Trois jours venaient de ce passé, 72 heures durant lesquelles la fille de Maodo Diop inquiétait sa famille. Après le regrettable acte d'Ahmadou, Soumaya était partie se refugier chez ses parents. Sa mère était surprise de voir sa fille débarquer au milieu de la nuit avec une tête de chien abattu et des yeux rouges.et elle n'était pas au bout de ses surprises.
- Soumaya, boulma diakhal. Cela fait trois nuits que je ne dors plus. Tu ne manges plus et tu n'as prononcé ne serait-ce qu'un mot depuis ton arrivée. Ma fille, dis moi ce qui se passe. Pourquoi as-tu quitté ta maison conjugale ? Ahmadou tas-t-il fait du mal ? Pourquoi il n'est pas venu te voir depuis ? Ay Soumaya boulma ray, wakhma lou khew.
Le silence, sa réponse. Elle ne parlait plus. D'ailleurs comment expliquer aux gens que son propre mari a abusé d'elle ?
Quels sont seulement les mots adéquats à employer pour narrer cette scène ?
Quelle religion en parle ?
Quelle loi le condamne ?
Pour s'éviter des remarques et des préjugés injustes, Soumaya avait opté pour le silence. Ses parents sentaient qu'elle allait bientôt rechuter s'ils ne font rien dans les heures qui arrivent. Il fallait qu'ils réagissent.
Plus loin, l'avion de Diegane venait d'atterrir sur le sol Sénégalais. Il était revenu comme il était parti, sans la famille qu'il était allé chercher. Il a fouillé l'Europe de fond en comble mais Karina était introuvable. Il avait contacté le père de Karina, toutes ses fréquentations, ses amis mais toutes les portes lui étaient fermées.
Etait venu le moment où il devait faire face à la réalité et accepter qu'il s'était perdu dans son propre jeu.
Fallait bien s'y attendre de toutes les façons, il ne pouvait pas sortir de cette histoire indemne après avoir utilisé Karina pour se venger d'Ahmadou. Le regret commençait à prendre de l'ampleur et il ne pouvait en prendre qu'à lui même.
C'était ça les règles du jeu, gagner ou perdre. Diegane Senghor a lamentablement échoué.
Il aurait voulu effacer cette partie de sa vie mais ne saurait y arriver étant donné qu'un être humain y est vu jour : son enfant.
La première chose qu'il a fait a été de déménager chez lui. Il ne supportait plus le regard accusateur de sa mère au de-là de toute la compassion qu'elle avait à son égard. Sa mère s'occupait jour par jour de Karina, elle attendait impatiemment l'arrivée de son premier petit-fils dans la famille Senghor. Hélas ! Petit-fils qu'elle ne verra peut-être jamais.
- Tu repars en voyage ? Lui avait-elle demandé.
- Non, je retourne chez moi... J'ai besoin d'être seul. Ajouta-t-il en lui faisant une bise sur le front.
C'est comme ça qu'il s'était retrouvée chez lui, à la case de départ, seul, sans enfant ni femme. Il partait tout de même au bureau, ne pouvant pas rester chez lui les bras croisés. Le soir, c'est le bruit des touches du piano qui apaisait son cœur.
Une soirée, comme toutes les autres, il était en train de jouer sur son instrument de musique préféré quand il reçut une visite qui le surprenait au plus haut point.
Il s'agissait du père de Soumaya, il se demandait ce qu'il pouvait bien lui en vouloir mais la réponse à ses appréhensions ne tardèrent pas.
- Diegane, je suis juste venu pour te dire que si tu veux toujours de ma fille et qu'elle veut toujours de toi, je ne serais plus un obstacle à votre bonheur.
- Votre fille voudra toujours de moi et je voudrai toujours d'elle mais saches que tu ne peux pas réparer tout ce que t'as gâché. Soumaya était ma Soumaya à moi, j'ai aimé votre fille comme pas possible. J'étais prêt à l'épouser devant Dieu et les hommes, à faire d'elle la mère de mes enfants, la chérir comme un homme ne l'a jamais fait avec sa femme. Etrangement, tu ne voyais pas les choses sur cet œil. Si j'en suis aujourd'hui à ce stade, c'est uniquement de votre faute Mr Diop. Je ne pourrais jamais vous pardonner votre trahison, sauf mes respects. Lui avait-il répondu , avec une voix plein d'émotion.