Chapitre 15

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Mélina

    Les talons de mes chaussures claquaient sur le carrelage froid du salon. Je poussai un soupir exaspéré. Cela devait faire bien cinq minutes que je tournais en rond comme une âme en peine devant cette baie vitrée trop propre, mon téléphone plaqué contre mon oreille, et je commençais sincèrement à douter de la réussite de mon opération. J'eu un grognement agacé.

    De l'autre côté de cette frontière verre parfaitement translucide, un pigeon unijambiste au plumage affreusement terne m'observait d'un air curieux. Crétin de Piaf. Je stoppai ma ronde étourdissante pour me planter devant lui. A tous les coups cette erreur aberrante de la nature devait se ficher de moi ! Tsss... Il ne s'était clairement jamais vu pour oser porter son regard dénué de toute trace d'intelligence sur moi. Je lui tirai la langue. Le volatile stupide s'envola. Ce n'était pas trop tôt.

    Poussant un énième soupir, j'entrepris de m'assoir sur l'un des tabourets qui encerclaient le bar. Je passai une main sur mon front. Cet oiseau ridicule n'avait pas tout à fait tord non plus, cela devait être la troisième fois que j'essayais désespérément de joindre mon père. La troisième fois. Et j'étais toujours reçue par ce même et éternel refrain platonique:

    « Bonjour, vous êtes bien sur le répondeur de Jonathan Roagon. Actuellement indisponible, n'hésitez pas à me laisser vos coordonnés, je vous recontacterais dès que possible »

    J'avais fini par le connaître par coeur. Et cela devenait passablement agaçant. En terme de com' j'aurais quelques conseils à lui filer... Je t'en ficherais moi du Jonathan Roagon !

    Alors que je commençais à croire que j'étais définitivement devenue orpheline, l'infernal bip sonore s'arrêta. Ah... Mon souffle se coupa. Pas de « Bonjour » exaspérant cette fois-ci?

-    Allo? Prononça une voix.

    Mon coeur rata un battement. Je n'y croyais plus...  Trois appels suffisaient vraiment ?

-    Papa? interrogeai-je d'une petite voix

-    Ma chérie! S'exclama mon père.

    Sa voix. C'était lui. Je n'en revenais pas. Cela faisait si longtemps... Je serrai plus fort mon téléphone dans ma main, de peur qu'il ne s'en aille et que je le perde à nouveau.

-    Oh je suis si content de t'entendre! continua-t-il sur un ton enjoué. Comment tu va ma puce?

    Comment je vais? Et bien comme une fille qui s'est faite tabassée par son prétendu copain après avoir mangé une mauvaise cuite à une fête minable en compagnie de deux bouseux tiens ! Et qui s'ennuie ferme à présent, toute seule dans son appartement depuis plus de 24 heures, avec pour unique compagnie son atroce solitude et sa souffrance stupide ! Super bien quoi ! Quelle question stupide..! Enfin, je doute que mon très cher père ai vraiment envie d'entendre tout cela...

-    Bien ! M'exclamai-je, Super bien même ! Et toi ça va ? Je ne te dérange pas ?

-    Toi me déranger?! Voyons, jamais de la vie ma chérie ! Je suis dans la voiture pour me rendre à l'aéroport alors penses-tu, j'ai encore pas mal de temps pour discuter avec ma petite fille chérie!

    Pas mal de temps ? Jusqu'à ce que tu arrives à l'aéroport en somme... Super, on a 10 minutes devant nous après deux semaines d'absence ! Il y a vraiment des fois où je me sens aimée.

-    Tant mieux si je ne t'embête pas trop alors...

-    Ne t'inquiète pas pour ça ma princesse, ne t'inquiète pas pour ça... me rassura-t-il. Bon alors, qu'est ce que tu me raconte de beau ? Comment se passent tes vacances ?

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