- Un bar ?
Ezio acquiesça et ouvrit la porte de la façade jaunie, aux allures de tavernes moyenâgeuses.
Le précédant à l'intérieur, je fus aussitôt agressée par une forte odeur de gin et de cigarette.
Quelques personnes se tenaient debout au niveau du comptoir qui se trouvait sur la droite, ou assis autour des tonneaux en bois qui faisaient office de tables, au centre de la pièce.
Au fond, sous une lumière plus intense, des hommes chahutaient autour d'un billard.
Ezio salua le barman, un homme de grande taille. Ce dernier était aussi barbu que chauve, ses tatouages lui donnant un air de motard hors la loi. Mais il nous offrit un sourire accueillant qui aurait pu duper le plus aguerri des policiers.
Je suivis mon coéquipier qui se dirigeait vers le bar.
Mon regard fut immédiatement attiré par les étagères sur les lesquelles étaient alignées les bouteilles d'alcool et autre chose, qui capta mon attention.
- Tu veux une bière ? demanda-t-il
Je hochai distraitement la tête en frissonnant alors que je détaillais la fausse abeille géante qui devait faire au moins trente centimètres de hauteur.
Préférant éviter d'imaginer ce que donnerait une véritable abeille ayant cette taille-là, je posai un coude sur la surface boisée et tournai le dos à Ezio afin d'observer les trois hommes près du billard.
Une épaisse fumée les entourait, mais je pus distinguer leur flamboyante chevelure rousse. Ils devaient être de la même famille car ils se ressemblaient.
L'un deux, se sentant observé, détourna le regard de ses compagnons et le posa sur moi.
Il porta un cigare à sa bouche avant d'exhaler un autre nuage qui se fondit dans le brouillard qui semblait les isoler du reste de l'établissement.
Un homme à moitié avachi sur le bar, à côté de moi, mit fin à mon observation alors qu'il chantait, d'une voix très fausse, le morceau de jazz qui passait en fond sonore. Il avait l'air complètement bourré.
- Allez Paul, lui dit le barman en se dirigeant vers lui. T'as eu ton compte pour la journée.
Le dénommé Paul esquiva la main du barman qui tentait de lui arracher son verre.
- Laisse-moi tranquille, Dave ! dit-il, la voix pâteuse. Il est que treize heures...
- Non, il est pratiquement dix-sept heures, lui répondit Dave vainement, avant de se remettre à la tâche et d'essuyer les verres.
Délaissant le spectacle pathétique qu'offrait mon voisin, je me tournai vers Ezio.
Il regardait les rouquins fumeurs de cigares.
Plissant les yeux, il porta sa bière à sa bouche.
Je voulus vérifier si le groupe d'hommes le fixait également, mais il se détourna et reprit sa position : les coudes sur le bar, l'air du parfait civil prenant un verre après une dure journée de travail.
- Tu les connais ? l'interrogeai-je.
Il me lança un regard en coin.
- J'ai déjà eu affaire à eux, fit-il laconiquement.
Je tournai rapidement la tête dans leur direction, mais ils étaient en apparence totalement absorbés par leur jeu.
- Sont-ils...
- Non. Ceux-là, sont humains.
Ceux-là ?
Il poussa vers moi la bière qu'il m'avait commandée.
Je n'avais pas envie de boire d'alcool, mais je pris néanmoins la boisson entre les mains, et la fraîcheur du verre me fit du bien.
Je commençais à étouffer dans ce bar miteux et sombre de Pearl Sreet, il y faisait une chaleur d'enfer.
- Qu'est-ce qu'on attend au juste ? demandai-je.
La porte s'ouvrit au même moment, laissant place à un homme de taille moyenne visiblement d'origine latino.
Dès qu'il nous repéra, il rebroussa chemin d'un pas rapide.
Ezio poussa un soupir et posa un billet de dix sur le comptoir.
- Lui, lâcha-t-il avant de se diriger vers la sortie.
Je le suivis quasiment en courant, mais il était déjà loin. Accélérant la cadence, je le trouvai au coin d'une rue à gauche, ses mains serrées sur le t-shirt de l'homme qui avait pris la fuite, désormais écrasé contre le mur.
- Pourquoi tu t'enfuis, mon pote ? Tu sais bien que ça me fout en rogne de te courir après.
L'homme essaya de se dégager, en vain. Avec son jean délavé et son t-shirt large, il avait plus l'air d'un adolescent un peu rebelle, qu'un dealer.
Il leva les mains comme pour prouver son innocence.
- OK, amigo. Je suis désolé, c'est juste l'habitude.
L'expression d'Ezio montrait qu'il n'en croyait pas un mot.
- J'ai quelques questions à te poser, Juan. Aussi, je vais te relâcher, mais t'as pas intérêt à te barrer encore une fois. Compris, amigo ?
Juan acquiesça et Ezio le relâcha, sans pour autant baisser la garde.
Il n'y alla pas par quatre chemins.
- J'ai besoin de quelques infos sur une nouvelle drogue qui circule, tu sais celle qui a causé la mort de plusieurs...
Déjà, l'homme tentait de s'enfuir, paniqué.
Ezio le rattrapa par le col et l'écrasa violemment contre le mur.
- Qu'est-ce que j'ai dit ?
Juan se tint l'épaule en gémissant.
- Mec, j'ai rien à faire avec cette mierda...
- Pourquoi fuir, alors ? demandai-je. Ça vous donne l'air coupable.
Il me lança un regard partagé entre douleur et terreur.
- Parce que si on me surprend à vous parler, gringa, on va me faire un deuxième trou du cul !
Ezio resserra sa prise.
- Avec le temps, tu dois déjà en avoir quatre, au moins. Maintenant, tu vas cracher le morceau.
Résigné, Juan se dégagea tant bien que mal et rajusta son t-shirt. Il porta une nouvelle fois sa main à son épaule, et fit quelques gestes circulaires afin d'en tester la validité.
- Tu m'as presque arraché le bras, amigo...
- Parle ! Sinon, c'est autre chose que je vais t'arracher.
Juan regarda aux alentours pour voir si personne ne se trouvait à proximité, puis nous regarda tour à tour.
- Tout ce que je peux vous dire, c'est de voir du côté des Celtics V, à Somerville.
Il prit un ton suppliant.
- Mais vous dites à personne que l'info vient de moi. O estoy muerto ! fit-il en imitant de la main une lame passant sur sa gorge.
Sur ces derniers mots, il s'éloigna et reprit le chemin par lequel nous étions arrivés. Il se figea soudain en regardant à droite et écarquilla les yeux d'horreur, avant de s'enfuir en courant.
Quelques secondes plus tard, nous vîmes passer les trois rouquins qui avaient les yeux fixés dans la direction qu'avait prise Juan.
Ils se tournèrent vers nous et nous saluèrent d'un signe de la tête, avant de poursuivre leur chemin.
VOUS LISEZ
À Crocs T1 Le Sort Brisé [EN PAUSE]
VampirosEntre un vampire tueur en série à Paris, et un trafic de drogue qui éclate à New York, Nina va devoir redoubler d'ingéniosité pour venir à bout de ces enquêtes. Alors que sa rencontre avec Ezio, son nouveau coéquipier, bouleverse toutes ses croyanc...