"Fin du monde"

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MISE À JOUR 6.3 - CALLUM

Le Commencement


« Callum...Callum... »

Il la voyait. C'était incroyable. Cette sensation de réalité émergeant au milieu du néant. Ce contraste entre la perception vive du métal sous ses doigts et celle plus confuse, affirmant sa dominance, du vide l'enveloppant.

Les ténèbres étaient impénétrables. Paradoxalement, elle était nimbée de lumière.

Elle l'observait, un sourire en coin, ses yeux verts plongeant dans les siens. Si semblables.

Elle était là. Juste sous sa main. Qu'il tendit vers elle. Hésitant.

« Callum... Callum... »

Elle susurrait, ses lèvres pâles se détachant et se rejoignant dans un ballet sensuel.

Il voulut dire son nom en retour mais aucun son ne sortit de sa gorge. Ses cordes vocales inertes embarrassaient sa respiration, le faisant suffoquer. Mais il s'en moquait.

Elle était là. Juste là. Rien que pour lui. Pas de Mike. Aucune raison de culpabiliser.

« Callum... Pourquoi ? »

Le froid qui s'emparait de ses membres le paralysa. Son visage n'était plus si beau. Plus si pure. Ses traits se défiguraient sous l'incompréhension.

« Pourquoi Callum ? »

La peur.

« Callum, pourquoi m'as-tu fait ça ? »

La colère.

« Pourquoi, Callum ! »

Et la rage. Violente, dévastatrice. Explosant en jet de lumières de ses orbites, de sa bouche grande ouverte.

Ébloui, il porta une main en visière. La tension qui s'accumulait dans son corps brisait ses côtes. Ses jambes cédèrent. Il tomba. La vitesse remontant son cœur jusqu'à ses lèvres.

« Es-tu fier Callum ? Comment peux-tu jouer le rôle du frère protecteur après tout ceci ? »

Sa voix effleurait son oreille. Et pourtant il tombait. Sombrait dans le néant.

Il sentait sa main sur sa joue. Son souffle contre sa tempe. Ses lèvres sur la naissance de ses cheveux.

Son parfum de citron et son haleine de menthe.

« Jusqu'où tu vas aller, hein Callum ? Jusqu'où tu vas mentir ? »

La bile emplissait sa bouche. Le noir le rendait aveugle. Son esprit perdait pied. Le métal sous ses doigts s'effaça. Il ne restait plus que son contact contre sa peau.

« Il mérite de connaître la vérité... Tu le sais, n'est-ce pas ? »

Ses ongles s'enfoncèrent dans sa chair. La souffrance cuisait sa joue. Il garda le silence malgré sa bouche s'ouvrant à répétitions.

« Tu lui mens, Callum. Tu lui mens depuis le début ! N'as-tu pas honte ? »

Son corps se plaqua contre son dos. Ses mains enserrèrent son torse. Brimant sa respiration.

Du verre emplissait ses veines. Entaillant à chaque battement.

« Tu mens ! TU MENS ! »

Il étouffait. De sa propre main. Son fantôme le hantait jusqu'à que mort s'en suive.

« MENTEUR ! TU ES UN MENTEUR ! »


— Hé ho, réveille-toi, mon petit !

Il ouvrit les yeux. Sa tête lui lançait. Elle résonnait, telle une cloche juste après avoir sonné les douze coups de midi.

Les yeux ronds l'observant lui fit froncer des sourcils.

— On a du pain sur la planche, p'tiot. C'est ta partenaire. Encore.

Callum souleva prudemment la tête, découvrant le bureau sur lequel il s'était endormi. Vieux bois branlant, gravé et poussiéreux, des piles de papier s'entassaient sans discontinuer, laissant un maigre espace de travail.

Son regard détailla les murs couverts de tapisseries, s'arrêta un instant sur l'horloge en bois suspendue au-dessus de la porte entrouverte. La même que celle dans le bureau de Mikaelus Senior.

— Ça va, p'tiot ?

Callum reporta son attention sur son interlocuteur. Un peu bouffi, une légère barbe grisonnant ses joues, il fronçait ses sourcils épais. Ses yeux dérivèrent sur l'uniforme sombre qu'il portait. L'insigne stylisé, jouant sur les contrastes de noir et de blanc, affichait le profil d'un lion ouvrant la gueule vers le ciel.

Cela lui rappelait vaguement quelque chose. Une leçon d'Histoire qu'il avait mis de côté. Le passé ne l'intéressait pas. Il préférait les sciences et la littérature.

Puis un éclat métallique accrocha son regard. Une crosse émergeant d'un étui en cuir fixé sur la ceinture.

Il était armé. Il avait un uniforme. Ils étaient logés dans un bureau. Leurs métiers lui parurent soudain plus clairs. Ils étaient des représentants de l'Ordre.

Examiné par son collègue, Callum se ressaisit et acquiesça vivement.

— Juste... Un cauchemar.

Sa bouche pâteuse sembla convaincre l'individu. Sa bouche se fendant dans un large sourire, il eut un rire gros et plein. Contagieux.

— On fait tous des cauchemars en ce moment. Après tout, notre situation est plus proche de l'Apocalypse que jamais, n'est-ce pas ?

Silence de sa part. L'Apocalypse ?

Un affreux pressentiment prenait naissance dans ses pensées. Unreal semblait vraiment prendre au sérieux cette histoire d'édition spéciale.

— Bref, dans tous les cas, p'tiots, ta coéquipière s'est faite choper à dépasser les bornes. Je te conseille de la recadrer. Si on se prend une attaque des Feathers, on est bon pour le cimetière.

Passant une main sur son front, il inspira profondément. Son corps était entièrement engourdi. Il le sentait des orteils jusqu'au moindre nerf : il était usé jusqu'à la corde.

— Elle est où ? lâcha-t-il avec un soupir.

C'était plus fort que lui. La fatigue tirait ses membres vers le sol.

— La Cellule, évidemment, p'tiot. Tu devrais pas traîner. Le Chef est, comme on peut dire, sur les nerfs aujourd'hui.

Il se leva avec difficulté et remercia d'un souffle son collègue. Il sortit du bureau et chemina le long du couloir, suivant les indications.

Son esprit était brouillé, sa mâchoire décrochée une fois sur deux sur un bâillement. La projection prenait le dessus, domptant son véritable état mental pour simuler celui dicté par le programme.

Pourtant, il luttait, tentant d'attraper chaque indice pouvant lui donner matière à réflexion sur l'endroit où il se trouvait. Certes, un commissariat... Ou son équivalent. Mais ce dont il souhaitait savoir, c'était la période. Quand ? Quels étaient les enjeux de ce temps ?

Au bout de quelques déambulations, il sourit face à la porte de la Cellule. Peut-être que son premier indice se trouvait à l'intérieur.

Prenant une profonde inspiration, il monopolisa tous ses neurones disponibles.

Il appuya sur la poignée et fit pivoter le battant.

Sur le seuil, il s'immobilisa. Il fronça des sourcils. Puis soupira. Las.

Évidemment.

 — Génial, grogna Zaya, les mains menottées à la table métallique. Voici mon adorable frère.

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