J'ai beau chercher au plus profond de mes souvenirs, je ne pense pas avoir déjà ressenti la solitude, la vraie. Du moins, pas aussi pure que celle qui m'entoure en ce moment. Je soupire.
Mon regard remonte en direction du mur qui me fait face. Le blanc éclatant est rayé de minuscules barres. Haha, j'ai arrêté de compter après avoir dépassé les cent. A quoi bon ? Ces chiffres n'ont aucune importance si je n'ai personne à qui les partager. Je pourrais bien compter chaque journée jusqu'à ma mort, ça ne changera rien. Je me fous bien de savoir le nombre de jours que je survivrai. Cent, trois cent, mille ou plus encore ; le résultat sera le même.
Je me suis déjà senti seul auparavant. Incompris. Abandonné. Mais ces termes-là ne sont qu'une poussière face au désert que représente mon ressenti actuel. Il n'y a rien de vivant, dans cette pièce. Quatre murs blancs, si blancs qu'ils me font presque mal aux yeux. Un lit, un bureau et une chaise. Une minuscule fenêtre bloquée par des barreaux me laisse entrevoir un morceau de ciel si je grimpe sur ladite chaise. Une porte coulissante donne accès à des toilettes et un lavabo. C'est tout. Mes repas descendent par une trappe deux fois par jour. Il n'y a rien d'autre. Rien d'autre que le silence.
Le silence, je l'ai connu calme et reposant. Désormais, il est ma plus grande angoisse. Je ne peux rien faire pour l'esquiver. Il m'entoure chaque seconde, me rappelant un peu plus ma situation. Les battements de mon propre cœur me font sursauter. Je deviens parano, je le sais.
Je n'ai pas parlé depuis des jours. Au départ, lorsqu'on m'a enfermé ici, j'ai tenté de me rebeller. De ne pas céder à la folie évidente dans laquelle ils espéraient m'entraîner. J'appelais Bianca de toutes mes forces, en espérant que, où qu'elle se trouve, elle puisse entendre ma voix. Quel abruti je fais. Le pire, c'est que j'y ai vraiment cru. Bien sûr, au fond, je sais à quel point toute tentative de contre-attaque est inutile. Tous mes amis sont morts, et Bianca a disparu.
Les premiers jours ont été les plus difficiles. J'ai cherché sans relâche un moyen de m'échapper ; après tout, j'ai l'habitude de me sortir de situations délicates. Quand je me suis résolu à mon sort, c'est là que la véritable solitude a commencé à m'envelopper. Chaque nuit était un calvaire, mais les journées étaient pires. Le silence, ce silence me rendait fou. Et puis j'ai fini par m'y faire. Je crois. Aujourd'hui, ce n'est plus qu'une routine.
Il n'y a rien d'autre à faire que penser. Penser en permanence. Penser jusqu'à l'épuisement. Les paroles de Jean tournent en boucle dans mon esprit. Aucun moyen de m'en défaire, c'est juste la même rengaine, un peu plus violente chaque jour. Je les ai tous tués.
La culpabilité est un poison lent et sournois. Elle me ronge, me pourrit de l'intérieur, et il n'y a pas d'antidote. Je repense à tout le monde. Je le sais, maintenant. Je suis le seul et l'unique responsable de cette tuerie. Me retrouver seul face à mes pensées m'a ouvert les yeux sur qui j'étais vraiment. Un monstre.
Dès le départ j'aurais pu éviter ça. Mais voilà, j'étais persuadé de pouvoir me débrouiller seul. De pouvoir arrêter cette folie par moi-même. Alors quand j'ai vu toutes les preuves accablant Flora dans mon enveloppe, j'ai pas réfléchi. Je pensais qu'en la forçant à révéler sa véritable nature, tout serait réglé. Ah, au fond, j'étais peut-être le plus naïf d'entre tous. C'est comme ça que tout a commencé.
Si je n'étais pas descendu au sous-sol, en prenant soin d'y attirer Flora, Kitty ne serait pas morte.
Si j'avais directement arrêté Bianca plutôt que de vouloir régler cette affaire par moi-même, Mary aurait été épargnée. Si j'étais sorti de ma chambre pour accuser Emiliana de m'avoir enfermé, Leeloo serait encore de ce monde.
VOUS LISEZ
MURDER PARTY (terminée)
Mystère / Thriller« Si vous voulez sortir d'ici, il vous suffit simplement de commettre un meurtre. » Telles furent les paroles d'Hologramme, le terrifiant maître du jeu. Caleb ne se souvient de rien. Lorsqu'il se réveille dans un endroit inconnu, il met un moment à...