Chapitre 7

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Gadie

 La semelle de mes chaussures faisait crisser les graviers noirs du trottoir. De grandes ombres grises m'encerclaient. Voilà, j'étais de retour dans l'enfer de ma vie, comme prise au piège une nouvelle fois dans cette atmosphère sordide, si caractéristique de ma cité. Tout était gris, triste et pourri par ici. Même le ciel avait l'air sombre, torturé. Je détestais cet endroit, je détestais ces tours, je détestais tous ces gens qui m'observaient et me jugeaient. Et pourtant, comme une idiote fidèle, j'étais revenue dans ce cauchemar qui me répugnait.

Depuis toute petite, je vivais ici. Je n'avais jamais rien connu d'autre que ces barres de bétons, l'odeur de la drogue et de l'urine. Ce n'est qu'à l'âge de mes 16 ans, quand, pour la première fois de mon existence je quittai ce quartier sombre pour me rendre dans le vrai monde, que je compris que tout cela n'était pas normal, que cet enfer n'était pas la réalité, qu'il était possible de vivre mieux et pourquoi pas, de vivre heureux.

Face à moi, de l'autre côté du trottoir, se trouvait un groupe d'hommes en jogging. Ils se tenaient sur leurs motos, les pieds appuyés sur le capot d'une voiture. Des ricanements parvenaient jusqu'à mes oreilles. Stud. Merde. Je détournai la tête et longea le mur, en rabattant ma capuche sur ma tête. Je n'avais aucune envie qu'il me voie.

Stud. Rien que ce nom me dégoutait. C'était un connard qui jouait le rôle de relai dans de la vente de drogues au compte d'un certain groupe à tendance mafieuse... Les D.S. pour le peu que j'en savais... Et je ne voulais pas en savoir plus ! Il se rapprochait de jeunes un peu paumés comme il y en avait tant dans ma cité pour leur proposer de la drogue ou du travail. Enfin, quand je disais travail, je reprenais ses mots, cela consistait surtout à récupérer la drogue dans des endroits tous plus glauques les uns que les autres pour ensuite aller les revendre à son compte dans un autre endroit chelou. Des risques énormes pour très peu de gains... mais suffisamment pour s'acheter de quoi manger et vivre...

Et je savais de quoi je parlais. J'avais été une de ses victimes. Dès l'âge de 12 ans je bossais pour lui. J'avais plongé dans cet enfer de la drogue jusqu'à mes 16 ans. J'étais une vraie toxico, et j'étais douée dans mon job. Dealer, fumer, se shooter... Tout cela était devenu normal pour moi. C'était d'ailleurs lors d'une de ces splendides virées que j'avais pu voir la vraie ville, comme on en parle dans les livres, et que j'avais pu me rendre compte à quel point je me trompais. Ce type m'avait pourri la vie, mais je lui devais au moins le fait de m'avoir ouvert les yeux...

- Hey Gadie ! beugla une voix.

Et merde. Ce crétin m'avait vue. Je tournai lentement la tête. Il me fixait, avec ses petit yeux perçants et vicelards, une cigarette coincée entre ses deux gros doigts immondes. Je lui jetai un regard noir.

- Qu'est-ce que tu veux Stud ?

Il ricana. Autour de lui, une bande de jeunes garçons d'une quinzaine d'année riaient avec lui.

- Aller, approche Gad, que je te présente à mes nouveaux potes ! Ça fait un bail que je ne t'ai pas vue !

- Pas assez longtemps à mon goût marmonnai-je.

Il fronça les sourcils. C'était un homme d'environ 26 ou 27 ans. Il avait le visage couvert de cicatrices et le crâne rasé. De larges épaules et un corps musclé se cachaient sous sa veste de cuir.

- Tu fais chier Gadie, on ne me balance pas comme ça moi ! Tu me salue putain ! Ai au moins le courage de me dire bonjour !

Non mais il était sérieux ce clown ?! S'il n'était pas aussi grand et costaux ce crétin je lui aurais expliqué ma façon de penser à cette boule de muscles !

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