Comme convenu on commence nos 4 jours d'hommage avec un chapitre inédit ! Rien de mieux qu'un chapitre fraichement rédigé pour garder en mémoire l'année durant laquelle mon histoire a vu le jour.
Une petite anecdote : Tout à commencé par un cauchemar que j'ai fait. Je me réveille en plein après-midi (c'était une sieste), et là je me dis « Mais c'était trop bien ce rêve ! » La machine était lancée, j'avais les bases pour écrire Les DesAstreux. J'ai peaufiné les détails et inventé les personnages et j'ai commencé à écrire le prologue...
Aujourd'hui vous découvrez le chapitre 8 et j'espère qu'il vous plaira car il annonce de grands évènements...
Bonne Lecture !
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Certains poètes et hommes de lettres affirmaient que par delà les frontières du pays vivait un peuple pour qui l'amour était un culte. La séduction était une activité qui s'y jouait en tandem et il n'était, semble-t-il, pas rare d'y voir des hommes faire la cour à leur dame. Mais tout paraissait toujours plus simple sous la plume d'un écrivain. Ils vivaient dans un monde où la narration remplaçait la réalité et où les figures de styles valaient plus qu'une vérité. Ils auraient même été capables de faire passer un criminel notoire pour le héros de leurs histoires. Pas étonnant que pour eux, l'amour soit si beau.
La vérité en Rexirivie était évidemment toute autre. Les relations amoureuses demeuraient un sujet que la société se gardait bien d'aborder. Et si d'aventure un homme venait à s'éprendre d'une rexivienne, il était de coutume de ne pas l'en informer. L'apaisement résultant de la libération du poids de ses sentiments était un privilège réservé aux femmes, expliquaient-ils. Enfin, malgré leurs airs affables, le but était surtout pour les hommes de reléguer le fardeau de la déclaration à la gente féminine. Sans compter la douleur d'un refus potentiel. Il n'était pas bon d'être une femme amoureuse en Rexirivie ; à plus forte raison lorsque l'on ignorait ce que c'était qu'aimer...
Il y avait bien longtemps que Jyhann avait cessé d'éprouver de tels sentiments. À la mort de ses parents, la jeune fille s'était retrouvée seule, sans personne à qui parler. Une enquête avait été ouverte pour déterminer les conditions de ce double homicide aux attributs si particuliers. Mais à l'époque, le Meurtrier Sanguinaire n'était pas aussi connu qu'aujourd'hui. L'affaire avait rapidement été classée sans suite, abandonnant la fillette en proie aux rumeurs et aux railleries. Certains parlaient d'une malédiction venue s'abattre sur sa famille, et d'autres, plus médisants encore, auguraient le retour de l'assassin, afin de terminer le travail qu'il avait commencé. Très vite, les parents des autres enfants avaient fini par refuser que leurs progénitures côtoient l'orpheline maudite. Et Jyhann n'avait dès lors plus connu d'autres sentiments que l'amertume de la solitude.
La jeune fille avait grandi aujourd'hui. Elle avait troqué son image d'enfant déplorable contre le prestigieux uniforme de la Lame Sacrée. Et comme les amis de confiance ne se bousculaient toujours pas à sa porte, la solitude demeurait sa plus fidèle connaissance. Mais il y avait Anthelme maintenant. Le garçon était toujours prévenant avec elle, réalisant pour Jyhann ce que ses parents n'avaient eu le temps d'accomplir. C'était peut-être même ce manque commun de famille qui les avait lié si rapidement. Il l'encourageait au quotidien, l'aidant en pratique comme en théorie. Mais s'il y avait bien point pour lequel elle lui était extrêmement reconnaissante, c'était pour son soutien moral. Être une apprentie Justicière était un rôle bien plus difficile à porter que Jyhann ne l'aurait imaginé et sans la présence d'Anthelme dans sa vie, elle n'aurait jamais tenu aussi longtemps. Si bien qu'aujourd'hui, la jeune orpheline ne savait plus trop quoi penser de son ami épéiste.
Toutefois, si Jyhann disposait d'autant de temps pour réfléchir à des sujets sans importance, c'était surtout parce qu'Anthelme manquait à l'appel. La transition du premier au second cycle était marquée par le passage devant les rhigans et leurs pierres, mais également par la promotion des aspirants en Justiciers confirmés. Ainsi, Il arrivait parfois que le jeune épéiste s'absente quelques temps pour réaliser des missions sur l'ensemble du territoire rexiviens. Et dans ces moments où Anthelme jouait au héros aux quatre coins du pays, Jyhann se retrouvait de nouveau en compagnie de sa plus vieille amie. La différence étant qu'en ce moment précis, elle n'était pas seule.
Ils devaient être un peu moins d'une centaine d'étudiants, tous cycles confondus, à déjeuner au réfectoire de la Lame Sacrée. Au menu du jour, les délices se succédaient. Les Justiciers mettaient un point d'honneur à conserver une alimentation saine, même durant leurs jours de repos. Tout comme le forgeron entretenait ses instruments avec précaution, prendre soin de corps était une nécessité lorsqu'il était votre outil de travail. Et contrairement à ce que l'on pouvait penser, manger équilibré était loin d'être une corvée quand on savait cuisiner. Chaque jour, les étudiants se ruaient au réfectoire tant les mets proposés étaient de qualité. Néanmoins, malgré le monde qu'attirait les talents culinaires des cuisiniers, Jyhann se sentait toujours seule à sa table, sans personne à qui parler...
Le gobelet en métal effleura les lèvres de la jeune fille y déversant au passage le liquide qu'il contenait. Installée non loin de la sortie, elle terminait silencieusement son repas, savourant chaque goutte de ce "méli-mélo fruité" qu'elle aimait tant. Le nectar s'écoulait encore sur ses papilles lorsque Jyhann aperçu Kana déambulant entre les tables. En y repensant, les deux filles auraient probablement pu devenir amies si les circonstances avaient été différentes. Elles ne se détestaient pas, loin de là. Au contraire, être les deux seules filles d'une promotion de onze les avaient même rapprochées au départ. Puis Cyntheude s'en était mêlé... Kana avait simplement jugé plus prudent pour sa réputation de ne pas être vu trop souvent auprès de la bête noire du camp. Et Jyhann ne lui en voulait même pas, des organes en commun ne suffisaient pas à créer une amitié. A vrai dire, elle aurait sûrement fait le même choix à sa place. Chacun avait ses raisons de vouloir devenir Justicier, on ne pouvait lui reprocher de mettre toutes les chances de son côté.
Dans le réfectoire, personne ne semblait remarquer la jeune fille qui se déplaçait à tâtons, comme si elle avait été à la recherche de quelque chose, ou de quelqu'un. Cela faisait bientôt cinq mois que les premier cycle étaient entrés à la Lame Sacrée, et même Jyhann avait cessé de se perdre pour aller manger. Il n'y avait donc que peu de chance pour que Kana se soit perdue. Elle aurait voulu venir en aide à sa camarade en détresse, mais la sensation de gêne qu'elle ressentit fut plus forte que sa volonté. Même des cuisses entraînées comme celles de Jyhann ne pouvait soulever le poids de son malaise. Anthelme l'encourageait régulièrement à aller vers les autres, pour se faire des amis et s'intégrer tout simplement. Mais qu'auraient-elles bien pu se dire après tout ce temps passé à s'éviter ? La jeune fille resta donc assise, honteuse de n'avoir pu passer outre son anxiété. Et son angoisse ne fit que croître lorsqu'elle compris quel était l'objet des recherches de sa camarade.
Kana marchait d'un pas assuré à présent, fixant son regard pétillant sur la jeune fille toujours attablée. Cette dernière jeta un oeil dans son dos, cherchant désespérément la personne à l'origine du déplacement de sa camarade. C'est à cet instant que Jyhann se rendit compte à quel point elle appréhendait les relations avec les autres. Devenir intime avec la solitude l'avait privée du développement normal d'une enfant. Se faire des amis, se disputer puis se réconcilier. Elle n'avait que peu connu cela dans sa vie. Elle savait chasser pour se nourrir, mentir pour manipuler et voler pour survivre... Mais tenir une simple conversation avec une fille de son âge lui paraissait insurmontable. Elle ne se rappelait pourtant pas avoir ressenti cela avec Anthelme. Toutefois avec lui ce n'était pas pareil ; tout semblait différent avec Anthelme... Elle n'avait plus le choix maintenant, Kana n'était plus qu'à quelques pas. Il était trop tard pour se lever l'air de rien et feindre de ne pas l'avoir vu arriver.
- Salut, tu vas bien ?
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Les DesAstreux - Tome 1 : La Lame Sacrée
FantasíaDésormais fille des rues, Jyhann ne doit sa santé qu'à ses capacités à voler et manipuler. Dans les quartiers sud, on appelle cela _le jeu de la survie_, mais il y a longtemps que vivre ne fait plus partie de ses priorités. Brisées par le meurtre de...