Entre deux vols

CHAPITRE 15

Jeanne chez le tatoueur c'était une drôle d'histoire une fois encore. Lorsqu'elle était entrée dans le studio de tatouages, elle connaissait tous les employés et même le patron. Elle m'avait bien dit qu'une partie de ses tatouages avaient été réalisés ici, mais encore une fois, je ne m'attendais pas à ce qu'elle connaisse si bien les gens. La voir dans son élément était si nouveau pour moi. Elle qui semblait si calme au bureau... Elle était différente ici. 

Une fois qu'elle eut fini de raconter ses péripéties françaises et les raisons de son retour, la jeune fille, dont le nom m'a échappé depuis que nous avons été présentés, nous a pris en charge. Nous avons chacun notre tour choisi la typo de notre tatouage. Et le plus compliqué fut de choisir l'emplacement.

- Alors Jeanne, tu le veux où celui-ci ? Commença la jeune apprentie ;

- Je ne sais pas trop. Je souhaitais rester sur le même côté, qu'il soit visible mais à la fois discret.

- Que penses-tu de la cheville ? Cela risque d'être douloureux, mais c'est un petit tatouage, ça va aller vite à faire.

- Ouais la cheville c'est une bonne idée. Tu peux le faire tourner autour du péroné ?

L'apprentie se leva sans dire un mot avec l'appareil photo, Jeanne comprit immédiatement ce qu'elle avait à faire. Elle se leva, montra sa cheville et en quelques secondes, la photo apparut sur l'écran de l'ordinateur. En quelques clics, mon prénom était affiché sur la cheville de mon assistante. Cette scène était complètement surréaliste mais en observant Jeanne, je me rendis compte qu'elle n'avait pas une once d'inquiétude face à ce coup de tête. La voir si déterminée me donnait du courage, parce que je devais aussi y passer, il ne fallait pas l'oublier. Tout le temps que j'étais dans mes pensées, Jeanne avait validé la position de son nouveau tatouage.

- Et toi, tu sais où tu le veux ?

- On va pousser l'idée à son paroxysme, je vais faire la même chose que Jeanne.

- Tu es sûr ? Ca va faire mal à cet endroit, tu sais... me coupa cette dernière.

- Oui, oui, je trouve l'emplacement très original en fait. Et ça ne va pas durer des heures, je peux encaisser un peu la douleur.

- Ok, si tu veux ! me répondit-elle mi-incrédule, mi-moqueuse.

Le temps de cet échange, la photo de ma cheville était sur l'écran aussi et la jeune thaïlandaise s'affairait à placer le prénom comme il le fallait. Une fois que nos projets étaient finalisés et imprimés, nous avions à attendre cinq minutes avant de nous installer. Jeanne sortit fumer une clope et je l'accompagnais. Elle avait un air sérieux et détaché. C'était la première fois que je la voyais sous cet angle. Au boulot, elle était sérieuse et impliqué. C'était différent ce jour là.

- Tu vas bien ? Lui demandais-je

- Oui, oui. Je suis toujours comme ça avant de me faire tatouer.

- Ouais mais ce coup-ci, c'est un prénom, mon prénom, c'est un peu plus qu'un simple tatouage. Tu sais, si tu veux faire autre chose, je peux le comprendre.

- Oh non, ne te bile pas. Je n'ai aucun problème avec le fait de me faire tatouer ton prénom. Tous mes tatouages sont une partie de mon histoire. Et vu que tu n'es pas juste mon patron, tu fais donc partie de mon histoire aussi.

- Vu comme ça...

- Ouais et au pire, si un jour tu fais le connard, je pourrais toujours faire recouvrir ton prénom. Ce n'est pas un soucis.

A l'entente de sa dernière phrase, je m'approchai d'elle pour pouvoir capter son regard.

- Ne t'inquiète pas pour ça, je n'ai pas envie de faire le connard avec toi.