Pierre s'était mis à la même place que quand le Docteur Hoffman l'avait accompagné il y a quelques heures déjà. Son corps, fatigué par la route et surtout harassé par la pression de ces dernières heures l'avait forcé à dormir, bien qu'une poignée d'heures après une infirmière l'avait réveillé en lui rappelant qu'il ne pouvait pas dormir ici.
"Une diode sur la nuque... le monde a bien changé entre ma jeunesse et maintenant. Avant, on fantasmait sur les filles en tenues d'infirmière. Maintenant ce ne sont plus que des machines métalliques à l'apparence humaine. L'apparence... ils n'ont que ça d'humain à vraie dire. Dénuées d'émotions et dénuées de sensations. J'ai presque pitié de leur condition..."
Devant un membre du personnel de jour, une humaine cette fois, Pierre commença à engager la conversation,
- Vous faites depuis longtemps ce métier ? C'est épuisant j'imagine...
- Quatre ans dans quelques mois. Et oui clairement, c'est exténuant, cependant tenter de sauver des vies est bien gratifiant.
- Mm, oui. Surtout les jeunes vies... de ce que j'ai vu, dans le bloc des urgences, des familles attendaient, à priori leurs enfants.
- Oui, il y a beaucoup d'ados et de jeunes adultes se retrouvant blessés. Rien qu'hier nous avons ramené deux ados, l'un dans un état stable, l'autre aggravé. Le pauvre...
- Vous avez du vous occuper de ce dernier non ? Pour parler de cette façon, dit-il en essayant de ne pas trahir son intérêt. Il avait compris qu'elle parlait de son fils.
- Oui... c'est bien la première fois que je vois un jeune dans cet état. Le pauvre, si jeune... il a à peine seize ans. Je dois aller lui changer ses bandages, il est dans un coma artificiel. Je dois vous laisser, vous devez sûrement avoir quelqu'un à rendre visite.
"Je ne te le fais pas dire..."
- Courage. Et oui, mon vieux crouton de père. Mais bon, comme d'habitude, il va s'en sortir ! clama t-il faussement joyeux.
L'infirmière partit avec une table roulante. Pierre la suivit discrètement du regard tout en imitant quelqu'un recevant un appel.
"Avant dernière chambre de l'aile gauche... côté droit."
Une petite heure passa, le père jouait à un jeu sur mobile afin de tuer le temps. Ou alors à tuer ses pensées, s'échapper un petit moment hors de l'inquiétude et de la pression. Du coin de l'œil, il scruta la même infirmière, faisant le chemin inverse. Elle entra dans l'ascenseur. A peine les portes fermées, il se leva d'un bond et se dirigea rapidement -tout en étant un minimum discret- vers l'aile gauche. Plus il s'approchait de cette fameuse porte, plus son cœur battait la chamade.
Dix mètres... huit... cinq.
Il s'arrêta, pris d'une hésitation sans mesure. Devait-il aller le voir au risque de se détruire psychologiquement ? Ou devait-il avancer, mettre ses appréhensions de côté, afin de "s'assurer" de son état ?
"C'est maintenant ou jamais. Ton fils a besoin de toi maintenant et plus qu'à n'importe quel moment."
Le paternel arriva devant la porte, dressée comme épreuve. Il posa sa main sur la poignée, le cœur prêt à rompre à tout moment. Il actionna lentement la poignée, fermant les yeux. Peur d'affronter la réalité ? Ou peur d'affronter ses peurs ? Mais après tout, ses peurs pouvaient bien être réelles, et la réalité fondant ses peurs.
Toujours les yeux fermés, il distingua un son distinct. L'électrocardiogramme. Il bipait à fréquence régulière. "Bon signe" se dit-il.
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Androhumain : L'homme électrique peut-il rêver ? [PAUSE]
خيال علميParis, 2045. En 1980, nous pensions qu'en 2010, les voitures léviteraient à ras du sol. En 2010, nous pensions qu'en 2040, les voitures voleraient dans le ciel. Eh bien sachez-le, nous en sommes encore loin. Certes, la technologie a avancé, nous av...