Je pousse de toutes mes forces pour tenter tant bien que mal de ne pas me faire aplatir comme une crêpe par l'énorme tapis enroulé qui recouvrira le nouveau sol de notre chambre, à Aria, Charlène et moi. Cela fait environ dix jours que nous nous attelons à rénover le manoir écossais et malgré que le travail soit pénible, nos efforts finissent par payer : en effet, la demeure a déjà délaisser son ambiance ruines pour un aspect plus chaleureux et accueillant. Après avoir joué aux tornades blanches a l'intérieur, nous avons reconsolidé toute la structure et redressé le toit. Ensuite, nous avons retapé le plancher qui a été détruit durant l'attaque et remplacé les fenêtres. Aujourd'hui, nous en étions à la réinstallation des meubles, qui est à mon avis la meilleure partie, et le synonyme de la fin de nos efforts acharnés.
Le poids du large et vieux tapis qui s'affaisse un peu plus sur moi me sort de mes pensées. Je me démène du mieux que je peux pour ne pas me retrouver écraser entre le sol et le lourd tissus, mais la fatigue liée à mes maigres muscles dans les bras ne me facilite pas la tâche. Je peste intérieurement : Aria devait me donner un coup de main, mais la jeune fille m'a lâchement abandonnée lorsque Johan l'a appelé pour je ne sais quoi. Ces deux là semblent s'être bien trouvés. Dès qu'ils se retrouvent à moins de dix mètres, on a l'impression qu'un troupeau de papillon se rue dans le secteur pour aller les entourer et les emmener dans un monde parallèle. Et, même si la rouquine ne cesse de démentir notre hypothèse sur de quelconques sentiments, à Char et moi, ses joues empourprées et sa voix tremblante lorsque nous abordons le sujet de font que renforcer nos certitudes. Ça me fait plaisir pour mon amie, de savoir qu'elle peut penser à autre chose que de ce qui nous arrive, mais si seulement elle pouvait ne pas me laisser me faire broyer sous un tapis, je lui serai très reconnaissante.
Comme si ma pensée avait été entendue, deux mains apparaissent de part et d'autre du rouleau et soutiennent, à ma plus grande joie, son poids. Peter esquisse un sourire.
- C'était moins une, hein, miss ?
Soulagée, je me redresse un peu et lui fais signe de m'aider à le poser au centre de la chambre. Nous le déroulons sans plus d'encombre et je me laisse tomber sur le sol duveteux.
- Merci, une minute de plus et tu m'aurais retrouvée asphyxiée en dessous, je plaisante.
Il esquisse un léger rire. L'ambiance entre nous est toujours un peu tendue, mais je sens que nous sommes sur la bonne voix : j'espère un jour retrouver notre complicité, même si il s'est passé des mois sans qu'elle ne pointe son nez. Quelques instants plus tard, il est à son tour étendu sur le tapis un peu rêche et nous voilà à fixer le plafond en silence. Il finit par se racler la gorge, me sortant de mes pensées.
- Est ce que tu m'en veux encore pour... ce que je t'ai dis, l'autre fois ?
Mon cœur rate un battement : pas besoin d'être plus précis, il parle de notre dispute après l'incident du bar. Je sens son corps tressaillir, à côté de moi. C'est peut être le moment pour moi de m'excuser pour tout le mal que je lui ai causé. Je voudrai lui crier que non, bien sûr, je ne lui en veux pas, que je le remercie même de m'avoir ouvert les yeux sur mon état zombifié par la disparition de Aym, mais je me contente de secouer la tête en gardant le silence. Aucun son ne sort de ma bouche lorsque je l'entrouvre pour parler, comme si je n'avais encore une fois pas le courage de dire quoi que ce soit.
Peter se redresse et me lance un regard indescriptible, mais je jurerai voir des larmes dans son regard gris.- Je suis navré d'avoir gâché notre relation. J'étais jaloux, et Aym était mon ami, alors le perdre, et puis te voir t'autodétruire... j'ai pété les plombs. Et par ma faute, tu t'es retrouvée à la merci de...
Avant qu'il ne finisse sa phrase, je lève la main pour le couper. Voilà la vérité : Peter est tout autant rongé par la culpabilité que moi. Nous sommes tout les deux sous son emprise mais c'est la première fois que vous nous l'avouons. Une vague de courage me parcours et je sens que cette fois, je peux lui avouer tous ce que je voulais lui dire.
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Surnaturelle
FantastiqueAlpha est une jeune fille comme les autres. Pas populaire, pas inconnu non plus. Mais un jour, sa petite vie se voit bouleversée par une rencontre des plus étranges. Elle découvre un environnement beaucoup plus dangereux et doit apprendre à vivre av...