THE MASTER'S GAME ✩ [édité chez Hachette]

Chapitre 7.1 : Réaction immature mais légitime

Partie 1 : Réaction immature mais légitime

Cher Journal,

Un gage personnel, voici le seul indice donné par le master. J'espère juste que cela n'aura rien à voir avec Liam car j'ai prévu de ne pas lui adresser la parole de la semaine. Mais en même temps j'ai tellement hâte de reprendre ce jeu. Deux semaines sans et je me noyais dans l'ennui. Il ne se passe rien d'intéressant dans ma vie pour l'instant, les vacances m'ont permis de revoir l'intégralité des Star Wars, tous les Seigneurs des Anneaux et de jouer aux échecs avec mon père. C'était sympathique mais maintenant j'ai besoin d'action.

Lydia

— She kissed me,

Then she left me,

Now she just wanna forget...

Why does it have to be so hard?

Why can't she just wanna have fun?

White hair, red lips,

She's just so sweet,

Je m'arrête de marcher lorsque je prends conscience de ce que je suis en train de chanter. Je sors vite mes écouteurs pour finir le trajet jusqu'au lycée sans penser à Liam. Même sans que je le veuille, il s'immisce dans mon cerveau. Je le déteste...

J'essaie de comprendre, je me force même, mais je n'y arrive pas. Quelque chose cloche dans cette histoire entre lui et moi. Il ne veut pas de relation sérieuse, très bien. Mais pourquoi m'a-t-il ignorée durant les vacances ? Ça n'a pas de sens. Je n'ai rien fait de mal, j'en suis persuadée. Et pourtant...

Le brouhaha familier juste devant le lycée me fait sourire, entre les rires et les fumées de cigarette, les gens discutent de tout et de rien. Cet environnement est étrangement relaxant, tout est si...

Hum, non, à vrai dire, depuis qu'un beau brun aux cheveux horriblement soyeux a fait son entrée dans mon champ de vision, cette atmosphère n'a plus rien de relaxant. Je n'ai qu'une seule envie, et c'est de lui retirer le sourire supérieur qu'il affiche. Moi qui voulais jouer la carte de l'indifférence avec lui, je ne sais pas si cela va marcher, je suis folle de rage. Je me détourne pour qu'il ne me voie pas, ce qui est complètement stupide parce qu'avec ma crinière blanche je suis facilement reconnaissable. Un groupe d'élèves de dernière année discute et l'un d'eux sort son paquet de clopes, bon allez juste une...

J'accours vers eux et les salue gentiment. Depuis que je suis une élue, les gens sont étrangement gentils avec moi. Je n'ai même pas besoin de demander que Rebecca me propose une cigarette, que j'accepte avec plaisir. Je la remercie et vais m'adosser contre le mur de la façade du lycée, tandis que l'air frais d'un matin de novembre s'immisce dans les trous de mon jean noir.

L'inhalation de nicotine me fait un bien fou et je ferme les yeux avant d'expirer cette fumée meurtrière.

— Je ne savais pas que tu fumais.

La voix douce de Liam brise cet instant de calme. Je rouvre les yeux pour l'observer devant moi. Son perfecto recouvre un tee-shirt blanc coincé dans son jean bien taillé. J'aimais son style vestimentaire avant, il est l'un des rares garçons à savoir assortir les pièces de sa garde-robe. Mais maintenant, je trouve qu'il se la joue, et il m'énerve. À le regarder d'un œil distant, je finis par en oublier de répondre.

— Je n'ai pas le droit à mon baiser du matin ? grogne-t-il.

Je m'étouffe avec la fumée de ma cigarette. Il se fout de ma gueule, c'est pas possible. J'ai envie d'exploser de rage, mais je me retiens. Encore une fois, je me suis trompée au sujet d'un garçon. Ça devient une habitude. Il était poli, gentil, respectueux, je ne comprends pas ce qu'il s'est passé. Une réponse à mon message m'aurait suffi. Mais me laisser sur « Vu », c'est trop pour moi. Généralement, les gars dans son genre attendent de coucher avec la fille avant de la larguer comme une merde. Mais nous ne sommes pas allés jusque-là. Peut-être que c'est ça, le problème : il est nul au lit, et il ne voulait pas que je le sache. Intéressant.

Lui recrachant ma fumée au visage, je jette mon mégot à ses pieds avec le plus grand dédain.

— Tu sais que tu peux déclencher un incendie, comme ça, dit-il comme une dernière tentative de me faire répondre à ses piques.

Mais non, je suis plus forte que lui. De la façon la plus dédaigneuse dont je sois capable, je le toise de bas en haut. J'ai bien plus d'assurance avec mes cheveux blancs et mes lèvres rouges. J'ai une singularité, une identité bien à moi, et je compte bien utiliser ça à mon avantage. Puis je souris en m'éloignant de lui, et sans même me retourner vers lui, je lève mon majeur dans sa direction.

Une fois que je suis sûre d'être hors de sa vue, j'expire tout l'air de mes poumons. Je suis revigorée par cet échange. Je ne ressens aucune empathie à son égard, il a mérité mon insolence.

Un message me coupe dans mon moment d'autosatisfaction :

« Voici ton gage personnel, Lydia : Je veux que tu sois une garce avec Liam, je veux qu'il voie le pire qu'il y a en toi. Je veux que tu te venges. Il ne peut pas s'en sortir comme ça. Ne te laisse pas faire. »

Pour une étrange raison, ce message me fait chaud au cœur. J'ai l'impression que le master est de mon côté et ça me donne une légitimité dans mes actions. J'ai l'intention de remporter ce gage, je dois finir la première à l'issue de cette semaine.

Lorsque je retrouve enfin Julia devant la salle de classe, je lui saute dans les bras. Elle m'a tellement manqué durant ces vacances.

— T'es bien heureuse, pour une meuf qui était triste il y a quelques jours, dit-elle en fronçant les sourcils.

Je ricane devant sa remarque. Il est possible que je l'aie appelée en pleurant après avoir fini Pretty Woman. Chaque comédie romantique que je m'enfilais, un pot de crème glacée à la main, ne faisait que me rappeler ma situation amoureuse désastreuse.

— Promets-moi de ne dire à personne ce que je vais te dire, d'accord ? chuchoté-je.

Julia écarquille les yeux.

— Tu l'as fait avec Liam ? C'est ça ? Je savais bien que t'étais frustrée sexuellement.

Je plaque ma main sur sa bouche avant qu'elle ne débite encore plus de conneries.

— Mais n'importe quoi, tu sais bien qu'on n'est plus rien, tous les deux. D'ailleurs, regarde, dis-je en sortant mon téléphone de ma poche.

Julia lit le gage du master et relève la tête vers moi en souriant.

— À toi la première place, beauté, dit-elle en levant la main pour un high five.

Je tape dans sa main et lui faisant un clin d'œil. Cette semaine s'annonce intéressante.

— Tu veux pas m'aider à trouver comment me venger ? J'ai vraiment envie qu'il le regrette, tu vois, et qu'il pense qu'il a raté quelque chose.

Ai-je une réaction immature ? Oui. Est-ce que ça va me faire changer d'avis ? Absolument pas.

— Tu t'es adressée à la bonne personne, beauté. Étape un, porte tes plus belles fringues. Étape deux, sois intouchable. Étape trois, sors-lui tes meilleures piques.

J'évite de demander à Julia comment elle s'y connaît autant sur ce sujet et j'acquiesce simplement à ses propos.

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