CHAPITRE 23

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Alors que je me gare sur le parking du lieu indiqué par Dylan, je le vois me faire un signe depuis le pas de la porte. Un sourire vient instinctivement sur mon visage alors que je coupe le contact et quitte le véhicule. Le rejoignant, il m'enlace dans une accolade fraternelle en me disant bonjour. C'est ça, l'amitié ? Il est clair que ce que j'ai partagé avec Adam et Sam n'en a jamais été alors, c'est une nouvelle découverte que je fais. Pas à pas. Je continue d'avancer.

- Hé, beau gosse. Comment vas-tu ?

- Salut Dylan. Bien et toi ?

- Ça va. Entrons !

Dylan me tenant la porte, j'entre dans ce lieu que je ne connais pas mais qui me donne déjà envie de ne plus le quitter. Il me fait un peu penser à mon appartement avec les murs en briques et ses étagères regorgeant de livres, plantes et objets de décorations. Mais une chose est certaine : je n'ai pas autant de tables chez moi. C'est un endroit doux et chaleureux qui me plaît beaucoup. Je prends note de l'adresse. J'aimerais bien y amener Andy et Alice.

Installé face à face, une tasse chaude face à chacun de nous, nous sommes prêts à entamer une conversation qui risque d'être centré sur moi et longue. Alors, autant que je sois le premier à attaquer pour repousser un peu l'échéance. Même si ce sera un effort vain et que nous y parviendrons quand même. Après tout, en amitié, les deux entrent en ligne de compte. Il est donc normal et important que je ne sois pas le seul à parler, à m'apitoyer sur mon sort ou à me plaindre. Il est également en droit de le faire. Il doit même le faire.

- Alors, Lionel ne t'a pas fait une scène quand il est rentré ?

Il échappe un rire, boit une gorgée de café et repose sa tasse.

- Si tu savais. Il est rentré en furie, inspectant partout pour voir si tu étais toujours là, en maugréant je-ne-sais quoi. Comme si j'allais te cacher dans le placard. Il a fini par aller bouder sur le canapé alors que je préparais le dîner. Et il a trouvé ça louche que je lui fasse son plat préféré. Ne dis rien, oui, j'aime le faire tourner en bourrique. Il est beaucoup trop chou quand il boude. Finalement, il m'a déballé sa rancœur envers toi et sa peur que je le quitte.

Je grimace alors. Je ne veux pas qu'un homme en couple se sente menacer par moi. Surtout qu'il n'y a aucune raison que ce soit le cas. Dylan n'est pas Andy. Et ce n'est qu'Andy que je veux.

- Quand j'ai enfin pu en placer une, je lui ai rappelé qu'il n'avait rien à craindre. Ni de toi, ni de personne. Je lui ai également parlé de ton beau militaire pour qu'il comprenne que tu ne me voulais pas plus que je ne te voulais. Ça a paru pas mal le soulager parce qu'il semblait beaucoup plus t'apprécier tout à coup. Et on a fini par passer une nuit de folie tellement extraordinaire qu'aucun de nous ne voulait quitter le lit quand il a été l'heure de se lever pour aller au travail.

Et je comprends bien à son sourire en coin et à ses yeux pétillants que cette fameuse nuit a dû être tout sauf reposante ! Grignotant un bout de mon cookie, je lui réponds alors que je suis ravi pour lui et soulager que Lionel ne me déteste plus autant. Je regrette toujours quand les gens me détestent pour ce qu'ils croient que je suis alors que... Que je suis simplement un mec perdu qui pleure toujours sa mère des années après et qui enchaîne conneries sur conneries en auto-bousillant sa vie. C'est certain que je suis tellement détestable.

- Sors de tes pensées, Zack et dis-moi ce qu'il en est, pour toi. Où en es-tu donc avec ton militaire ?

- Ce n'est pas "mon" militaire.

- Mais tu aimerais, avoue !

- Je l'admets. Mais ça n'y changera rien.

Un soupir et je m'enfonce dans mon siège en continuant de manger des petits bouts de mon gâteau que je casse peu à peu. Je devrais lui parler de tout ce que l'on a partagé : les cours, le zoo avec sa fille, le dîner et surtout, le message. À cette pensée, mon visage doit exprimer bien plus que je ne le souhaite parce que Dylan saute sur l'occasion.

- Oh, oh. Je vois à ta tête que tu as beaucoup de choses à me raconter. Dis tout à tonton Dyl' !

À ses mots, je ne peux retenir un éclat de rire, cachant ma bouche derrière ma main et attirant quelques regards.

- T'es bête, mon pote. Enfin, ouais. Ouais, j'ai des trucs à déballer. Parce que je suis complètement paumé. Je suis comme un con à lutter contre mes sentiments parce que c'est compliqué et lui, il est là. Toujours plus sexy et toujours plus adorable. Et désirable. Je te jure, je voudrais tellement qu'il soit à moi et en même temps, je veux prendre mon temps. Puis sa fille est juste complètement adorable aussi et elle semble m'apprécier. Et je l'apprécie beaucoup aussi. Puis il m'envoie ce texto et merde ! Je suis censé lui répondre quoi, moi ? Rah !

Je laisse tomber ma tête en arrière sur le dossier de la chaise et échappe un geignement. Après un silence, Dylan prend finalement la parole.

- Eh bah, j'arrive au bon moment. On va reprendre simplement. Déjà, c'est quoi ce message dont tu parles ?

- Faut revenir en arrière pour ça. Parce que tu vas te demander ce qui a bien pu se passer pour en arriver là. Mais le message disait qu'il avait failli m'embrasser. Rien de plus ni de moins. Donc comment je sais si c'est positif ou négatif ?

- En général, quand quelqu'un veut te rouler une pelle, c'est plutôt mille fois positif.

- Certes.

- Maintenant, raconte-moi tout. Absolument tout !

Il se redresse sur son siège, prêt à tout entendre et ça me fait rire. Je m'attendrais presque à le voir sortir un stylo et un carnet pour prendre des notes. Après un nouveau petit rire de ma part auquel il répond par un sourire, je me lance à nouveau dans une tirade explicative. Et comme la dernière fois, tout y passe. Je le vois hocher la tête de temps à autre, semblant noter dans un coin de sa tête un point sur lequel revenir mais il ne me coupe pas, me laissant toujours continuer sur ma lancée.

- Tu as toujours tant de choses à me raconter toi, c'est dingue ! Donc, ton militaire, t'es carrément entrain de le faire succomber petit à petit.

- Je ne suis pas aussi certain que toi.

- Sérieusement ? T'es con. Il t'a quand même confié sa fille toute une après-midi.

- Il n'avait pas d'autre choix.

- Que nenni. S'il n'avait pas voulu, il t'aurait planté et l'aurait filé à sa voisine. Il voulait que vous passiez du temps ensemble et que tu saches qu'il avait confiance en toi pour veiller sur elle.

- C'est vrai que... Vu comme ça.

- Forcément. Et ce texto. Tu crois vraiment qu'il est anodin ? Merde Zack, ouvre les yeux. Je crois que, l'un comme l'autre, vous ne savez pas trop où ça vous mène donc vous préférez y aller doucement. Mais crois-moi, il te kiff !

- Dylan... Qui dit encore ça de nos jours ?

- Ouais bon, t'as compris l'idée. Maintenant, fonce !

- Je ne pense pas que...

- Tais-toi et fais-le. Tu verras, tu me remercieras.

- Je le ferai, Dylan. Mais pas maintenant. Plus tard, quand je me sentirai prêt.

- Prêt ?

- Je me rends compte que ma vie a pris un nouveau tournant avec toi et lui. Je viens même de trouver un boulot. Un vrai boulot ! Alors... Je veux me retrouver avant de le trouver. M'aimer et m'accepter avant de l'aimer et de l'accepter. Tu comprends ?

- Je comprends parfaitement. Et félicitations pour le boulot. Tu sais, je suis vraiment fier de toi, Zack. Tu as compris de quoi je te parlais quand on s'est revu au Zeppelin et ça me fait plaisir. Tu mérites bien mieux que la vie que tu avais.

- Merci d'avoir été là et d'avoir eu le cran de me le dire.

- Pas de quoi, mec. C'est normal entre amis.

Amis. Il l'a dit et il le pense. Et bordel ce que ça me fait du bien de l'entendre. Qu'est-ce que ça fait du bien à mon cœur de le sentir. Merde, la vie est tellement mieux ainsi ! Pourquoi est-ce que j'ai mis autant de temps à le comprendre, à l'accepter et à changer les choses ? Peu importe, regretter le passé ne le changera pas. Maintenant, il est temps de continuer mon chemin en évoluant. J'en suis capable, c'est certain.

TROUBLEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant