Chapitre 3 : Tant pis

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En fumant une deuxième clope, mon regard se perdit dans le café Sheri's dans lequel s'étaient installées Rachel, Saphira et leurs acolytes. Elles avaient toute une tasse dans la main et discutaient, parfois elles riaient même aux éclats. Au moins, elles semblaient bien s'amuser. Ce café était vraiment le lieu de prédilection de tous les populaires et évidemment, je n'étais jamais la bienvenue. Sauf que cette fois-ci, je n'allais pas me laisser faire par leurs stupides règles.

J'écrasai ma cigarette contre le banc, me levai et entrai dans le café. Immédiatement, mon arrivée fut remarquée et Rachel m'interpella.

— Hey ! Tu fous quoi ici ? lança-t-elle avec dédain.

Je soupirai, ne cherchant même pas à dissimuler mon agacement, et m'approchai de son groupe d'amies. Elles étaient toutes en train de pouffer. Visiblement, ma seule présence suffisait à les faire rire. Dommage que je ne fasse pas une carrière dans l'humour !

— Il s'agit d'un lieu public et j'ai tous les droits de venir ici prendre un café, rétorquai-je, blasée.

— Tu ne viens jamais ici, rétorqua-t-elle d'un air narquois. Et sinon, samedi, ne compte même pas te pointer à la fête de Damon.

Évidemment, elle était au courant que son mec avait invité son ex. Il le faisait toujours, cependant, elle était rarement présente pour vérifier. Elle avait toujours trop peur des déviances de certains et je faisais clairement partie des personnes qu'elle craignait.

— Tu ne me donnes pas d'ordre et de toute manière, tu n'es même pas là pour vérifier. Tu te contentes de demander à tes chers amis de faire le travail pour toi.

— Je n'ai pas envie de te surprendre en train de sauter tous les mecs que tu croises, attaqua-t-elle sans la moindre honte.

Toutes ses amies rirent à sa remarque, comme si c'était un vrai clash alors que ce n'était qu'une manière lamentable de me critiquer. Ma première réponse fut un sourire amer, puis ma seconde réponse suivit :

— C'est vrai que c'est le meilleur moyen de dégrader quelqu'un en mentionnant sa vie sexuelle, ironisai-je. Bravo ! C'était vraiment très original !

Si j'étais comme elle, je l'attaquerais sur sa virginité et son envie absolue de rester pure jusqu'au mariage. Mais je savais que ça n'avait aucun intérêt de rabaisser une femme pour sa sexualité.

— Tes parents devraient avoir honte de toi, rétorqua-t-elle, poursuivant dans le même discours absurde.

— Mes parents s'en fichent, ils ne veulent que ma réussite scolaire.

— C'est juste qu'ils ignorent à quel point leur fille saute sur tout ce qui bouge...

Cette discussion ne menait vraiment à rien et c'était inutile de donner davantage d'importance à ses stupides propos. Je m'éloignai de leur table sous leurs rires moqueurs et victorieux et m'approchai du comptoir. La serveuse me fixa brièvement, comme si elle essayait de se rappeler de moi, mais vainement.

— Salut ! Sympa la couleur de cheveux ! me complimenta-t-elle.

— Merci, répondis-je maladroitement.

Je n'avais vraiment pas l'habitude qu'on apprécie ma couleur de cheveux. Au contraire, c'était souvent un argument pour tenter de me blesser.

— Alors, ça sera quoi pour toi ? demanda-t-elle souriante.

— Hum... Je vais prendre un cappuccino, répondis-je timidement.

Je n'avais aucune idée de quel goût avait leur boisson et je savais que je n'étais que rarement déçue par un cappuccino. Je réglai aussitôt ma commande et elle m'invita à m'asseoir.

Ne voulant pas chercher davantage les emmerdes, je m'installai à une table à l'opposé du groupe des filles et sortis mon portable pour éviter de faire attention aux alentours. J'aurais tellement voulu que leurs attaques ne m'atteignent pas, mais c'était me mentir à moi-même. Heureusement, je les supportais bien mieux que l'année dernière. Bien que Damon et moi avions rompu en de bons termes, elles n'étaient pas innocentes pour autant. Damon avait toujours été le quaterback populaire qui séduisait toutes les filles et moi, j'étais cette fille lambda, celle qui n'intéressait personne. Le hasard a fait qu'on a commencé à se rapprocher et à bien s'entendre, mais à la base, rien ne nous prédestinait à sortir ensemble.

En arrivant au lycée, je n'avais que peu d'amis, enfin, plutôt pas du tout. Damon est venu de lui-même me parler alors que je rentrais chez moi. Il s'était avéré que nos maisons étaient assez proches. Enfin, nous avions pu faire une partie du chemin à discuter ensemble. Puis nous avions fait de nombreuses fois le chemin ensemble, jusqu'à ce qu'il m'invite à le suivre chez lui. À partir de ce moment, les choses s'étaient emballées... Et rapidement, j'avais attiré l'attention. J'étais devenue l'ennemie de toutes les cheerleaders qui rêvaient de sortir avec lui. Mais à cette époque, j'étais encore bien trop innocente...

— Voici votre cappuccino, m'annonça la serveuse qui venait d'arriver en face sans que je la voie arriver.

Elle posa sa tasse, me souhaitant une bonne journée, et revint à la caisse. Mon regard s'arrêta brièvement sur le groupe de filles. La bonne humeur était toujours présente entre elles et elles semblaient ne plus faire attention à moi. Tant mieux...

Mon regard revint se poser sur mon portable tandis que je bus une gorgée de ma tasse. Ce cappuccino était plutôt satisfaisant. Si cet endroit n'était pas réservé à une certaine catégorie de personnes, je serais sûrement revenue... Mais tant pis...

Le Spleen du CygneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant