J'étais dans la merde. Surtout quand je voyais le proviseur adjoint sur son ordinateur, comme s'il réfléchissait longuement à quelle sanction je devrais subir. En même temps, j'avais volontairement provoqué une prof en espérant y trouver une issue de secours, ce qui n'avait rien à voir avec une erreur.
— Diana Kane... Tu viens tout juste d'entrer dans cet établissement, n'est-ce pas ?
Il se tourna vers moi et son regard grave à travers ses petites lunettes ne me rassurait vraiment pas. Il les remonta sur son nez en attendant ma réponse.
— En effet monsieur, répondis-je en serrant mes mains entre mes cuisses pour éviter de trop les bouger.
Il laissa échapper un léger « hum » avant de reposer son regard sur son écran.
Je pensais que j'aurais mieux géré la situation, au moins, mentalement, mais il n'était rien. J'avais beau être passée des tas de fois devant du personnel haut placé de mon ancien lycée, Monsieur Prentice dégageait quelque chose de charismatique et intimidant. D'ailleurs, il était bien plus jeune que je ne l'aurais cru. À première vue, je lui donnais la quarantaine, mais à peine entamée.
— Tu es entrée ici suite à une demande de tes parents. Je suppose que tous les deux sont très pris par leur travail et que je n'aurais pas de réponse de leur part, mais je n'ai aucune envie de les contacter. C'est avec toi que je vais parler.
C'était le bon moment pour sortir mon monologue et j'espérais vraiment que ce soit suffisant, sinon, j'étais bien plus dans la merde que je ne croyais.
— Je suis désolée Monsieur, ça ne se reproduira plus et j'accepterai les sanctions que vous m'imposerez.
Il arqua un sourcil, comme si ça l'étonnait, à croire que la plupart des élèves s'enfonçaient dans leur merde.
— J'apprécie tes excuses Diana, déclara-t-il en se tournant vers moi. Mais ça ne m'explique pas pourquoi tu n'as pas écouté ta professeur quand elle t'a demandé de ranger son portable.
— Mes amis me manquent alors je leur envoyais des messages en cours, avouai-je.
Bon, c'était à moitié un mensonge, mais je n'avais rien de mieux sous le coude. Je ne voulais pas prendre le risque d'inventer un stupide mensonge, parce que j'étais persuadée de ne pas être face à un abruti. Il m'observait minutieusement depuis mon arrivée dans son bureau, il avait inspecté mon dossier et avait réussi à en tirer quelques conclusions. Je ne pouvais clairement pas le prendre pour un con.
— C'est très honnête et l'honnêteté est une valeur importante que beaucoup de professeurs essaient d'enseigner à leurs élèves.
Moi aussi j'y avais cru un jour à l'honnêteté et à la justice, jusqu'à ce que je découvre que notre monde était plus que pourri.
— J'aimerais ne pas à avoir à appliquer le règlement à la lettre, mais c'est la première fois, alors je vais être clément et seulement te coller pour la semaine.
Je lui adressai un timide sourire, comme une manière de le remercier. Bon, c'était un peu improbable de remercier quelqu'un qui venait tout juste de me coller, mais vu mon impulsivité, c'était ce que je pouvais en tirer de mieux dans une telle situation.
Il m'expliqua rapidement comment se déroulaient les colles dans ce lycée. Elles avaient toujours lieu entre dix-sept et dix-neuf chaque jour. Un de nos professeurs nous donnait un travail à faire durant cette période et notre présence était également vérifiée. Rien de bien extraordinaire et j'aurais presque préféré une punition plus "innovante".
En quittant son bureau, il espérait vraiment que je ne recommence plus et je l'avais bêtement promis. Bêtement parce que j'ignorais de quoi était constitué l'avenir et généralement, le mien n'avait jamais été tranquille. La sonnerie retentit et je pus apercevoir le message que m'avait laissé Sani, il était retourné en cours après m'avoir déposé.
Si je voulais le croiser au moins pour la pause, il fallait que je me dépêche. Mon sac sur le dos, je descendis les marches rapidement. Heureusement, le bâtiment A était vide et je m'en extirpai assez facilement. Mais pour rejoindre le bâtiment D, c'était une autre affaire. Ça avait beau n'être qu'une simple prérentrée, des cours en supplément pour quelques élèves, l'établissement était déjà bondé.
Alors, après avoir bousculé quelques collégiens et lycéens, je rejoignis rapidement Sani et Hikaru qui venaient tout juste de sortir du bâtiment.
— Alors ? s'enquit Sani.
— Juste des heures de colles, tentai-je d'articuler malgré mon essoufflement.
Je repris petit à petit mon souffle et je sentais brusquement les effets du tabac sur mon corps. Le jour où j'arrêterais de fumer, mon corps allait un peu revivre, mais pas mon esprit. D'ailleurs, vu mes pensées, il fallait vraiment que je m'en grille une.
— C'est autorisé la clope ici ? demandai-je naïvement.
— Tu déconnes ? Jamais ça ne va pas être autorisé ici.
— Mais c'est n'importe quoi !
— C'est le bon moment pour arrêter, me conseilla Sani avec un grand sourire.
— Tu ne m'as jamais vu en manque de clopes toi ! Et je peux t'assurer que c'est pas beau à voir !
— Pire que lorsque tu es bourrée ? plaisanta-t-il de plus belle.
— Oh que oui ! Bien pire ! lâchai-je d'un air grave.
Hikaru retenait encore son rire. On semblait l'amuser et tant mieux, je n'avais plus peur du ridicule depuis un bon bout de temps.
J'annonçai alors que je m'éloignai d'eux pour fumer dans un coin reculé et qu'on se reverrait en maths, après la pause. Ils étaient prêts à m'accompagner, mais je refusai sans hésiter et partis m'isoler dans le parking, sûrement dédié au personnel de l'école.
Alors que j'étais sur le point d'allumer ma clope, mon regard se posa sur Madame Baden. La poisse allait longtemps me suivre...
— Je ne dirais rien si tu m'en passes une, me proposa-t-elle en s'approchant vers moi.
— C'est un petit peu une menace, mais j'accepte, cédai-je en lui tendant mon paquet.
Elle en sortit rapidement une cigarette avant de me le rendre.
— Je suis très à cran sur les règles, mais celle-ci, je t'autorise sans souci à la transgresser.
Je lui adressai un sourire reconnaissant qui était plus que sincère. Elle était sévère, mais pas inhumaine. Au moins, je savais que je pouvais compter sur elle d'une certaine manière...
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Le Spleen du Cygne
Teen FictionLe quotidien de Diana Kane alterne entre les querelles avec les professeurs - pour lesquelles elle n'est jamais punies - et les autres élèves du lycée qui ne se gênent pas pour juger le moindre de ses faits et gestes. Pour la plupart, Diana est une...