en écrasant mon magot dans le cendrier et me précipitant dans sa chambre. Il faut que...

Je m'interrompis en voyant que Mélissa était nue dans son lit, un drap mince pour cacher juste ce qu'il faut. Je poussai un soupir, commençant à en avoir marre, de ce coup-là. Elle pouvait me le faire jusqu'à quatre fois par jour.

- S'il te plait, Mélissa, c'est pas le moment ! Je crois que j'ai trouvé quelque chose.

- Ça peut bien attendre un peu, dit-elle d'une voix mielleuse tout en jouant avec le rebord du drap, passant dangereusement près de montrer ses seins.

- Ça va faire plus de six semaines qu'Elwin attend, lui !

À bout de patience, Mélissa sortit de son lit pour m'attraper par le bras et m'entrainer vers le lit, me poussant pour que j'atterrisse coucher sur le dos.

- Ce que tu fais, c'est du viol.

- Arrête de faire semblant, je sais que tu le veux.

- Évidemment que je le veux...

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