Chapitre 34

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Certaines fautes sont impardonnables, qu'elles viennent d'un ami, d'un amour ou même d'une mère. Ne viens pas chercher des excuses que tu ne mérites pas, tu savais que c'était une erreur quand tu l'as fait.

Tels étaient les mots que j'aurais pu lancer pour exorciser ma rage. Ils voulaient sortir mais l'état de choc dans lequel j'étais encore plongé laissait peser un silence de mort entre les murs.

Lorsque j'avais reconnu ce visage, ces cheveux châtains foncés qui étaient également miens, ma bouche s'était entrouverte et ce nom qui n'avait plus frôlé mes lèvres depuis longtemps s'était échappé : Maman...

Taïna avait alors immédiatement prit les choses en main. Elle l'avait invitée à entrer, puis avait fait le tour de l'appartement pour demander à mes convives de quitter l'habitacle, n'hésitant pas à en réveiller certains.

Personne n'avait bronché, ils avaient tous rassemblés leurs affaires entrecoupant le silence de quelques chuchotements gênés.

Camille et Hilarie s'étaient glissées dans ma chambre aux côtés de Thomas encore profondément endormi, et Jules s'était chargé de faire couler du café.

- Merci pour l'invitation Lucie, lança doucement Alexia qui n'osait pas pénétrer dans la cuisine pour me faire la bise. Bon courage.

Ils quittèrent un par un l'appartement pour rentrer chez eux, j'étais tellement mal à l'aise de les chasser ainsi, tout du moins, de laisser Taïna le faire pour moi. Ce n'était pas à eux de s'en aller, mais à elle...

- Pour le rangement ça ira ? me questionna Taïna en enfilant sa veste.

- Ne t'en fais pas...

- Reste ouverte d'esprit, elle a sûrement des choses à te dire, me murmura t-elle ensuite avec un sourire encourageant. On en reparle demain au lycée.

La rentrée. J'avais tellement hâte, chose bien anormale.

Jules s'avança à son tour, il était le dernier de mes invités parisiens. Ignorant la polynésienne qui le foudroyait du regard et ma mère qui n'avait prononcé mots depuis son arrivée, il m'embrassa la joue avec une tendresse rassurante :

- Je t'enverrai un message...

Sa promesse à peine audible suffisait à m'achever. Il faudrait que nous parlions ce qui s'était produit évidemment, mais j'avais d'autres chats à fouetter.

Un hochement de tête plus tard, ils étaient partis, m'abandonnant à ce malaise ambiant.

Cette femme qui m'avait fait tant de mal me fixait intensément, toujours debout face à moi, la table de la cuisine nous maintenant à bonne distance. Elle fut la première à rompre timidement le silence :

- Tu as tellement changé...

- En dix ans c'est peut-être normal ?

- J'imagine comme ce doit être déroutant. Je ne pensais pas trouver tant de monde à mon arrivée. J'ai eu quelques problèmes sur le chemin.

- Tu as pris l'autoroute du retard ?

Les bras croisés sous ma poitrine je pestais en regardant mes pieds ou la vaisselle étalée un peu partout. Je ne souhaitais pas soutenir son regard apitoyant, ni exprimer une quelconque sympathie envers elle quand bien même c'était ma génitrice.

Mon sarcasme la laissait de marbre.

- Tu es restée près de Montpellier ? demandai-je en feignant l'indifférence.

Pas de réponse.

- On t'a cherché... En vain, cela va s'en dire, précisai-je.

- J'en suis partie. Victor et moi avons une maison dans les Yvelines à quarante minutes d'ici.

RevirementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant