Chapitre 10: Esprit égaré

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Les deux survivants avaient parcouru plusieurs fois ce qu'il restait des villes, toutes désolées et dépeuplés, où il ne restait que, comme eux, les rebuts et les parias enfantés par la médiocrité. Leurs nouveaux vêtements multipliaient déjà les altérations, les traces de luttes et de combats acharnés. Avec le temps, ils avaient trouvé suffisamment de vivres pour remplir de nouveau leurs sacs, avec une quantité de nourriture presque similaire à ce qu'ils possédaient d'après leurs souvenirs.

Lexi, perchée sur le toit d'une camionnette, observait les alentours en portant sa vue au loin. En tournant sur elle-même, elle voyait se porter autour d'elle le spectacle habituel des décombres et des épaves qui ornaient les rues engorgées. Bien qu'elle en avait l'habitude, voir la tourmente de ce tableau dans son ensemble lui fit étreindre une angoisse funeste:

- Tu vois quelque chose? Demanda Aidan qui l'observait plus bas.

- Peut-être bien. Y à l'air d'avoir quelque chose là-bas, au bout de la rue. Ça ressemble à une place. Si on y va, on trouvera peut-être plus de commerces. Y a eu du monde on dirait. Des gens, et pleins de voitures avec un barrage grand ouvert à l'entrée. Ça en serait presque militaire.

- Un rassemblement? C'est possible?

- Très probable oui. Des lieux ont été aménagés dans ce genre d'espaces un peu clos pour certaines activités, puis ils sont tombés rapidement. J'en ai encore jamais vu, mais de ce que j'en sais il valait mieux pas être là quand ça commençait à dégénérer. C'est comme... Se retrouver dans un piège.

- Rien d'autre?

- Non. Rien qui bouge si c'est ce que tu veut savoir. Termina-t-elle avant de s'accroupir.

Elle attrapa le bord du camion et fit doucement pendre ses jambes dans le vide. Ses doigts glissèrent. Tout son poids se rattrapa sur ses bottes. Aidan leva son sac et le replaça sur les épaules de son compagnon.

Malgré les interdictions protégées par les dispositifs entourant l'espace, de nombreux véhicules s'étaient approprié les lieux, avant de se décomposer à l'intérieur, parsemés de tristes cadavres. Ils étaient arrivés par les allées les plus restreintes comme par les artères les plus larges, jusqu'au coeur meurtri de la place centrale. Les barrières avaient été forcés, parfois arrachées, et ce malgré les lourdes voitures et les imposants pieds en béton qui maintenaient les clôtures. Les corps rongés par la nature s'entassaient devant, derrière, et sur les barrières métalliques. Les terrasses des bars et des cafés s'étaient envolés dans cet ouragant qui avait sévi. Centrée au milieu de toute cette casse et cette crasse s'érigeait comme un monument la fontaine de marbre. Son eau verte et stagnante abritait mille et une vies, et les valves ouvertes n'écoulaient plus cette éternelle aquosité vivante. Des détritus en voie de décomposition, allongés sur les pavés chauds, patientaient le temps de leur longue disparition. L'entrée des deux humains en ce lieu à part fit s'envoler tous les corbeaux encore à terre. Certains se déposèrent sur les hauts toits et devant les fenêtres. D'autres s'engouffrèrent dans les bâtiments commerciaux, par les vitres ouvertes et cassées.

Alors qu'ils avancèrent, contemplateurs, entre les restes d'une civilisation perdue, une détonation stoppa leur avancée, jusqu'ici tranquille. Un terrible grondement d'arme à feu s'ébruita parmi les structures, et le fin sifflement véloce d'une balle fila derrière eux et se perdit confusément. Alertes, ils se courbèrent immédiatement se réfugièrent chacun de leur côté. Lexi se jeta derrière un 4x4 gris accidenté, alors qu'Aidan plongea instinctivement derrière la fontaine. Ils avaient aussitôt reconnu l'éclat si unique de la détonation:

Misérable rédemptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant