15 - Dans les bras du grand nounours

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Jeudi après-midi, Philomène, assise sur le trottoir, le menton posé sur la paume de sa main, écoutait, le sourire aux lèvres, Lloyd parler de sa première scène devant un public.

Il avait treize ans et c'était dans un pub que son grand-frère côtoyait. À cette époque, il n'était pas le grand gaillard qu'il était désormais. Autrefois, il n'était qu'un adolescent maigrichon qui manquait de confiance en lui et se cachait derrière sa guitare ainsi que ses lunettes. Pourtant, même si quelques personnes l'avaient hué parce qu'il avait rencontré un soucis avec son micro, il avait réussi sa prestation et dès l'instant qu'il avait ouvert la bouche, les gens s'étaient tus. Parce que Lloyd avait un talent assez rare, celui de faire chavirer les cœurs rien qu'avec sa voix. Une note suffisait à nous faire quitter le terre pour que l'on s'envole, non pas au milieu des nuages mais bien plus loin encore, dans la galaxie.

— J'ai la voix qui tremblait. Mais c'est Radiohead, mon préféré groupe que je chantais alors je me disais que je dois faire pas d'erreur.

— Est-ce que tu me la chanteras un jour ?

Philomène imaginait la voix de Lloyd sur le morceau et fondait déjà. Il faudrait qu'elle l'enregistre un jour, question de pouvoir le mettre en sonnerie de téléphone et de réveil.

— Hum... maybe yes, répondit-il en lui adressant un sourire.

Sans même s'en rendre compte, elle le lui rendit, encore plus éclatant que le sien.

— Tu n'as pas énormément parlé de ta famille...

Elle avait envie de tout connaître de lui. Parce que Lloyd avait beaucoup de choses à partager, au-delà même de leurs différences de culture.

— Je connais pas mon père. Il a mort avant ma naissance. Mais Lewis a connu lui parce qu'il a cinq ans de plus. Ma mère est hum... a maid. Nous ne sommes jamais riches, malgré tout, nous sommes heureux. Parce que nous savons l'argent ne fait pas tout. Nous habitons une petite maison pas loin d'une petite parc. Lewis travaille dans le... hum masonry. Il fait beaucoup d'heures de plus mais il a arrêté yesterday car il a que notre mère était malade. Plus que d'habitude.

La jeune femme sentit son corps se figer. Elle ne savait pas vraiment quoi répondre. Lloyd ne semblait pas avoir eu une vie facile. Alors qu'elle se plaignait souvent, des disputes de ses parents par exemple, le british lui, n'avait jamais eu la chance de rencontrer son père. Pourtant, il ne semblait pas vraiment en faire toute une histoire.

Ce constat acheva de rendre la blonde admirative. Il était une source d'inspiration, une source de motivation pour son changement personnelle.

— Et tu es inquiet pour elle, compléta Philomène tandis que le visage de Lloyd perdait de son éclat.

Il soupira puis comme à son habitude, se mordit les lèvres. La jeune femme eut envie de le prendre dans les bras. Mais elle n'osa pas. Ils avaient beau avoir parlé à de nombreuses reprises et s'être rapprochés, Philomène n'arrivait pas à savoir ce qu'elle pouvait se permettre ou pas à ce stade. Autrefois, elle ne se serait même pas posé la question. Mais désormais, tout semblait différent.

— Un peu... Elle est fragile, souffla-t-il.

Sa voix était noyée sous l'émotion. Philomène avait compris depuis quelque temps que Lloyd était un bon fils qui se souciait de sa famille. Elle se doutait qu'il était du genre à travailler pour soulager sa mère.

Depuis qu'elle avait commencé à discuter avec l'anglais, elle prenait conscience de ses défauts et des erreurs qu'elle avait faites jusqu'à maintenant. Mia avait raison, c'est comme si Lloyd l'aidait à devenir une meilleure personne. Bien que c'était parfois vexant et surtout déstabilisant, elle trouva tout de même cela bien. Sa meilleure amie avait dit vrai, elle grandissait et elle changeait. Et elle en était fière.

Quel phénomène cette Philomène 1 (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant