Chapitre 4

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Iwaizumi avait attendu le roi au sortir de son conseil, le matin. Oikawa, franchissant les portes, s'était décomposé en voyant le chevalier habillé de pied en cap dans son armure habituelle, les bras croisés, debout adossé contre un mur.

-Iwa, dit-il en prenant son ami par le bras pour l'entraîner un peu plus loin. Qu'est ce que tu fais là ? Tu n'es pas avec tes soldats ?

Ses grands yeux bruns sont brillants d'inquiétude, et le sourire qu'il présente laisse aisément deviner son malaise. Il lève une main pour rajuster une mèche de cheveux de ses doigts fins.

-Oikawa, soupire Iwaizumi. Je reconnais que je ne m'attendais pas à ça de toi. Je savais que tu n'allais pas m'écouter, bien sûr, mais j'espérais au moins de toi de la discrétion.

Les joues du roi s'empourprent, mais il redresse fièrement la tête :

-Je quitte la salle comme je l'entends. C'est mon château, après tout, c'est moi qui choisis les chemins que j'emprunte.

-Et que ce petit archer quitte sa table quelques minutes plus tard pour sortir à ta suite ?

Il laisse échapper un petit rire rempli de désillusions.

-Heureusement que lui a eu le mérite d'être discret. Ecoute, tu n'es pas seulement mon roi, tu es aussi mon meilleur ami.

Oikawa commence à prendre une expression flattée et s'apprête à répondre, quand Iwaizumi reprend immédiatement :

-Ce n'est pas par envie que je te demande de t'éloigner de lui tant qu'il est encore temps, c'est...

-Je sais, l'interrompt Oikawa d'un ton tranchant. Parce que ma mère va me marier, et alors ? Combien de rois avant moi ont eu des aventures hors du lit conjugal ?

-Tu ne vas donc pas refuser le mariage ? interroge Iwaizumi.

Ces mots semblent apaiser son expression, aussi Oikawa va-t-il opportunément dans son sens :

-Non, je n'y compte pas.

Iwaizumi semble pensif un instant, puis hoche la tête avec une conviction croissante.

-Bien. Bien.

Il fait quelques mouvements incertains, un peu pris au dépourvu, puis s'en retourne entraîner les soldats. Oikawa est soulagé de la tournure que prend la situation et, rêveur, repart vers ses appartements, désireux de lire un peu. Sur un des murs, garnis de tapisseries et d'écussons, une immense carte du monde connu étale son parchemin jauni par les ans. A l'encre noire, les royaumes sont délimités par de fines lignes, alors que leurs noms sont précisés dans une écriture gothique ; de petits dessins illustrent les lacs et montagnes notables.

Il fait glisser son index sur la carte, le pose sur Aoba Johsai, son royaume. Au nord, l'immense royaume de Shiratorizawa s'étend, couvert de forêt, délimité au nord par une chaîne de hautes montagnes. A l'est, Dateko, royaume plus petit que celui d'Aoba, dont la frontière est marqué par une forêt profonde. Au sud, Karasuno, petit royaume boisé et côtier.

Le jeune monarque contemple surtout Shiratori, qui représente facilement le double de la superficie du royaume d'Aoba. Sans nul doute l'allié par excellence, vaste et puissant, dominant tout le continent depuis le nord. Une guerre contre eux serait un désastre total.

Ce soir-là, à sa table, Oikawa tente de modérer les regards qu'il lance à Kageyama, lourds de promesses pour le lendemain. L'archer lui répond volontiers, et, chose attendrissante, ne cesse pas de rougir à chaque regard surpris. Il ne réitère pas sa sortie de la veille, et retourne directement dans sa chambre avec l'impatience du lendemain.

Memento AmariOù les histoires vivent. Découvrez maintenant