Atlan était adossé au mur, bras croisés et cigarette au coin des lèvres. Son regard planté dans l'horizon brumeux de la zone ne laissait paraître aucune émotion. Dès que je fus assez proche, il me saisit le bras sans un mot et me tira vers l'arrière du bâtiment. Il me fit éteindre la lampe de poche. J'ouvris la bouche pour le questionner, mais il plaqua sa main sur mon visage. Elle me parut brûlante au contact. Il stressait. Ses yeux, seulement éclairés par la lueur de la lune, cherchaient quelque chose dans l'obscurité. Atlan gardait sa sempiternelle expression neutre, mais les détails dans son comportement confirmèrent mon hypothèse : il avait peur de quelque chose. Ou de quelqu'un. J'avais froid. Le vent soufflait, soulevant son pesant de craintes. Je regrettai de ne pas avoir pris la veste d'Atlan.
Après un moment qui me parut une éternité, le brun entama à mi-voix :- Ecoute, j'ai pas beaucoup de temps.
- Qu-quoi ?
Il recolla sa main, non sans me darder un regard glacial. J'avais parlé trop fort, conte tenu des précautions prises pour rester discrets. Mais ces mots... ils pouvaient avoir tants de sens que je m'étais tout de suite inquiété. Atlan regarda à nouveau aux alentours. Ses doigts frémirent.
- Laisse-moi finir. ( sa voix déclina un peu plus, transformée en un murmure presque inaudible ) Hier, j'ai vu que le donjon était ouvert. J'y ai découvert... des choses. ( il soupira ) Je ne peux pas t'en parler tout de suite ; il me faut encore des preuves.
Je ne comprenais rien à son discours, mais je gardai le silence. Le brun semblait vraiment préoccupé, et, à chaque phrase, se retournait nerveusement. Il crispa sa mâchoire quelques instants ; il réfléchissait à ses prochaines paroles.
- Depuis quelques temps, j'ai l'impression... d'être observé. Pas tout le temps, mais surtout le soir, quand on se retrouve sur le banc. Et avec ce que j'ai pu apprendre dans le donjon...
Il jeta un nouveau coup d'œil circulaire. Puis, sans prévenir, il se rapprocha pour me glisser à l'oreille d'une seule traite :
- Il y a un traître parmi nous. Ne me demande pas qui, ne me demande pas pourquoi, mais quelqu'un est là pour nous faire respecter les règles en bonne et due forme.
- Un traître ? soufflai-je d'une voix blanche. Mais nous ne sommes que douze... ça voudrait dire que...
- Réfléchis. Hologramme est intangible. Il ne peut rien contre nous. Plusieurs éléments confirment ma théorie. Alors, fais gaffe. ( il recula et esquissa un sourire ) Tu te souviens de ce que je t'ai dit, le premier soir ?
Je tentai de réfléchir mais mon cerveau était trop occupé à faire défiler les visages de mes camarades. Un traître, vraiment ? Quelqu'un pouvait-il vraiment tirer les ficelles de ce jeu sordide ? Il fallait être fou... Et puis, à en croire leurs réactions lorsque l'un de nos amis perdait la vie... Je ne pouvais imaginer que quelqu'un jouait la comédie depuis le premier jour. Une douleur naquit au creux de mon estomac. Je me refusais de soupçonner mes amis, et pourtant, mon esprit se portait de lui-même vers de potentiels suspects. Mais au final... il n'y avait que des potentiels suspects. Ma respiration s'accéléra. Non ; j'allais devoir me méfier de tout le monde. Tout le monde. Ben, Capucine, Yukie... Tout le monde. Je ne voulais pas avoir à faire ça. Après les meurtres, maintenant, il fallait douter des autres ; pas simplement des potentiels assassins ? J'en avais assez, d'être stressé en permanence.
Je me rendis compte qu'Atlan me fixait toujours, le visage éclairé par une expression radoucie. Il attendait ma réponse. J'avais mis du temps à réagir, mais bien sûr que je me souvenais de ce qu'il m'avait dit le premier jour. Comment aurais-je pu oublier cette phrase ?
VOUS LISEZ
MURDER PARTY (terminée)
Misteri / Thriller« Si vous voulez sortir d'ici, il vous suffit simplement de commettre un meurtre. » Telles furent les paroles d'Hologramme, le terrifiant maître du jeu. Caleb ne se souvient de rien. Lorsqu'il se réveille dans un endroit inconnu, il met un moment à...