- Chapitre 4 : Aiguilles et résine -

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« Tes réminiscences viennent à moi et dangereusement me paralysent. »

Le souffle haletant de la jeune fille brisait le silence de la forêt. Elle essayait malgré elle de retenir ses couinements d'effroi. Elle courait si vite que la douleur des écorces et des ronces sous ses pieds nus ne lui faisait plus aucun effet. Elle ne pouvait pas risquer de s'arrêter. Il était derrière elle. Ses cheveux roux s'accrochaient dans ses larmes et brouillaient un peu plus sa vue, déjà diminuée par l'obscurité et la panique. Les pins lui paraissaient infinis et de plus en plus resserrés. Il allait la rattraper avant qu'elle ne trouve de l'aide. La pleine lune jetait son éclat sur le bois et lui permettait de repérer quelques espaces afin de ne pas trébucher. Elle entendit un ricanement près de son oreille. Etait-il déjà si près ou son esprit réduisait-il les distances ? Un deuxième ricanement, de l'autre côté cette fois. Elle ne put retenir un cri et plaqua sa main sur sa bouche pour l'étouffer. La curiosité l'emporta et elle se retourna une fraction de seconde pour voir s'il la rattrapait ou si l'espoir de survie n'était pas si vain.

Elle trébucha sur une racine sortie de terre et elle sentit le dos de son pied s'écorcher avant de s'écrouler à plat ventre sur la litière humide. L'odeur d'aiguilles et de résine pénétrèrent dans ses narines. Les yeux écarquillés, ignorant la douleur qui lançait l'ensemble de son corps, elle s'appuya sur le sol de toutes ses forces pour parvenir à se remettre sur ses jambes.

Mais une masse la plaqua au sol et la retourna sur le dos d'une seule main. Il l'avait rattrapée. Les cris de terreurs et les appels à l'aide moururent sur ses lèvres au fur et à mesure que la lame d'un couteau pénétrait dans sa gorge.

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Gaara prit le papier que le shinobi de Suna lui tendait. Gaku, de la distance où elle était, était incapable de discerner les caractères sur la feuille, alors elle concentra son regard sur l'expression du visage de son mentor. Impénétrable, comme d'habitude.

« Temari et Kankurô sont au courant ?

- Ils ne viennent pas. Le Conseil a spécifié que vous pouviez emmener certains de vos nouveaux élèves, mais étant donné la durée inconnue de la mission, vous envoyer tous les trois est trop risqué pour le village.

- Je vois. »

D'un signe de l'index, le jeune homme invita Gaku à s'approcher. Elle était la seule qu'il pouvait potentiellement emmener avec lui, étant son unique disciple. La jeune fille leva ses yeux verts vers les siens et pinça les lèvres, attendant ses instructions. Elle n'avait plus envie de lancer de blagues pour détendre l'atmosphère comme elle avait pu le faire une heure avant. La honte lui tiraillait l'estomac et la vision qu'ils avaient partagée ne quittait pas son esprit. Si son envie d'apprendre et de partir en mission n'était pas plus forte, elle se serait probablement enterrée dans le sable jusqu'à ce que mort s'ensuive et que la totalité du village sur trois générations oublie son existence. Sans un mot, il lui tendit la feuille de papier.

Une jeune femme avait été assassinée au pays de la Mer, sur l'île Taro. Sans force militaire ni Village Caché, ils faisaient appel à Suna pour les aider à arrêter le meurtrier. Selon eux, la violence de la tuerie et le mode opératoire étaient inquiétants ; les enquêteurs pensaient que le cas ne serait pas isolé et que le coupable n'était pas un simple citoyen. Des frissons parcoururent les bras de Gaku quand celle-ci parcourut les lignes qui narraient les détails du cadavre retrouvé dans une forêt. Un mélange de colère et d'excitation parcourait son corps, probablement dû à la compassion pour la victime qui était une femme à peine plus âgée qu'elle.

Gaara observait sa réaction. La respiration de son élève était calme malgré la hâte de partir pour le pays de la Mer, ses cheveux en bataille bougeaient légèrement avec la brise du vent et du sang séché subsistait au coin de ses lèvres. Il n'arrivait pas à savoir s'il y était allé trop fort. Cependant, vue sa hargne à chaque tentative d'assaut, elle n'avait pas l'air de vouloir être ménagée. Elle leva la tête et sourit timidement, pour lui indiquer qu'elle acceptait de venir avec lui. Son comportement avait changé. Gaara devinait aisément que c'était dû à ce qu'elle avait vu sous l'emprise de son illusion. Est-ce qu'elle le détestait maintenant ? Non. Elle n'avait pas ce regard d'effroi mêlé de haine qu'ils avaient tous lorsqu'ils le regardaient. Elle n'avait pas fui non plus. Elle s'était simplement excusée. La voix du ninja émissaire brisa à nouveau le silence :

« Le bateau part dans cinq heures. »

Gaku's ChroniclesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant