Chapitre 16

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-Je vais attendre que la délégation de Shiratorizawa reparte vers son royaume, après avoir fait reconnaître par tous les conseillers présents l'engagement pris par Ushijima de soutenir Aoba, si jamais les pays du Sud me déclarent la guerre. Je m'engagerai à envahir Karasuno sous délai d'un an. C'est pendant cette année-là que je couronnerai Tobio roi. Je le convaincrai que c'est absolument nécessaire ; il a beau être borné, je le suis autant que lui. Il sera mon prince consort. Nous commencerons les démarches pour l'héritier au trône aussi tôt que possible.

« Durant cette même année, nous mobiliserons les deux tiers des forces du royaume, en recrutant des soldats, en préparant les réserves de vivres et en augmentant la production d'armes. Nous enverrons des espions repérer le territoire de Karasuno pour préparer une invasion qui doit être extrêmement rapide. En quelques jours, nous devons traverser les terres de ce royaume jusqu'à leur château. Nous y entrerons par la force, et si nous échouons, nous en ferons le siège en divisant nos troupes : je resterai avec un quart de mon armée autour du château pour attendre la reddition, pendant que le reste ira soustraire les ressources alimentaires et humaines de Karasuno, pour prévenir une rupture du siège.

« Une fois le château pris, je récompenserai mes soldats, et j'appâterai ceux de Karasuno avec une solde alléchante. La superficie de mon royaume doublera en même temps que mon armée. Le moment critique arrive alors. Shiratorizawa peut profiter de l'absence de soldats à Aoba pour envahir le royaume. Le Sud, c'est-à-dire les royaumes qui commercent avec Karasuno, et en particulier Nekoma, peut aussi réagir en nous déclarant la guerre. Le problème tient au fait que les royaumes du Sud forment une union très soudée, et si l'un d'entre eux entre en guerre, les autres suivront. Nekoma entraînerait Fukurodani, Shinzen et les autres. Dans le pire des cas, nous nous retrouverions coincés entre un front Nord et un front Sud.

« Ceci dit, il ne s'agit que du pire des cas. Une alliance avec des royaumes isolés, tels que Dateko, Wakunan ou Inarizaki, demeure envisageable. Par ailleurs, Ushijima sera tenu de respecter son engagement de soutien par l'influence de ses conseillers, et ta présence, sorcier, à ses côtés pour lui rappeler. Je sais que tu as le pouvoir de punir, et il le sait également. Alors, s'il manque à sa parole, frappe.

« L'appui de Shiratorizawa, que je considère presque acquis, nous donne donc la supériorité sur le Sud, c'est indéniable. La situation se terminerait alors de la manière envisagée : mon peuple occupera Karasuno, qui deviendra une province productrice au service d'Aoba ; et en compensation pour le mariage manqué, Shiratorizawa recevra les territoires du Nord d'Aoba, riches en matières premières et offrant de la place pour installer leurs ressortissants. La paix sera alors rétablie sur cette promesse honorée.

« En un mot, cet aboutissement idéal ne dépend que de toi, sorcier. Fais savoir à Ushijima que l'engagement qu'il prend devant moi de me soutenir ne pourra pas être oublié ; il devra l'honorer ou payer le prix de sa trahison. Il n'aura peut-être même pas à engager son armée : rien que savoir Shiratorizawa prendre parti pour ma cause, moi qui aurai déjà deux armées, suffira à dissuader le Sud de s'engager contre nous. Je fais confiance à ses conseillers, mais avant tout, c'est sur toi que je compte... Tendou.

Le roi est dans son bureau, assis dans un fauteuil près de la cheminée. Alors qu'il parle tout haut, il regarde pensivement les flammes ; Tendou, quant à lui, arpente le bureau de long en large, les mains croisées derrière le dos.

-Bien sûr, Majesté. Ce plan me paraît le plus judicieux, et vous pouvez compter sur mon soutien, vous le savez.

-Il le faut, soupire Oikawa.

Il a appuyé sa joue contre la paume de sa main, songeur. Cela fait plusieurs jours maintenant que les négociations sont en cours pour préparer la guerre dans ses moindres détails, et les réunions interminables sur les stratégies, suivies de longues périodes de réflexion solitaire, épuisent nerveusement le jeune roi. Il ne tait que deux choses face à Ushijima : la peur de sa trahison, qu'il assure avec Tendou, et le couronnement prévu de Tobio.

Memento AmariOù les histoires vivent. Découvrez maintenant