Chapitre 24 - Chaud !

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Comment est-ce que ta mère est morte ?

Le goût sucré du dessert dans ma bouche se transforma en bile amère.

Comment est-ce que ta mère est morte ?

Tout devint flou autour de moi.

L'homme assis en face de moi attendait, neutre. Il savait ce que cette question provoquerait. Je le voyais dans le reflet vert de son âme sombre.

J'avalai difficilement alors que j'avais envie de tout recracher.

Le cœur battant, je m'efforçai de reprendre mes esprits.

Comment est-ce que ta mère est morte ?

Nous étions dans un restaurant. C'était mon collègue, et il me posait une question curieuse.

Avais-je le droit de lui en vouloir ?

Comment est-ce que ta mère est morte ?

- Elle est morte lors d'une fusillade. C'était de ma faute.

Je baissai les yeux sur ma poitrine.

Mon cœur battait tellement fort que je pouvais en distinguer les tremblements à travers mon chemisier.

Ezio avait les yeux rivés sur ma gorge d'un air soucieux. Mon pouls devait être dans tous ses états.

- Je sais que n'aurais pas dû te demander ça, mais...Peux-tu m'en dire pl... ?

- D'où viennent tes cicatrices ?

Il hocha la tête.

Il avait compris.

Combien de temps passa, je ne saurais le dire. Le niveau sonore du restaurant diminuait à mesure que les clients repartaient.

Insensible, j'observais ce qui se passait dans la rue.

Le printemps s'en allait et emmenait avec lui les douces brises qui rafraîchissaient les soirées bostoniennes.

La chaleur était étouffante en ce vendredi soir. Les enfants, heureux de ne pas avoir école le lendemain, essayaient de suivre la cadence des pas de leurs parents.

L'un d'eux, habillé en short gris et marinière, avait une glace à la main et tentait de la déguster, sans résultat. Sa mère le tirait par la main et ses petites jambes sautaient sur la pavé.

Alors qu'il était une énième fois secoué, son nez se prit dans sa glace au chocolat. Il leva les yeux pour vérifier la réaction de sa mère, mais celle-ci était occupée dans sa conversation avec son amie.

Le petit garçon, tout sourire, ignora son nez et se concentra sur son dessert.

Comment est-ce que ta mère est morte ?

A notre table, le silence s'était fait de plomb. Ce que pensait mon coéquipier, à cet instant, m'importait peu. Mais je sentais son regard inquisiteur me taillader la joue.

Le cœur lacéré, j'entendis Ezio héler le serveur, puis sa chaise émit un raclement tandis qu'il se relevait.

- L'homme que je voudrais interroger vient d'entrer dans le bar, annonça-t-il.

Je n'avais rien remarqué.

- Tu te sens d'attaque pour continuer ? Je peux...

- Pour qui est-ce que tu me prends ?

Il leva les mains en signe d'apaisement.

- Bien. Allons-y.

En mode automatique, mes jambes me menèrent dehors. Le voile d'incrédulité commençait à s'évaporer.

À Crocs T1 Le Sort Brisé [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant