J'ai du manquer d'instinct.

J'ai dû manquer d'instinct

Elle nous a trouvé enchevêtrés. J'ai eu peur quelle croie à l'impensable. Il s'est mis à lui mentir. Il m'a accusée de l'avoir aguiché. Il m'a craché les pires injures. En même temps, il essayait de remettre sa chemise dans son pantalon. Il s'emmêlait et jurait en me foudroyant du regard. Moi je ne voyais quelle. Elle qui me regardait comme si je devenais transparente, comme si je n'existais plus. Puis elle était montée sans un mot. Me laissant seule sur le sofa, éparpillée. Lui courait à sa suite, emportant avec lui le déluge de mots qui me faisait défaut.

Je ne sais pas où j'avais lu l'inscription "vivre me tue" et gravé en dessous "ta connerie aussi". La mienne me fut fatale.

Le docteur est là avec une bonne tasse de thé bien fumante. Je pense que je commence à l'aimer de plus en plus. Pas très glamour ma tunique de bandages spécial momie, mais ça n'as pas l'air de l'effrayer. Il m'explique qu'il va être très présent à mes côtés. Et que nous allons beaucoup parler.

Il a un air si concerné si profond. Que je me dis que j'ai dû le faire. En fait c'est lui. Quand il est redescendu. Quest-ce que je faisais là encore? Je n'arrivais pas à bouger. Boule de douleur, chair massacrée. Elle avait appelé les secours. Pour moi. Elle jetait ses affaires à lui dans l'escalier. Elle lui disait quelle avait appelé les flics. Elle s'époumonait. Sa belle voix cassée se fracassait sur les murs du salon . Ses mots m'enveloppaient comme un baume sécurisant.

-On ne touche pas à ma fille disait-elle. Ma fille!

-J'aurais pas dû, je ne sais pas ce qui m'a pris! Je te demande pardon! J'ai honte si tu savais! Mais aussi t'as vu comment elle s'habille?

- Ce nest qu'une enfant! Comment as-tu osé? Salaud! Monstre! Tu me dégoutes! Non ne me touche pas ou je hurle! Je veux quon t'arrête, je veux que tu ailles en prison! Je veux quon te fasse ce que tu lui a fait! Jai appelé les flics!

- je suis désolé je te dis! Je vais me soigner je te jure! Ne me jette pas! Je t'aime! C'est la première fois que je te trompe je te jure!

- Tu ne mas pas trompée, Tu as violé ma fille!

-Ne dis pas ça! C'est pas moi chérie! Je ne suis pas un violeur!

-Je ne suis pas ta chérie! Je vais bruler tes habits , tes toiles tout! Tu es une nuisance, une pourriture! c'est à elle que tu dois demander pardon idiot! Je te hais!

-J'ai dérapé mais je ne suis pas un mauvais homme!

- Mais comment ai-je pu te faire confiance?

- Quest-ce que jai fait? Hein? allez, ça existe les seconde chance. Donne moi une seconde chance! je pars quelques semaines et tout s'arrangera!

-Mais tu vas la fermer ta gueule!

-Tu peux pas me larguer comme ça, toi et moi c'est quelque chose de fort. Plus fort que nous tu te souviens?

-Jai dû manqué d'instinct.

On a sonné à la porte, et machinalement, il est allé ouvrir la porte. C'est ce que je croyais. J'ai relevé la tête quand il est passé devant le sofa. Il ma regardé comme si je voulais le défier. Comme si j'avais ça en tête. Je ne pensais qu'à elle , à son cri d'amour. "C'est ma fille!". La colère lui allait bien. Elle était éblouissante.

-Perdu pour perdu!- C'est ce qu'il a dit.

Puis il m'a jeté l'acide. Et je me suis évanouie.

Mes mots sonnent de plus en plus creux depuis que je me souviens. Et ça fait vraiment mal. Partout.

Elle me tient dans ses bras. Elle crie. Je veux qu'elle me lâche. Ses mains me blessent. Je brûle. Ma peau me fait mal. Il faut que je l'enlève. Si je l'enlève tout ira mieux. Si je l'arrache, j'aurai la paix. Alors je plante mes ongles dans ma chair et je tire sur mon ventre. Tout autour de moi bascule. Les lumières dansent. C'est une mosaïque de couleur. Un kaléidoscope de son. Je plane. Puis tout est bleu ciel et tendre. Je suis dans du coton. Je sais que je souris. Je suis si bien . C'est incroyable comme tout est paisible. On dirait la fin de toute chose. On dirait que cest la saveur du vrai repos. Une voix se fraye un passage jusqu'à moi, suivie de plusieurs voix. Et il y a cette main qui s'acharne à me réveiller. -Lâche-moi, je lui dis, lâche-moi!- Elle n'entend pas. Elle me secoue . Elle me force à ouvrir les yeux. Plus de ciel bleu. Je veux y retourner mais tout m'en empêche. Il y a comme une musique dans le bleu. Une musique douce et avenante qui rappelle l'amour. On veut m'arracher à cette paix. On veut me faire souffrir.

Je hurle.

Et je n'entends plus rien.