Chapitre 11 - Le nain-qui-ne-peut-être et la porte de rien

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« Annexe I : Très important, très confidentiel. Tous ceux qui pourraient, à un moment ou un autre, s'opposer au bon déroulement du Protocole doivent impérativement être éliminés. Cela comprend : tous ceux qui résistent aux agents délégués par les différents points du Protocole (sous réserve des précisions apportées dans lesdits points), mais également tous ceux qui seraient susceptibles d'apporter aux autorités une aide conséquente à la suite d'une opération illégale ordonnée par le Protocole. Dans cette optique, les mesures suivantes devront [...] »

Andrej Deathman, Protocole Secret pour la Conquête du Monde

L'amiral-chef premier superintendant de police Albus Kionet était en chemin pour aller interroger la voisine de la victime, qui répondait au nom de Paulette John. Tout à coup, une sensation étrange autant que doucereuse l'envahit (un peu comme s'il était en train de manger un dodo en chevauchant un éléphant, ou plutôt comme s'il faisait du patin à glace à la vanille sur le dos). Puis, la sensation s'évanouit, et le bonhomme de neige reprit sa route.

Lorsqu'il arriva devant le domicile de la bien nommée Paulette John, il se rendit compte qu'il avait commis une grave méprise : la porte de la maison était de couleur verte, et non bleue comme il l'avait dans un premier temps supposé. La première chose que fit Albus Kionet en sortant de sa voiture fut de redresser la carotte qui lui servait de nez : il voulait donner bonne impression.

* * *

Paulette John était une femme fort aimable quoique légèrement excentrique, vêtue d'une simple mais très enveloppante chaussette noire (Paulette John devait par la suite révolutionner le monde de la mode ; mais ceci est une autre histoire). Titulaire d'un BTS aquarium, elle était devenue Disc-jockey en structures métalliques aux Studios Blabla Production mais rêvait d'aller au Japon pour y enseigner la philosophie à des requins amateurs de claquettes dans un aquarium géant. Accessoirement, elle souffrait de troubles dissociatifs de l'identité et présentait trois personnalités distinctes. Le fait qu'elle se transformait la nuit en super-héroïne justicière n'arrangeait d'ailleurs pas les choses. Pour finir, ajoutons simplement qu'elle parlait chinois couramment et qu'elle pénétrait secrètement chaque nuit dans des établissements scolaires pour y dessiner sur les tableaux.

Paulette John, une fois qu'elle eut infructueusement tenté de se jeter par la fenêtre (laquelle refusa de la laisser passer de peur d'être éclaboussée par le sang), s'avéra être une véritable mine d'informations sur tous les ragots inutiles qui ne concernaient en aucun cas le pauvre Albus Kionet. Quand soudain Paulette John s'en aperçut, elle tenta, gênée, de s'éclipser en prétextant qu'elle devait détruire des photographies, mais la ruse ne prit pas et l'amiral-chef premier superintendant partit par la fenêtre (qui le laissa passer, lui, car il était poli, lui), outré.

Et c'est par ladite fenêtre de son salon que Paulette John regarda partir le policier. Elle était vaguement déçue car elle trouvait les bonhommes de neige extrêmement mignons. Mais elle se ressaisit rapidement, et s'apprêtait à préparer son diner lorsque quelqu'un frappa de nouveau à la porte. C'était Michèle Psi, la meilleure amie de Paulette John.

« Paulette ! Quelle bonne surprise ! » s'exclama Michèle Psi en pénétrant dans le vestibule.

Et elles s'installèrent dans le salon.

« Ah ! s'écria Michèle Psi en marchant dans une flaque d'eau. Que se passe-t-il ? Tu as des fuites chez toi ?

- Non, répondit la maitresse de maison, mais il y a un bonhomme de neige très craquant qui est venu. Tu l'as raté de peu : il vient de sortir.

Le Docteur et l'ImpératriceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant