9 - Ange déchu

3K 346 387
                                    

Dans ce chapitre, les éléments utiles à l'enquête seront mis en gras. 



C'était comme si une brume épaisse m'entourait. Je n'entendis pas les gens qui arrivaient dans la pièce ; le cri aigu de Mary ni celui de Jean. Mon monde s'écroulait. Et mes yeux plantés sur le sol refusaient catégoriquement de bouger, ils ne voulaient pas revoir cette image immonde du cadavre de Kitty. Les larmes ne s'arrêtaient pas de couler. J'avais l'impression d'être condamné à pleurer jusqu'à la mort. Mais que pouvais-je faire de plus ?
Je sentis des mains sur mes épaules. Quelqu'un répétait mon nom, mais je m'en foutais. Pourquoi je ne me réveillais pas ? C'était bien un rêve, non ? Un affreux cauchemar duquel j'allais me sortir. Il le fallait. Et je me réveillerai dans les bras de Kitty, les joues brûlantes s'il le faut, mais heureux.
Je voulais mourir.
Les mains se glissèrent sous mes aisselles et me soulevèrent du sol. Dans un état second, je ne résistai même pas. Mon corps se plia en deux lorsqu'on me pencha au-dessus d'une cuvette. 

- Vas-y, tu peux vomir, me parvint la voix de Ben. 

Sans que je ne m'en rende compte, ma gorge se mit à brûler, et je me vidai du peu de choses que j'avais réussi à avaler le matin.
Je me redressai, et m'essuyai le visage avec ma manche. Ben, les larmes aux yeux, détourna le regard. Il paraissait lui aussi dévasté par la nouvelle. Il devait s'en vouloir, aussi. Tout comme moi... nous étions juste à côté de notre amie, à quelques mètres à peine de la scène du crime ! Et si je ne m'étais pas endormi... 

- T'y es pour rien, fit Ben d'une voix chancelante. C'est le coupable qu'il faut blâmer. 

Je reniflai, ressentant soudain un froid immense. La pièce devenait morbide ; un cercueil disproportionné pour un ange déchu. Kitty... je me répétai en boucle ses dernières paroles. « Je reviens vite. Promis ». La vie pouvait se montrer si ironique... Elle qui était la première à militer pour la cohésion, elle qui se donnait corps et âme pour que nous nous entendions bien... Et c'était la première à mourir. Des mains de l'une des personnes qu'elle considérait déjà comme ses amis.
C'était dans sa nature, de faire confiance. Sa flamme en témoignait. Chaque jour, malgré l'absence d'Atlan, malgré les caractères difficiles des autres, malgré mon incapacité à faire quoi que ce soit. Elle se persuadait de notre fiabilité. Elle se forçait à ne voir que le meilleur de ses camarades. Et ça... ça lui avait coûté la vie.


Le cœur au bord des lèvres, je demeurais incapable de prononcer le moindre mot. Je voulais juste retourner dans ma chambre, me recroqueviller sur mon lit, et ne plus jamais m'en décoller. Mes jambes me portèrent, titubantes, jusqu'à la porte. Un bras se plaça en travers de l'encadrement, entravant ma progression.

- Où est ce que tu vas ? me lança Atlan. 

Le brun me fixait, mais même son regard polaire ne m'atteignit pas. Je me sentais vide. Avec des mouvements robotiques, je tentai de passer en force, mais mon interlocuteur me saisit par le bras et me tourna dans sa direction. J'évitai soigneusement ses yeux. 

- Tu ne vas nulle part. 

Atlan, de son autre main, attrapa ma mâchoire de part et d'autre et me força à le regarder. Il rapprocha son visage du mien ; si proche que je pus sentir l'odeur du tabac imprégnée sur son t-shirt.

- Vu les circonstances, tu es le suspect numéro un, murmura-t-il. 

- Qu... Quoi ?

Ma voix ressemblait à un couinement de souris. 

MURDER PARTY (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant