Chapitre 6 - Le bon vieux temps

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« Très chère amie,

Je sais que j'ai attendu longtemps avant de répondre à votre lettre, mais, vous savez, j'ai été très occupé. J'espère que vous allez bien. Je vous réponds brièvement car j'ai peu de temps devant moi. Je viendrai vous rendre visite dès que possible. Il faut que nous trouvions très vite le moyen de nous débarrasser du docteur Schmidt. Vous allez rire : je n'ai même pas réussi à découvrir où il habitait. Mais ce n'est qu'une question de temps. »

Lettre du Pr Tito Prosov, non datée, destinataire inconnue

Deathman buvait un verre à la terrasse du Picket's. Autour de lui, les conversations des habitués le berçaient doucement et faisaient remonter des souvenirs. Stéphanie et lui étaient partis en Corée du Nord pour leur lune de miel. Il se remémorait la croisière. Il avait tenté de balancer sa femme par-dessus bord tandis qu'elle essayait vainement de le poignarder dans le dos. Ils avaient été prudents. Quiconque les aurait vus à ce moment aurait cru qu'ils étaient en train de s'embrasser. Le voyage s'était plutôt bien passé même si, à leur retour, tout le monde avait été surpris de le voir lui en béquilles, et elle en fauteuil roulant. Ils avaient d'ailleurs eu bien du mal à l'expliquer.

Un mois plus tard, tous deux étaient parfaitement rétablis. Deathman se souvenait de ce jour où, en rentrant du travail, Stéphanie lui avait proposé de boire du thé ensemble. Il avait accepté, se doutant bien qu'elle essaierait de l'empoisonner. Il avait profité d'un moment d'inattention de la part de sa compagne pour intervertir les tasses. Mais Stéphanie l'avait entendu et ne but pas. A un moment, il était allé aux toilettes, puis sa femme était partie chercher du sucre, puis lui du lait ... Aucun des deux ne portait sa tasse à ses lèvres, elles avaient été inversées tant de fois ! Ce petit jeu dura une heure. Puis ils décidèrent de boire. La conversation qui s'engagea quand ils reposèrent les tasses valait la peine d'être entendue :

« Je les ai interverties trente-huit fois, annonça Stéphanie.

- Et moi quarante-et-une, répondit Deathman.

- Ah ! C'est moi qui l'ai bu ! soupira alors Stéphanie. »

Et elle avala alors l'antidote qu'elle avait dans sa poche.

Oui, songeait Deathman, tout était simple à cette époque. Le bon vieux temps. Le bruit régulier de la circulation le faisait somnoler. Autour de lui, les gens passaient. Les mouettes volaient et criaient. Les gens parlaient. Les iguanodons de service hululaient. Les gens mouraient. Fauchés par le crépitement caractéristique d'un pistolet mitrailleur de gros calibre. Avec une réactivité extraordinaire, Deathman se redressa, vit la voiture de laquelle dépassait l'arme, repéra chaque balle susceptible de l'atteindre, lança sur chacune d'elles une bouteille d'eau minérale parfumée à la carotte, dégoupilla une grenade, fit exploser la voiture puis s'aperçut que son verre avait été transpercé et que sa précieuse bière s'épandait sur le sol. Il soupira, lécha la table, regarda les cadavres des clients du bar et des passants tout autour de lui et partit sans payer. Il avait à faire. Il voulait tout d'abord rencontrer quelques tueurs à gages, puis passer au surplus militaire. Il trouverait bien quelque chose. Ah ... Tout était tellement plus simple avant ... Avant ...

Le Docteur et l'ImpératriceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant