Chapitre 15 - Timorée

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Léo, Mehdi et Julie.

Ils avaient quatorze et quinze ans.

- C'était des enfants de la DDASS, annonça Charles, en bout de table.

Ses traits étaient marqués, et sa voix lasse.

La fin de notre mission dans les souterrains parisiens m'était toujours aussi floue.

Aussi irréelle.

Nous nous étions occupés d'Estelle, la victime qui avait failli perdre la vie sous les griffes du vampire, mort désormais.

Ezio avait retiré son sweat-shirt noir qui s'était instantanément transformé en long manteau épais, puis l'avait délicatement déposé sur les épaules de la jeune femme.

J'avais regardé la scène d'un air détaché.

Je me sentais nulle.

Vêtu d'un simple t-shirt, il l'avait portée et s'était dirigé vers la sortie.

Au moment où nous arrivions..., il s'était retourné et m'avait interrogée du regard.

Prenant mon courage à deux mains, j'avais hoché la tête et traversé le lieu.

Avec le recul, je savais maintenant qu'il s'était servi de son pouvoir pour épargner à toute l'équipe l'odeur de putréfaction. Car aucun d'eux n'avait semblé sur le point de vomir.

Nous avions tous détourné les yeux.

Dans le long tunnel inondé, nous avions croisé l'équipe médico-légale qui venait en sens inverse.

Je les avais suivi du regard, eux et leurs combinaisons blanches.

Meurtrier et victimes allaient être transportés dans les mêmes véhicules.

Étudiés par les mêmes personnes.

Stockés dans les mêmes salles froides.

Carmen m'avait alors posé une main sur l'épaule et m'avait doucement poussée vers la sortie. Deux heures plus tard, nous étions dehors.

Jamais la nuit ne m'avait parue aussi belle. Aussi vivante. Je voulais entendre les gens rire. Les voir se disputer, s'embrasser. Je voulais voir la vie.

Sur le pont au-dessus de l'entrée que nous avions empruntée pour pénétrer dans les catacombes, des voitures de police et des ambulances, lumières toutes allumées.

Une agitation régnait, et je l'accueillis volontiers.

Je repérai Charles et ignorai son regard accusateur.

Je savais que j'avais merdé, mais je ne voulais pas y penser pour le moment.

Une douche. Il m'en fallait une d'urgence, la mort me collait à la peau.

Fort heureusement, Charles n'avait pas ouvert la bouche. Il nous avait ramenés pour que chacun puisse récupérer sa voiture.

Le silence nous avait accompagné tout au long du voyage.

Sans un regard pour les autres, j'avais rapidement récupéré mes affaires et rejoins ma voiture.

La fleur de tournesol, toujours posée sur le tableau de bord, avait attiré mon regard.

Je l'avais prise en main et l'avais caressée du bout des doigts.

Si Ezio n'avait pas été là...

La reposant là où elle était, j'avais démarré.

Même après trois douches, j'avais l'impression que l'odeur était toujours là.

À Crocs T1 Le Sort Brisé [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant