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  - Hey, ma jolie future River Vixen, comment vas-tu, ce matin ?

  L'accueil d'Archie la fit sourire, mais elle ignorait comment répondre à sa question. Elle était toujours chamboulée par la visite qu'elle avait rendue à son père, en prison. En plus, elle s'était rendue à la banque, pour vérifier ses dires : il ne mentait pas. Le montant sur le compte au nom d'Elyana Jane Bennet s'élevait à précisément 4,325,627 $. Elle savait que sa grand-mère maternelle était une femme d'affaires réputée. En plus d'avoir hérité de la fortune de ses parents, l'ayant eux-mêmes héritées des leurs, elle avait mis du côté le plus d'argent possible. Elle avait tout légué à ses deux petites-filles. Alors, au décès de l'aînée, Tori, la mère de la jeune fille avait pris les dispositions nécessaires pour tout transférer sur le compte d'Elyana.

  - C'est compliqué, je t'expliquerai plus tard, d'accord ?

  - Sans problème.

  Le garçon l'embrassa tendrement, sur le canapé du foyer de Riverdale High, quand Betty reçu un coup de fil. Ils devinrent tous très sérieux face à l'expression de la blonde. C'était Jughead.

  - Où est-il ? demanda Veronica.

  - Southside High, affirma Betty, offusquée. Il dit que sa place est là-bas et que personne ne veut de lui, ici.

  - Il t'a dit ça, mais...il n'a pas eu le choix, essaya de la rassurer Elyana.

  - FP m'avait averti qu'il s'isolerait et irait vers le côté obscur, commença à s'énerver Archie.

  - Non, il est juste...tout aussi bouleversé que nous, voire plus encore.

  - On ne peut pas le laisser faire.

  - Oh non, Betty, c'est une mauvaise idée...

   Trop tard. Dès qu'ils franchirent les portes du lycée du Southside, Elyana comprit que c'était une très mauvaise décision. Ils n'allaient probablement pas aimer ce qu'ils allaient découvrir. Et effectivement, lorsqu'ils trouvèrent enfin leur ami, repérable grâce à son célèbre bonnet, il était en train de rire. Jughead Jones, en train de rire avec ses nouveaux camarades de classe. Le jeune homme perdit tout son sourire quand il remarqua les quatre intrus dans la cafétéria. Il jeta un regard rapide à sa meilleure amie qui secoua la tête par dépit. Une fois dehors, Archie, Elyana et Veronica observaient les deux amoureux qui discutaient au loin. Lya les regardait, songeuse : elle aurait voulu être seule avec Archie, elle aussi.

  - Euh...Veronica ? l'interpela Archie, éveillant la curiosité (et l'appréhension) d'Elyana. Est-ce que tu pourrais nous laisser seuls quelques minutes ? Il faut...qu'on parle.

  - Oh, oui, pas de problème, je...j'y vais, alors, répondit-elle, l'air vexé.

  - Bon, on n'a pas eu l'occasion de discuter, tout à l'heure. Qu'est-ce qu'il fallait que tu m'expliques ?

  - C'est compliqué. Enfin, pas tant que ça, c'est juste...inattendu. Je suis allée rendre visite à mon père, comme tu le sais. Et il a voulu...se servir de moi, ce qui n'est pas étonnant. Il voulait puiser de l'argent sur un compte. Mon compte. Apparemment, ma grand-mère nous a légué...tout ce qu'elle avait, à ma sœur et moi. Donc, en théorie, tout me revient. J'ai appelé ma mère, pour avoir des réponses ; elle avait l'intention de me le dire plus tard, mais j'ai hérité de tous ses biens.

  - Tu veux dire...même sa maison ?

  - Oui. Et...sa villa de vacances, aussi. Tu sais, celle où tu m'as accompagnée, un été ?

  - Lya, c'est...wow. Qu'est-ce que tu vas faire de tout ça ? lui demanda-t-il, impressionné.

  - Pour l'instant, je n'en ai aucune idée. Mais...qui sait ? reprit la jeune fille avec un sourire en coin. On pourrait...profiter de cette merveilleuse villa à Orlando, pendant un week-end. Qu'en penses-tu ?

  - Ce serait...parfait. Mais, juste une chose, l'arrêta Archie.

  - Quoi ? Il y a un problème ? s'inquiéta sa petite amie lorsqu'il afficha cet air sérieux.

  - Je veux...te remercier. Je suis épaté que tu me fasses confiance au point de me confier un truc pareil.

  - Oh, Arch', tu sais, cest...enfin...tu es...mon petit ami et...je t'aime et je te fais confiance alors bon...

  Sans un mot, il l'embrassa tendrement. Elyana glissa ses mains dans la nuque du garçon pour répondre à son baiser. Elle s'écarta ensuite et le regarda amoureusement. Ils s'enlacèrent encore une fois, leurs bras criant tous les « je t'aime » du monde. Toutefois, une vibration étouffée par leurs deux corps emmêlés les interrompit. Elyana regarda son portable.

  - Oh, non. Non, non, non.

  - Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ?

  Pour répondre à sa question, Elyana lui montra ce qu'elle venait tout juste de recevoir.

  De : Cheryl - Merci pour tout, Lya. Tu as été une compagnie merveilleuse. Mais c'en est trop. Il me manque trop. Je suis désolée. Je dois le rejoindre.

***

  Elle courait plus vite qu'elle navait jamais couru, ce qui n'était pas peu dire. Des larmes de panique roulaient sur ses joues rougies par le froid. Devant ses yeux, elle ne voyait ni la forêt, ni la neige qui s'étendait à perte de vue. Tout ce qu'elle voyait, c'était Cheryl. Cheryl, en maternelle, en train de jouer à la marelle avec elle et Jason. Cheryl, en primaire, ses cheveux roux savamment tressés pour ressembler à une princesse de conte de fée. Cheryl à leur entrée au secondaire, un peu perdue, accrochée à son frère. Cheryl et les River Vixens, Cheryl qui la réconforte à la mort de sa sœur, Cheryl dévastée par le meurtre de son jumeau... Elyana n'abandonnerait pas. Elle courait, criait le nom de son amie, jusqu'à ce qu'elle la trouve enfin. La flamboyante rouquine, trempée par la pluie et ses propres larmes, se tenait debout sur la couche de glace qui recouvrait la rivière Sweetwater, là où on avait retrouvé le corps de Jason.

  - Cheryl ! S'il te plaît ! hurla-t-elle une dernière fois.

  Ils étaient tous au bord de l'eau gelée, ils hésitaient à s'y aventurer lorsque la glace qui retenait Cheryl se brisa. Elle céda sous son poids, la précipitant dans l'eau froide, trop froide.

  - Non !

  Elyana ignora les cris d'Archie et Jughead. Plus rien ne la retenait tandis qu'elle s'élançait sur la glace. Elle se pencha par-dessus le trou béant : aucune trace de Cheryl. Lentement, elle retira sa veste. Elle regrettait de ne pas avoir pleinement saisi l'ampleur de la détresse de son amie. Elle aurait cru pouvoir reconnaître de tels signes, pourtant. Après tout, ce n'était pas la première tentative de suicide à laquelle elle était confrontée. Cette fois, elle ne laisserait pas une telle horreur se produire. Désormais, elle ne portait plus que son T-shirt et son pantalon. Elle laissa ses chaussettes et, en une fraction de secondes, plongea tête la première. L'eau lui piquait les yeux, la température négative lui brûlait la peau, et sa culpabilité lui rongeait le cerveau. Elle voyait Cheryl, plus loin, devant elle, légère comme une plume dans cette masse meurtrière qu'était la rivière. Elle se mouvait du mieux qu'elle pouvait, ses bras et ses jambes synchronisés sur un mouvement de brasse. Lorsqu'elle serra enfin Cheryl dans ses bras, elle commença à manquer d'air. Comme par miracle, crut-elle, la glace au-dessus d'elles céda à son tour. Elle comprit que la chance n'y était pour rien quand les bras forts d'Archie les sortirent de cet enfer glacé. Allongée sur son flanc, elle toussait et refusait de lâcher Cheryl.

  - Lya, lâche-là, je n'arrive pas à...

  Ses oreilles sifflaient. Elle sentit Jughead la tirer en arrière, l'arracher au corps de son amie. Elle hurla, faisant probablement fuir quelque pauvre bête endormie. Juste avant de s'évanouir, elle vit la masse de longs cheveux roux se secouer. Cheryl s'était redressée. Ils avaient réussi.

Those secrets we keepOù les histoires vivent. Découvrez maintenant