Alyana (Chapitre 6)

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Lorsqu'elle poussa une porte de bois grinçante, elle se sentit aussitôt un peu soulagée, comme si quelqu'un avait enlevée une partie du poids invisible qui pesait sur sa poitrine.

Cette pièce était son domaine, le seul où elle pouvait être en paix elle-même.

Elle fit quelques pas dans la chambre vétuste et laissa la porte se refermer derrière elle. Quelques années auparavant cette petite salle avait été une loge et il en restait une grande coiffeuse à la vitre fendue qui occupait la majeure partie du mur de droite.

À gauche, une couchette de fer un peu rouillée était fixée au mur et, en face de la porte, il y avait un petit meuble à tiroir ou Alyana pouvait ranger ses maigres possessions.

Elle se dirigea vers celui ci et déposa avec des précautions exagérées son beau violon, avant de venir s'allonger sans prendre le temps de se changer sur sa couchette.

L'adolescente n'avait pas allumé la lumière et il faisait noir dans la pièce, sans que cela finisse d'apaiser son âme tourmentée.

Elle ferma les yeux, basculant dans un lourd sommeil peuplé de cauchemars et de souvenirs de sa vie d'avant.

***
1 an et deux mois plus tôt.

— Salut Ryan ! cria la jeune fille en sautant brusquement au cou du jeune homme qui venait d'entrer dans le salon.

Son frère aîné lui adressa un grand sourire, la serrant dans ses bras avant de la relâcher.

— Ça va comment petite sœur ?

Elle haussa les épaules avec un soupir, maussade.

— Comme d'habitude je dirais.

Alyana l'entraîna ensuite vers l'un des trois canapés du luxueux salon et ils s'y assirent, face à une table de verre surmontée d'un plateau de pâtisseries que l'un de leurs serviteurs venait d'apporter. Au petit doigt de la main gauche de la jeune femme brillait une chevalière élégante et féminine, portant les mêmes motifs que celle de son frère.

— Alya... reprit celui ci d'un ton très différent, assombri visiblement par un soucis.

Elle redressa vivement la tête et tout sourire quitta son visage.

— Non, rien n'a changé depuis ta dernière visite, répondit-elle en devançant sa question. Je n'arrive toujours pas à me métamorphoser en mutant... Je sais bien que je suis la honte de la famille, mais il n'y a rien à faire, je ne suis pas porteuse du gène ou il y a quelque chose qui ne va pas chez moi.

Koryan paraissait tendu, à bout de nerfs, ce qui était visible pour l'adolescente qui n'était déjà plus à la joie des retrouvailles. Lorsque sa famille avait découvert à ses cinq ans qu'elle était infirme – ne pouvait pas se métamorphoser en loup – elle avait aussitôt été envoyée dans l'un de leurs châteaux à la campagne. Le but était de la faire oublier du monde, en attendant qu'elle développe sa mutation.

Hélas, ce jour n'était jamais venu. Un goût de cendre envahit la bouche d'Alyana qui s'efforça de retrouver son sourire sans y parvenir.

Son frère passa alors une main dans ses longs cheveux noirs détachés avant de se tourner de nouveau vers elle et lui faire face.

— Tu ne comprends pas... Personne ne peut appartenir à l'élite d'Astra avec un handicap comme le tien.

Elle ne comprit pas ce qu'il voulait dire. Alyana était princesse astrayenne, nièce de l'empereur le plus puissant de la galaxie, et il osait lui dire qu'elle ne faisait pas partie de la haute société ?

— Grand frère...

— Attends, laisse moi t'expliquer, la coupa-t-il abruptement. La plèbe des petits niveaux des tours a entendu parler de ton cas... Tu es une simple humaine, comme eux. Ils se servent de toi pour réclamer nos privilèges, ils sont même allés menacer Papa. Un député du bas fond a fait honte à notre famille en mentionnant la fille infirme de Tancrède et Myriam Astra. Tu imagines la fureur des parents ?

Oméga T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant