[Musique : Radiohead - Exit Music (For a Film)]
Lorsqu'on arriva enfin chez moi, le silence qui y régnait me perturba et c'était bien la première fois. D'habitude, je l'acceptais totalement et j'en étais même venue à l'apprécier. Certainement parce que c'était toujours mieux que les cris stridents de ma mère ou ceux de mon père, quand il était existant dans ma vie...
Lucine regardait les alentours, presque gênée. Quand les gens venaient chez moi pour la première fois, ils avaient tous la même réaction. Je vivais dans un milieu bien plus aisé que la plupart et j'avais totalement conscience de ce privilège.
Silencieusement, je conduis Lucine jusqu'à ma chambre. J'avais prévenu Maria de ne pas s'embêter avec nous, mais elle avait quand même prévu un deuxième lit gonflable par terre et je ne pus m'empêcher de dormir à cette douce initiative.
— Ma gouvernante a prévu un deuxième lit, annonçai-je dans un murmure. Tu peux prendre mon lit ou l'autre ou on peut dormir ensemble...
— Je prendrai le petit lit, rétorqua-t-elle presque embarrassée.
— D'accord...
J'avais comme l'impression qu'elle n'osait pas prendre une initiative, comme si ma maison la déstabilisait soudainement, mais je ne savais pas comment la rassurer. Après tout, elle devait à peine connaître ce genre de lieux et inconsciemment, je crois qu'une distance avait été marquée entre nous.
— Diana, il s'est passé quelque chose à cette soirée ? s'enquit-elle alors que je cherchais une nuisette pour dormir dans mes placards.
— Qu'est-ce qui te fait dire ça ? demandai-je en me tournant vers elle.
— Une impression... Et aussi parce qu'on est partie plus tôt que prévu. Mais si tu ne veux pas m'en parler, ce n'est pas grave.
— Faisons simple : les mecs sont des cons, lâchai-je en haussant les épaules.
Elle se mit à rire et je sentais que les tensions qui s'étaient récemment créées étaient en train de s'envoler. Et puis son rire était si doux, si mignon, surtout lorsqu'elle s'interrompit brusquement en pensant gêner quelqu'un.
— Plus jamais je reviens à une de leur fête tant qu'ils ne me montreront pas une forme de respect. J'en ai un peu marre de leur festival d'indécence...
Un sourire se dessina sur ses lèvres et je souris à mon tour. Cette soirée allait peut-être enfin se terminer sur une bonne note.
Je trouvai enfin une nuisette qui ferait l'affaire. Alors, j'enlevai ma robe, mon soutien-gorge et enfilai ma nuisette sans me soucier du regard de Lucine. Quand je me tournai vers elle, elle était assez rouge.
— Ça va ? Je n'ai pas pensé à me changer ailleurs parce que... bah des seins ce sont des seins... Désolée.
— Non, ne t'excuse pas. C'est cool si tu es à l'aise avec ton corps... Mais moi je vais me changer dans la salle de bains...
— Tout au fond du couloir, lui indiquai-je accompagné d'un bref geste.
Elle hocha la tête et partit d'un pas assez précipité. Pendant ce temps, je m'assis sur mon lit et consultai brièvement mon portable. Carter m'avait envoyé un message sur Facebook pour m'insulter. « Sale pute. » J'en étais à peine étonnée. Les souvenirs de cette soirée me revinrent et me poussèrent à le supprimer de ma liste d'amis et même à le bloquer. Puis le groupe du lycée était rempli de messages de la soirée que je le quittai instantanément.
Je n'avais plus envie d'entendre parler de cette soirée. Ni d'aucune autre. J'en avais marre de ce refrain incessant.
En levant mon regard, j'aperçus Lucine qui venait d'entrer, vêtue désormais d'un pyjama bleu deux-pièces.
— On dirait vraiment que quelque chose ne va pas, me fit-elle remarquer.
— Je crois que tu avais raison sur un point... Les gens voulaient profiter de moi à cette soirée, avouai-je d'un ton grave.
Elle s'assit sur le rebord de mon lit, l'air compatissant, et je posai mon portable sur la table de nuit.
— Je suis désolée que ce soit vraiment le cas...
— Ce n'est pas à toi d'être désolée, la contredis-je aussitôt. Ce devrait être plutôt eux, toute cette bande de connards...
— Tu veux un câlin ? me proposa-t-elle d'une douce voix.
Timidement, je hochai la tête et elle me prit dans ses bras. Nous restâmes de longues minutes ainsi et une étrange sensation me prit. Des câlins, je n'en avais eu que trop peu dans ma vie. Peut-être quelques-uns de mes parents, mais c'était à peine mémorable. Ou encore de Damon, quand nous étions en couple et que tout semblait aller bien... Ce n'étaient que des hypothèses. J'étais incapable de me rappeler du dernier câlin que j'avais eu ou que j'avais fait. Je ne m'en rappelais pas.
Au contraire, je me souvenais davantage des mains baladeuses de certains, des gifles, des insultes, des moqueries. Et maintenant, j'avais envie de pleurer. Lucine le remarqua en me relâchant, voyant mes yeux humides. Dans un murmure, elle me proposa de me lâcher, de ne plus retenir mes larmes, tout en me disant que j'avais besoin de me défouler, que c'était normal.
— Je ne sais pas si je te l'ai dit... Mais si j'ai quitté mon ancien lycée... C'étaient à cause des gentes. Iels disaient n'importe quoi sur moi... Enfin, j'en avais marre de leurs remarques... Changer de lycée c'était ma seule solution...
— Je m'en doutais et je ne vais pas changer de lycée, rétorquai-je aussitôt d'une voix faible.
— C'est pas ce que je voulais dire... Enfin, je voulais juste que tu saches.
— C'était évident en fait. Dès le premier jour où je t'ai vue... Et puis, peu de gens changent de lycée en cours d'année. C'est soit un déménagement, soit un choix volontaire.
— Ce n'était pas évident, lança-t-elle comme si elle voulait garder un brin de fierté.
— Oh que si ! renchéris-je.
Elle se tut, acceptant cette défaite, ce qui ne put que me réjouir. Puis aucune d'entre nous n'ayant sommeil, je lui proposai de passer le temps en regardant quelques vidéos sur internet. Elle se réjouit immédiatement à cette idée et nous nous installâmes dans mon lit, ayant le meilleur angle pour voir la télé. Puis petit à petit, la fatigue commençait à se faire sentir... mais avec une forme d'apaisement, ce qui était une première pour moi...
Les choses étaient en train de beaucoup trop changer dernièrement et ce n'était pas plus mal...
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Le Spleen du Cygne
Ficção AdolescenteLe quotidien de Diana Kane alterne entre les querelles avec les professeurs - pour lesquelles elle n'est jamais punies - et les autres élèves du lycée qui ne se gênent pas pour juger le moindre de ses faits et gestes. Pour la plupart, Diana est une...