Prequel [3] : Mon quotidien d'humain

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J'étais le plus commun des communs des mortels. Vivant dans une famille plutôt juste financièrement, mon père avait travaillé jours et nuits afin que je puisse aller dans un lycée privé réputé, "Le prestige amène à la voie royale" qu'il disait. Tout ce que je voyais moi, dans ce lycée à cinq milles euros l'année, c'était des fils à papa avec des montres connectées valant au moins le tarif de scolarité de ce même lycée, et des filles se tartinant de maquillages valant tout autant que ces montres. D'accord, j'exagère peut-être, mais l'idée est là. Mais il ne faut pas généraliser, cela serait une erreur assez aberrante à mon humble avis. Après tout j'ai réussi à dégoter Danzo, Émilie, Justine et Alexandre, des personnes tout à fait normales... enfin oubliez ce que je viens de dire pour la dernière de ces personnes, lui il est à moitié normal.

Qui dit lycée, dit réputation à tenir, et cela n'échappait à personne. J'étais un élève discret dans le bataillon, le soldat inconnu dans le lycée, c'était moi. Je ne représentais que le lycéen lambda et personne à la fois. Je n'embêtai personne, faisant ma petite vie à côté des autres. Se réveiller le matin tôt, prendre le métro en écoutant Pink Floyd ou Overload, groupe de rock qui a fait sensation au début de cette année, de l'électro-jazz, passer son smartphone sur la borne, la porte automatique s'ouvre, attendre le métro, rentrer dedans, crever de chaud (la ligne 8 n'a toujours pas de climatisation...). Et arriver au lycée. Lycée privé Saint Supplice, ils n'avaient pas tort de donner ce nom. Les cours étaient, pour ma part, redondants, ennuyeux. Je voulais à tout prix m'échapper de ce lieu. Avec ou sans les autres.

***

Nous commencions par la physique-chimie, Danzo se mit à la même table que moi. Sortant une paire de branches de lunettes, légère compression sur la branche droite, un écran solide encadra mes yeux. le thème d'aujourd'hui était la création d'un hologramme et la modélisation de ce dernier. L'imagination architecturale n'étant pas mon point fort, je délaissai cette réflexion à mon camarade, pour ma part je préparai le matériel. Chaque groupe devait faire son propre écran de projection, pour cela le matériel était à disposition. A la fin de ce travail pratique, qui ne l'était pas, soyons honnête, nous parvînmes, Danzo et moi, à reproduire le buste d'un androïde, le tout par quinze centimètres de côté. Ce buste, imaginé par mon ami japonais, nous valut un 16/20.

Ce fut au tour de Madame Turline, avec son cours de français. Analyse de la plume de Maupassant. La littérature n'était pas mon fort, ni mon intérêt. Une citation de Maupassant, "Un baiser légal ne vaut jamais un baisé volé". Merci Maupassant, la seule chose volée ici, ce sont mes trois heures de vie, perdues à jamais, ces trois heures qui s'écoulèrent tel un châtiment divin, ou plutôt un séjour en enfer endormant.

Midi, enfin. Je n'attendais que cela. Assis à une table du réfectoire, je fus rejoint par Danzo et les autres peu de temps après. Au menu, une purée datant d'il y a quelques années, au bas mot, et une semelle dénommée "steak haché".

- Turline... cette femme est un somnifère sur pattes, intervint Alexandre

- Comment peux-tu le savoir, vu que tu dormais, demandai-je.

Émilie éclata de rire, suivi de Danzo qui renchérit.

- Tu l'aurais vu ! Il dormait les poings fermés, un vrai bébé ! Il n'a même pas entendu la prof lui hurler dessus !

- Par ailleurs vous avez vu les infos ? Les Russes ont déclaré qu'une partie de la Lune leur appartenait...

- Une belle connerie selon moi, déclara Alexandre. Ils font ça uniquement pour montrer qu'ils en ont une grosse. Comme pour montrer une vérité inexistante dans sa phrase, il mit sa main sur son entrejambe et tapota dessus

Androhumain : L'homme électrique peut-il rêver ? [PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant